«Retraité», Léopold III a trouvé le bonheur
En cette année du centenaire de sa naissance et du cinquantenaire de son abdication, Léopold III suscite une abondante activité éditoriale. Le dernier livre en date, basé sur des sources de première main, défriche un terrain nouveau : la vie du Roi «homme libre», après le dénouement de 1951.
Publié le 27-08-2001 à 00h00
ENTRETIEN
En cette année du centenaire de sa naissance et du cinquantenaire de son abdication, Léopold III suscite une abondante activité éditoriale, renforcée par le succès de son plaidoyer d'outre-tombe, «Pour l'histoire», un best-seller de l'été.
Jean Cleeremans, avocat honoraire et biographe formé sur le tas, à qui on devait déjà trois études consacrées au Souverain, n'a pas manqué le rendez-vous. Son nouveau livre, basé sur des sources de première main, défriche un terrain nouveau: la vie du Roi «homme libre», après le dénouement de 1951 (1).
Ce qu'on connaît le mieux, c'est la passion des grands voyages...
Il avait déjà voyagé beaucoup avant d'être roi et il a recommencé. Il préparait chacun de ses périples avec une minutie extraordinaire. Il était déjà heureux avant de partir! Il y a eu des cas de missions confiées par le gouvernement, notamment dans le cadre de la commission nationale créée en 1957 pour l'étude des problèmes posés par «le progrès des sciences et leurs répercussions». Il a ainsi été envoyé en Amérique du Sud afin de trouver des débouchés pour nos jeunes et nos colons chassés du Congo. Il s'est aussi rendu aux Etats-Unis où son amitié avec l'amiral Strauss, chef des services secrets atomiques américains, lui a permis de ramener des informations sur l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire.
Les explorations qu'il décidait lui-même, c'était pour son édification personnelle ou cela «servait» à quelque chose?
Il en a tiré des films ou des albums, comme «Les seigneurs de la forêt» (sur le Congo) ou «La fête indienne» (sur les Indiens du Haut-Xingù). Il a aussi ramené des spécimens, notamment dix mille poissons d'Amazonie qui ont été remis au Musée des sciences naturelles. Il y a aussi un aspect humanitaire important, notamment dans le cadre de la Fondation de lutte contre la lèpre.
Quid des rumeurs d'infidélité conjugale, qu'on retrouve encore dans le «Baudouin» de José-Alain Fralon?
Ce sont des accusations dues au fait que Léopold et Lilian ne voyageaient pas toujours ensemble. Mais certaines régions n'étaient pas sans danger. Je ne peux pas dire qu'il n'y a pas eu des frottements, mais que le Roi se soit méconduit, je ne le crois pas.
Que retenez-vous de ses relations avec ses fils?
Après que le Roi ait quitté Argenteuil - pour qu'on ne puisse plus dire qu'il pesait sur les décisions -, il est certain qu'il a continué à voir Baudouin en secret. Du côté d'Albert, je ne sais pas ce qui a pu se passer, mais les raisons de la brouille avec Fabiola sont connues. Pendant le voyage de noces, Léopold et Lilian ont déménagé les meilleurs meubles de Laeken pour les prendre chez eux. Il est vrai qu'ils appartiennent à la famille, mais ils auraient peut-être pu éviter des froissements en en parlant avant...
Léopold III était-il rancunier?
Je garde le souvenir d'un grand monsieur, très serein, heureux d'être «libre», n'en voulant à personne, même après ce qu'il avait subi. Il s'est réconcilié avec le prince Charles et même avec Van Acker. Le seul qu'il n'aurait jamais reçu, c'est Pierlot parce qu'il avait dépassé les bornes en accusant le Roi de traiter avec l'ennemi.
(1) «Léopold III homme libre», J.-M. Collet, 255 pp., 645 F (15,99 euros).
© La Libre Belgique 2001