Ma maison, mon quartier, ma sécurité

Solange BERGER.

Voilà pour ce qui est des demandes individuelles. `Les gens sont devenus anxieux. Ils aiment le cocooning, mais aujourd'hui, on peut presque parler d'un cocooning emprisonné. Ils sont individualistes. Le chacun pour soi prime´.

POUR UNE OUVERTURE

Mais pour certains, il faut voir plus loin que l'individu. Et penser: collectivité et environnement. `Il est vrai que le réflexe premier pour se protéger est de se créer une sorte de bunker. Et pourtant je crois à la solution inverse, à l'ouverture´, explique un responsable de Matexi, société spécialisée dans la construction de maisons individuelles et de lotissements.

`Il faut, dans un ensemble, un lotissement, un quartier, essayer d'avoir une cohésion sociale´, note pour sa part Maciej Mycielski, responsable de la cellule urbanisme chez Matexi. `Un quartier doit être une zone de vie, un endroit où les gens se sentent bien et donc en sécurité. C'est l'environnement qui doit changer. La sécurité doit avoir un aspect durable. Il faut jouer sur le long terme et dépasser l'aspect `gadgets´, comme les alarmes, les volets... L'idée que chacun s'enferme chez soi est une solution à court terme´.

Pour cet urbaniste, il y a parfois des règles très simples à appliquer pour rendre cet environnement plus sûr. Et de citer quelques exemples. `La mixité est une chose importante à intégrer dans un quartier. S'il n'y a que des gens actifs qui y habitent, ils partiront tous travailler en même temps et laisseront un quartier vide, proie de choix pour des voleurs; de même un quartier de bureaux sera vide la nuit, tout comme un shopping center. C'est une erreur qu'on a faite après la guerre de séparer les fonctions et de créer des zones de bureaux, de grands shopping centers... Dans des zones mixtes, il y a une sorte de contrôle social informel´.

Dans le même ordre d'idée, et suivant les conseils du Secrétariat permanent à la politique de prévention du ministère de l'Intérieur (1), il est important de stimuler le logement au-dessus des magasins. Ainsi, l'on a constaté que dans un quartier de Namur où de nombreux logements existent au-dessus des magasins, les étalages n'ont pas besoin d'être protégés par des volets.

Un autre conseil concerne les façades. ` Dans un lotissement, si au bout d'une perspective il y a une maison, il faut qu'elle ait des fenêtres donnant sur la rue. Cela a un impact sur un voleur potentiel qui se sent surveillé. Une porte de garage n'a pas le même effet´. Un problème que l'on rencontre souvent aux abords des centres commerciaux où les façades extérieures constituent des murs aveugles. Il faut également éviter les immeubles qui n'ont que des garages au rez-de-chaussée. Cela donne un aspect triste et sinistre à une rue. Mais les parkings en sous-sol n'ont pas non plus toujours la cote.

` L'accessibilité est aussi importante. Un endroit accessible permet d'effectuer des choix, ce qui a une influence positive sur le sentiment de sécurité. On peut ainsi éviter, par exemple, une rue sombre en en prenant une autre. Les culs-de-sac notamment entravent cette accessibilité´.

Pour animer l'espace public et lutter ainsi contre le sentiment d'insécurité, le Secrétariat permanent à la politique de prévention suggère également une zone de transition (de maximum 5 mètres) entre la rue et la maison: un petit parterre de fleurs, un jardinet... De quoi garantir une intimité suffisante aux habitants tout en conservant des possibilités de contacts avec la rue.

L'on constate en effet que, bien souvent, si la maison est à front de rue, pour se protéger des regards, les habitants vont `barricader´ leurs fenêtres. Le contact avec la rue est alors rompu et le contrôle informel inexistant.

ET LA ROUTE?

Evoquant la sécurité contre le vol, Maciej Mycielski pense inévitablement à la sécurité routière, autre point capital dans la conception urbanistique. `Dans ce cadre, aussi, des erreurs ont été commises´. Et de citer deux situations. ` Si l'on évoque à nouveau la séparation des fonctions (du logement, des bureaux, du commerce), l'on constate qu'une telle situation nécessite, presque à chaque fois, de prendre sa voiture´. En cas de mixité des fonctions, tout est à portée de mains.

Autre cas: celui des tournants en angle droit remplacés par des angles arrondis, ce qui plaît aux pompiers et aux éboueurs - car cela facilite la manoeuvre - mais incite les voitures à rouler plus vite. Soit un danger pour les piétons. Comme quoi l'insécurité a de nombreux visages. Mais cela, c'est une autre histoire...

(1) Le Secrétariat a publié une brochure destinée aux communes et intitulée `Plus de sécurité dans l'environnement´. Celle-ci fait état des résultats d'une recherche menée par le Provinciaal Hoger Architectuurinstituut de Diepenbeek sur l'influence des facteurs urbanistiques sur l'insécurité dans les espaces publics. Rens.: 02.500.49.87.

© La Libre Belgique 2002

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