En Belgique, le 11 novembre 1918 ne fut pas un vrai jour de joie

Le 11 novembre 1918, est signé, dans la clairière de Rethondes, en forêt de Compiègne, l’Armistice de la Première Guerre mondiale. Une guerre interminable, qui a fait 10millions de morts et 23millions de blessés et laissé plusieurs pays exsangues, s’achève. Ce qu'en disent les blogueurs Blog: A propos de l'Armistice

J.-C.M.

Le 11 novembre 1918, est signé, dans la clairière de Rethondes, en forêt de Compiègne, l’Armistice de la Première Guerre mondiale. Une guerre interminable, qui a fait 10millions de morts et 23millions de blessés et laissé plusieurs pays exsangues, s’achève.

Comme nous le rappelait l’historienne Stéphanie Claisse, qui a beaucoup écrit sur la Première Guerre mondiale, l’Armistice a mis officiellement fin à la guerre mais n’a pas apporté la paix des esprits.

"Il faut savoir que le 11novembre 1918, tout le territoire belge est loin d’être libéré. Ce jour-là, des obus tombent sur des villages du Borinage, la tension est extrême à Bruxelles, Liège vit dans la peur. La Belgique ne sera officiellement libérée que le 28novembre. Ce jour-là, cinquante coups de canon sont tirés du parc du Cinquantenaire pour marquer l’événement".

Mme Claisse rappelle aussi que les civils belges ont été particulièrement brutalisés par les violences de la Grande Guerre. Lors de l’invasion allemande, en août1914, des milliers d’entre eux ont été massacrés à Andenne, Dinant, Louvain, Rossignol, Tamines.

Ces exactions ont endeuillé de nombreuses familles et choqué la population. La Belgique est, par ailleurs, ajoute-t-elle, le seul pays sur le front occidental à avoir connu une occupation quasi totale de son territoire tout le conflit durant. D’où un sentiment "anti-Boche" très fort au sein d’une population qui va également se retourner contre ceux qui ont eu partie liée avec l’occupant.

"Dans cet état d’esprit", écrivait-elle il y a quelques années dans 'La Libre’, "Armistice rime aussi avec Justice; une justice institutionnalisée mais également une justice "de rue", spontanée, où la haine s’exprime sans retenue."

C’est ainsi qu’en novembre1918, des violences sont commises par la population belge. Quelques femmes sont tondues puis coiffées du casque à pointe allemand et promenées sur les places publiques, des vitrines de magasins sont brisées, des maisons saccagées ou incendiées.

"Organe de vengeance légitime des victimes des exactions commises par l’occupant, la Justice devient aussi un exutoire d’un désir de vengeance dû aux frustrations engendrées par l’occupation allemande", aj oute Mme Claisse. La haine s’avérera tenace. Bref, "si en Belgique, l’Armistice met officiellement fin à la guerre, elle n’apporte pas la paix des esprits."

Quatre août quatorze

Mme Claisse précise encore que le Parlement belge choisit d’abord la date du 4août 1914, celle de l’invasion d’une Belgique qui entra aussitôt en résistance, comme jour officiel de commémoration et ne s’aligna sur les autres pays, qui, eux, avaient retenu le 11novembre, qu’en 1922. Sur le plan patriotique, entre les deux guerres, les commémorations se font dans la ferveur autour des monuments aux morts érigés dans presque toutes les communes à la mémoire de ceux qui avaient donné leur vie pour le pays et auxquels leurs proches rendaient parfois plusieurs fois par an des hommages appuyés.

"La tradition des célébrations s’est un peu perdue mais pas partout. Cela dépend des lieux et surtout des événements qui ont pu s’y passer. À Rossignol, par exemple, où des massacres ont eu lieu en août1914, la mémoire est toujours vivante et très entretenue", observe Stéphanie Claisse.

Laquelle convient qu’avec le temps, les jeunes générations savent de moins en moins bien ce que signifie réellement le 11novembre.

"Mais dans de nombreuses familles, on en parle encore et les professeurs du secondaire continuent à enseigner l’histoire de la Première Guerre et ses conséquences sur la Deuxième. Elles ne sont pas minces, en effet."

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