Salmane, dans une continuité mouvante

Braun Vincent
Saudi King Abdullah bin Abdulaziz has died, royal officials have announced, weeks after he was admitted to hospital. King Abdullah, who was said to be aged about 90, had been suffering from a lung infection. A statement early on Friday said his 79-year-old half brother, Salman, had become king. File photo : Saudi King Abdullah Bin Abdulaziz Al Saud seen with behind him a fabric that traditionnally covers the 'Kaaba', as he receives Moslem delegates and clerics from different parts of the world at the International Islamic Conference for Dialogue, in Mecca, Saudi Arabia, on June 4, 2008. The 3-days conference will discuss interfaith dialogue and place of islam with other religions. Photo by Ammar Abd Rabbo/ABACAPRESS.COM Reporters / Abaca
Saudi King Abdullah bin Abdulaziz has died, royal officials have announced, weeks after he was admitted to hospital. King Abdullah, who was said to be aged about 90, had been suffering from a lung infection. A statement early on Friday said his 79-year-old half brother, Salman, had become king. File photo : Saudi King Abdullah Bin Abdulaziz Al Saud seen with behind him a fabric that traditionnally covers the 'Kaaba', as he receives Moslem delegates and clerics from different parts of the world at the International Islamic Conference for Dialogue, in Mecca, Saudi Arabia, on June 4, 2008. The 3-days conference will discuss interfaith dialogue and place of islam with other religions. Photo by Ammar Abd Rabbo/ABACAPRESS.COM Reporters / Abaca ©Reporters / Abaca

Arabie saoudite Le demi-frère d’Abdallah, décédé vendredi, a pris sa succession. Nous resterons, avec la force de Dieu, sur le chemin droit que cet Etat a suivi depuis sa création par le roi Abdelaziz Al Saoud et par ses fils après lui." Il a suffi d’une phrase pour que le nouveau roi d’Arabie saoudite, Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, 79 ans, signifie que rien ne changera vraiment dans cette puissante monarchie pétrolière, après la mort de son demi-frère, le roi Abdallah, emporté vendredi par une pneumonie. Ce dernier était hospitalisé depuis le 31 décembre mais sa récente intubation avait fait craindre le pire pour le souverain nonagénaire.

Cet été aurait marqué les dix ans de règne d’Abdallah, qui assurait depuis 1995 la régence du royaume wahhabite. Il était souvent présenté comme un réformiste, plutôt libéral dans certains domaines - pour autant que ces termes aient un sens dans cette monarchie absolue qui applique une conception rigoriste de l’islam. Dans le plus grand pays du Moyen-Orient (deux millions de kilomètres carrés, soit trois fois la France), gardien des deux premiers lieux sacrés de l’islam, les femmes ne peuvent toujours pas conduire et sont placées sous la tutelle d’un homme pour se marier, travailler, se déplacer, voyager.

Deuxième génération

Comme de coutume lors d’une succession, le roi Salmane a nommé le prince Mohammed ben Nayef, 55 ans, en tant que "futur prince héritier", soit celui qui succédera au successeur déjà désigné, le prince Moqren, 69 ans. Outre la garantie de continuité qu’elle offre à cette dynastie sunnite, cette nomination constitue un petit événement dans cette gérontocratie connue pour sa stabilité politique. Elle introduit pour la première fois dans l’ordre de succession la "deuxième génération", celle des petits-fils du roi Abdelaziz Al Saoud, fondateur de l’Arabie moderne (1932) auquel il a donné son nom. Mais d’après certains analystes, cela pourrait réveiller les tensions et les rivalités dans la famille, les fils de Salmane pouvant être tentés de profiter du règne de leur père pour se placer dans la course au trône.

Toutefois, les changements de politique devraient être limités, dans la mesure où la plupart des ministres du "diwan" (cabinet) restent en place.

Dans son discours inaugural, le nouveau Roi a plaidé aussi pour l’unité et la solidarité, ce dont "l’oumma (la communauté musulmane, NdlR) a le plus besoin" à l’heure où ses voisins, tels l’Irak et le Yémen, sont déchirés par des conflits qui menacent leur souveraineté, voire leur intégrité territoriale. Tout comme le sont d’autres pays arabes, la Syrie et la Libye.

Enjeu d’adaptation

Le roi Abdallah avait fait de la lutte contre Daech, l’organisation jihadiste Etat islamique qui menace la région, une priorité pour son pays en intégrant la coalition militaire internationale pilotée par l’allié américain. Une décision qui constituait déjà un changement radical, commentait Antoine Sfeir, le directeur des "Cahiers de l’Orient", à la télévision française.

"Le principal enjeu pour l’Arabie saoudite est qu’elle devra se positionner par rapport à une situation régionale changeante", souligne le sociologue et politologue Rudolf el Kareh, spécialiste du Moyen-Orient. "Tôt ou tard, il y aura un accord sur le dossier nucléaire de l’Iran (son ennemi historique, NdlR). L’Arabie saoudite devra alors s’adapter à cette nouvelle donne dans la région. Si elle le fait avec intelligence, elle contribuera à mettre en place les modalités d’un accord régional allant dans le sens d’une sécurité commune et collective".

"Ce qui est certain", poursuit l’analyste, "c’est que la position saoudienne ne changera pas vis-à-vis des Frères musulmans". L’an dernier, le Royaume avait placé la confrérie égyptienne sur sa liste des organisations terroristes. Tout comme l’avait fait l’année précédente l’Egypte, sur laquelle l’Arabie saoudite conserve une grande influence. On se souvient de l’aide financière que Riyad avait débloquée dès que l’armée égyptienne eut débarqué le président islamiste Morsi. Cette emprise non plus ne devrait pas changer.

Vincent Braun

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...