`Le chantage institutionnel flamand sera moins effrayant qu'avant´
Publié le 18-08-2002 à 00h00
Pensez-vous qu'il sera possible d'échapper à une grande négociation institutionnelle? La Communauté française a été refinancée, les francophones n'ont plus rien à demander, mais la pression flamande est toujours très grande...
Si on a échappé à une grande négociation communautaire lors de la formation du gouvernement en 1999, c'est non seulement parce que les francophones devaient rester dans la logique du front du refus préélectoral, mais c'est aussi et surtout parce que nous étions en pleine crise de la dioxine. Des intérêts économiques et de santé publique étaient en jeu. On ne sera plus dans une configuration semblable et je ne pense pas que les partis flamands auront envie de répéter l'expérience.
Pourquoi?
Parce que dans la dernière déclaration gouvernementale flamande qui établissait la liste des demandes institutionnelles, tous les partis du gouvernement flamands se sont engagés à défendre ces positions au niveau fédéral. Je crois que les partis flamands vont tenter de serrer les boulons dès la négociation gouvernementale.
Pourquoi les Francophones céderaient-ils? Il y a toujours un front du refus et on peut penser qu'il n'y a plus de crise exigeant un gouvernement rapide...
Toutes les demandes flamandes ne sont peut-être pas `onbespreekbaar´ par les francophones car il y a aussi un mouvement régionaliste wallon. La régionalisation de la loi communale et provinciale n'effrayait les francophones que pour la question des communes à statut linguistique particulier. La régionalisation partielle de la politique de l'emploi peut trouver des partisans au Sud du pays, chez José Happart ou Jean-Claude Van Cauwenberghe, peut-être.
Il y a quand même eu des déclarations très fermes des francophones disant leur opposition aux revendications flamandes...
Il est clair que les dossiers majeurs et délicats se situeront du côté de la fiscalité (régionalisation partielle de l'impôt des personnes physiques ou des sociétés ou autonomie fiscale accrue) mais aussi, bien entendu, de la sécurité sociale pour laquelle les francophones ont toujours refusé la communautarisation de deux branches: les soins de santé et les allocations familiales. Cela reste normalement non-négociable. Le dossier le plus central pourrait être la SNCB: la volonté flamande est claire. Et l'on peut imaginer un jeu subtil du côté flamand qui consisterait à présenter les deux dossiers de front en pariant sur le fait que les francophones feraient, finalement, une concession sur l'un des deux points: la SNCB en l'occurrence. Reste encore la possibilité de découper plus finement les matières de la Sécu à communautariser:on a les systèmes imaginés pour le crédit-temps, l'assurance dépendance. Je ne sais pas si les francophones seront en mesure de tout refuser.Évidemment, les francophones auront le temps. Depuis l'euro, le chantage flamand consistant à dire que s'il n'y a pas de réforme institutionnelle, il n'y aura pas de gouvernement belge, est beaucoup moins effrayant. La monnaie est commune à toute l'Europe et la situation budgétaire est suffisamment saine pour que l'on puisse se permettre une crise longue.
© La Libre Belgique 2002