L'arrivée de Josly Piette ravive les clivages au sein du CDH

Gueule de bois. Alors que la présidente du CDH doit confirmer, ce jeudi, le nom de Josly Piette comme ministre de l'Emploi orange, alors que les militants humanistes sont attendus, dans la soirée, pour approuver la participation du parti au gouvernement, le réveil est pénible. C'est que la désignation du syndicaliste reste en travers de quelques gorges humanistes. A revers, le monde de la Démocratie chrétienne exulte.

M.Bu., V.R. et V.d.W.

Gueule de bois. Alors que la présidente du CDH doit confirmer, ce jeudi, le nom de Josly Piette comme ministre de l'Emploi orange, alors que les militants humanistes sont attendus, dans la soirée, pour approuver la participation du parti au gouvernement, le réveil est pénible. C'est que la désignation du syndicaliste reste en travers de quelques gorges humanistes. A revers, le monde de la Démocratie chrétienne exulte.

"En général, tranche Joëlle Milquet, ce sont les présidents de parti qui décident du nom des ministres, il n'y a pas de débat autour de cette question !" "Il n'y a personne, reprend la présidente du CDH, qui ait les compétences de Josly Piette pour occuper le ministère de l'Emploi. Il n'y a pas de profil équivalent au sein de mon parti pour un interim de trois mois. Josly Piette est quelqu'un de très modéré, qui a une expérience incroyable de cette matière. Et il est respecté de tous les partenaires sociaux. Il dépasse tous les clivages."

Vraiment ?

La gauche chrétienne est au septième ciel. "Josly, c'est un excellent choix, lâche un ténor de la Démocratie chrétienne. J'ai vécu dans les coulisses de la négociation à Val Duchesse. J'ai vu combien Josly Piette parlait juste, combien ses positions étaient rapidement acceptées. Il a impressionné les autres négociateurs." Un autre baron de la mouvance sociale-chrétienne : "C'est un rééquilibrage ! Regardez : sur l'ensemble des ministres CDH, pas un seul n'était issu des rangs du monde du travail. Il faut remettre les choses dans leur perspective historique. Si on laissait passer le train ce coup-ci, on était cuits pour longtemps. En gros, c'était Josly Piette ou rien du tout."

Mardi soir, la réunion des instances dirigeantes du CDH a laissé des traces. Plusieurs cadres du parti ont soulevé des questions brûlantes. Ainsi, quelques responsables humanistes, dont Melchior Wathelet, qui fut chef de file dans l'opposition, le sénateur Francis Delpérée ou encore la ministre communautaire Catherine Fonck, ont-ils soulevé quelques objections face au volte-face - j'y vais, j'y vais pas - effectué en l'espace d'une journée.

"Danser sur les tables"

"C'est bien simple, résume un participant à la réunion, seule la DC danse sur les tables. Jean-Jacques Viseur, par exemple, est aux anges." Certains élus disent vouloir "arrêter de faire croire que le CDH n'est pas un parti de gauche"... D'autres se demandent s'il est bien sage de s'appuyer à ce point sur le CD&V et le PS : "On peut travailler en équipe, mais être redevable à 100pc, c'est toujours dangereux."

Et voilà le parti centriste tiraillé entre les secousses qui, naguère, agitèrent le Parti social-chrétien. "Le problème, relève un observateur, c'est que lorsqu'il s'agit d'occuper une fonction visible, on va toujours puiser dans le même vivier." Philippe Maystadt avait été pressenti pour faire partie du Comité des Sages, Jean-Jacques Viseur est au maïorat de Charleroi,... Et qui accompagnait la présidente et Melchior Wathelet lors des négociations à Val Duchesse ? Benoît Drèze, Denis Grimberghs et Josly Piette : trois membres de la Démocratie chrétienne. Le Liégeois Benoît Drèze pourrait d'ailleurs être appelé à jouer un rôle de premier plan au sein du cabinet du ministre de l'Emploi. Il avance en tout cas qu'il viendra l'épauler. Ils font partie de la même famille : la démocratie chrétienne liégeoise.

"Un symbole important"

Sans remettre en question les qualités intrinsèques de Josly Piette pour la fonction qui l'attend, certains responsables du CDH redoutent l'impact que pourra avoir cette désignation. Primo, disent-ils, si on cherchait à illustrer le positionnement du CDH à gauche, alors Josly Piette était l'homme qu'il nous fallait. Secundo, ajoutent-ils, c'est un précédent dangereux : le nom de M. Piette a été fortement soutenu par deux autres partis : le PS et le CD&V. "Jamais, auparavant, un parti ne s'est fait imposer un ministre par un autre parti", grince-t-on chez les humanistes. Tertio, le "reciblage" du CDH vers la gauche laisse le champ libre au MR pour occuper le centre droit, voire le centre, de l'échiquier politique francophone.

Au sein de la Démocratie chrétienne comme au sein du Mouvement ouvrier chrétien, la nomination de Josly Piette passe pour être "un geste fort". "Le CD&V a renoncé au poste de l'Emploi qui avait été promis à Inge Vervotte, commente un mandataire CDH. Il a en outre accepté qu'il soit attribué à quelqu'un, Josly Piette, qui s'est clairement positionné contre toute tentative de régionalisation de l'Emploi. On ne se rend pas encore très bien compte du symbole que cela représente." Ce n'est du reste pas le seul symbole. "Avec Josly Piette, argumente un responsable du Mouvement ouvrier chrétien, il y a un rempart contre les libéraux. Nous étions très mécontents des premières notes de l'orange bleue. Le fait de le nommer nous rassure. Les signaux envoyés, notamment par le président de la CSC, Luc Cortebeeck, qui n'a jamais rompu les ponts avec Yves Leterme, semblent avoir été entendus."

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