La Belgique terre religieuse

La société belge francophone n'est pas aussi a-religieuse qu'on le pense.Le Baromètre du religieux montre que le christianisme interpelle toujours un francophone sur deux. L'islam perce surtout à Bruxelles. RéagissezInterview d'Olivier Servais, sociologue de l'UCL,à propos du baromètre des religions

Christian Laporte
La Belgique terre religieuse
©BELGA

Le Baromètre du religieux 2008 porte bien son nom. En effet, alors qu'on aurait pu s'attendre au constat d'un déclin des religions en Belgique, avec une chute radicale du catholicisme, les chiffres rassemblés par le bureau d'études Sonecom à l'initiative de "La Libre Belgique", de "Dimanche", de la RTBF, de Lumen Vitae et de l'UCL s'inscrivent en faux contre cette vision. Mais, bien entendu, si la Belgique reste une terre religieuse, c'est dans le contexte d'un pays occidental à l'aube du XXI e siècle.

Ainsi 43 pc de Belges francophones se disent encore catholiques face à 17 pc d'athées, 10 pc d'agnostiques et 0,8 pc qui se reconnaissent clairement dans la laïcité organisée. Mais la donnée la plus marquante de la deuxième édition du Baromètre du religieux est quand même la présence désormais en communauté française de Belgique de 12 pc de musulmans. Si à Bruxelles, ils représentent un tiers de la population, leur présence est plus relative dans les provinces francophones mais leur position face aux grands enjeux de transmission des valeurs est telle que la donne devrait interpeller les décideurs politiques comme le dit dans notre dossier le sociologue et anthropologue Olivier Servais (UCL) dans une optique plus positive de nécessité de dialogue que, par exemple, celle de Samuel Huntington qui y verrait surtout un choc des civilisations...

Du reste, les données récoltées par Sonecom tendent à montrer que les Belges restent très religieux : 80 pc se disent attachés aux traditions religieuses mais 68 pc se disent croyants. Dont 42 pc de non-pratiquants mais aussi plus d'un quart qui disent encore pratiquer.

Certainement pas tous les dimanches comme jadis : 23 pc des Belges francophones ont assisté à au moins 10 offices religieux ces douze derniers mois et il y a un noyau dur de 8 pc qui a assisté à au moins une cérémonie par semaine. Mais en même temps, un sur trois n'a pas mis les pieds dans une église, un temple ou une synagogue.

Lieu de recueillement

Cela dit, lorsqu'on interpelle les visiteurs de lieux du culte, leurs réponses sont intéressantes : près d'un sur deux y entre pour se recueillir et un tiers pour participer à des célébrations religieuses communes. Un Belge francophone sur sept participe à la vie de la communauté religieuse : 13 pc font des pélerinages et une quantité équivalente est familière de retraites.

La prière ? Elle interpelle un Belge sur deux. De temps en temps ce qui contraste avec un tiers de la population qui ne prie jamais... Il est aussi intéressant d'approcher l'expérience du divin : 64 pc disent l'avoir trouvé dans la nature et à peine moins dans l'amour et dans la prière. Mais pour deux Belges sur cinq, c'est dans l'engagement social.

Et Dieu dans tout ça ? Pour près de 60 pc, son existence est au moins probable. Et 38 pc en sont sûrs. Un tiers est dans le doute ou l'incertitude mais 12,5 pc affirment sa non-existence. La mort ou plutôt ce qui pourrait se passer dans son sillage divise aussi très fort les francophones : près d'un francophone sur quatre estime qu'il n'y a rien mais ils sont quand même 72 pc à estimer qu'il y a quelque chose lorsqu'on passe de l'autre côté du miroir.

Mais au-delà de ce portrait spirituel, le Baromètre est surtout très éclairant sur la manière dont se fait ou devrait se faire la transmission des valeurs religieuses mais aussi laïques. A l'heure de la famille éclatée, l'école est le premier lieu d'éducation religieuse ou philosophique. A l'inverse, à l'autre bout de l'échelle, les médias sont considérés comme n'entrant pas du tout dans l'éducation religieuse ou philosophique par 55 pc des personnes consultées. Selon le Baromètre, ce rôle devrait revenir prioritairement aux parents avant l'école et les grands-parents. Et même avant les communautés religieuses ou philosophiques.

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