Me François Dessy, plaideur au sommet de son art, à Caen
- Publié le 02-02-2015 à 18h55
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Le jeune avocat hutois a remporté le célèbre concours français de plaidoiries. En évoquant le sort de M. Van Den Bleeken.Portrait Jean-Claude Matgen Dans la famille Dessy, le barreau on connaît et le droit, on aime. François est, à ce titre, le très digne héritier de son père, le bâtonnier Jean-Luc.
Le fils, inscrit au barreau de Huy, vient de remporter, devant un public de 2 500 personnes, le très convoité premier prix de la Ville et du Mémorial de Caen. Les dix candidats au célèbre concours français de plaidoiries étaient invités à aborder des cas concrets d’injustices. Me Dessy avait intitulé son intervention : "Enfer mental et damnation carcérale : pour un sursaut d’humanité à l’ombre de nos sociétés" .
L’affaire Van Den Bleeken
Il a évoqué, de façon particulièrement vibrante, le sort de Frank Van Den Bleeken, cet interné détenu depuis plus de vingt-cinq ans pour plusieurs délits à caractère sexuel. L’homme, en grande souffrance psychique, se plaignait de ne pas recevoir les soins adaptés à son cas en Belgique. Il avait, n’ayant pu obtenir d’être traité aux Pays-Bas, demandé une euthanasie qui n’a pas eu lieu. Ses médecins y ont renoncé après que le nouveau ministre de la Justice, Koen Geens, se fut engagé à faire traiter M. Van Den Bleeken dans un centre psychiatrique de Gand avant un possible transfert aux Pays-Bas.
Mais avant l’intervention de M. Geens, l’Etat avait bel et bien accepté qu’on supprimât l’interné et c’était l’objet de l’intervention de Me Dessy, pour qui, en l’occurrence, un pouvoir, qui devrait s’ériger en modèle, a admis que fût éliminé un homme qu’il aurait dû aider et secourir. En agissant de la sorte, l’Etat a appliqué, a plaidé l’avocat, une forme de peine de mort puisque M. Van Den Bleeken en était arrivé au point d’attendre, dans sa cellule sinon dans son couloir, son injection.
"Jamais , témoigne Me Dessy, je n’aurais pris la plume deux semaines avant la date du dépôt des écrits de plaidoiries du concours, si cet homme, privé de liberté, ne m’avait tant bouleversé. Toutes criminelles et odieuses que soient ses actions passées."
Lecteur, auteur, conférencier
Licencié en droit de l’UCL, Me Dessy est également passé par l’université de Birmingham et par la Sorbonne. Inscrit au barreau de Huy depuis dix ans, il travaille dans le cabinet où œuvre aussi son père, que les médias connaissent pour avoir été le conseil d’Alain Vander Biest, être intervenu dans les dossiers de la filière Boraine et des tueurs du Brabant ou encore dans les affaires Systermans et Matton-Interagri, pour ne citer qu’elles.
Mais revenons au fils. On peut dire de lui que c’est un homme engagé. Sa matière de prédilection est et restera à jamais le droit pénal. Il le pratique dans les salles d’audience mais à sa riche activité de juriste, il ajoute de nombreuses conférences et publications.
Par passion et par plaisir. C’est un pur littéraire, qui n’aime rien tant que la lecture et la fréquentation des bibliothèques, même s’il ne dédaigne pas les parties de tennis endiablées.
La lecture, disions-nous, mais aussi l’écriture. Celle des textes servant de supports à ses interventions publiques (ne fut-il pas, par exemple, celui qui, en 2010, prononça le discours de la rentrée solennelle de son barreau sur le thème : "Voltaire : la douce insurrection de l’ironie") et celles d’ouvrages, comme ceux qu’il rédige dans la collection "Les grands entretiens", aux éditions de L’Aube. Il en a déjà signé deux, avec Roland Dumas et feu Jacques Vergès et en publiera bientôt deux autres, avec Jean-Denis Bredin, avocat, écrivain et membre de l’Académie français, et l’immense Me Paul Lombard.
C’est d’ailleurs à Dumas (Roland pas Alexandre) que François Dessy emprunte sa définition de l’avocat. C’est, dit-il en substance, "le dernier rempart, celui qui demeure quand l’homme le plus honni, celui que l’on considère comme un monstre se retrouve seul et nu".