Le "faux Roi": 60 ans déjà...

Louvain, le 12 novembre 1951. Alain Beltjens et Pierre Masson, deux copains qui étudient à l’UCL, dînent ensemble au "Breughel", lorsque leur regard se fixe sur "un jeune homme distingué, un tantinet timide, aux manières quelque peu guindées". Mais bon sang, mais c’est bien sûr : c’est le roi Baudouin... ou si ce n’est pas lui, il lui ressemble étonnamment.

Christian Laporte
Le "faux Roi": 60 ans déjà...
©Presse Univers

Louvain, le 12 novembre 1951. Alain Beltjens et Pierre Masson, le fils d’Arthur - l’auteur des "Toine Culot - deux copains qui étudient à l’UCL, dînent ensemble au "Breughel", un resto démocratique de Louvain (15 FB pour un "steak à cheval, œuf sur le plat sur une balleke de pain de veau") lorsque leur regard se fixe sur "un jeune homme distingué, un tantinet timide, aux manières quelque peu guindées, les yeux myopes clignant sous d’épaisses lu nettes d’écaille". Mais bon sang, mais c’est bien sûr : c’est le roi Baudouin... ou si ce n’est pas lui, il lui ressemble étonnamment.

Ce fut le début d’une des plus fameuses, voire de la plus extraordinaire, des blagues estudiantines belges ! Neuf jours plus tard, avec sa petite cour dont certains devinrent plus tard d’éminents acteurs médiatiques - le marquis de Beauffort, alias Guy Spitaels, et le baron Jacques Franck qui, après avoir été directeur de la rédaction de "La Libre", fut effectivement fait baron par le roi Albert II en juillet 2003... - Hugo Engels, un étudiant en médecine anversois, parvint à entrer dans l’enceinte de l’Institut des sœurs annonciades du Sacré-Cœur d’Heverlee et à presque réussir jusqu’au bout une visite privée du jeune roi Baudouin.

La direction de l’école, bien connue des étudiants de l’UCL comme l’Institut des... mille vierges - en fait, 1100 internes et 500 externes - n’y avait vu que du feu, sauf que l’aumônier avait trouvé l’entourage du Roi bien jeune et avait fini par appeler la police. La blague tourna court avec l’arrivée des policiers qui retinrent les étudiants pendant deux heures mais, par bonheur, Bernard Magos et Stany Meeus "les cinéastes de la Cour" - qui avaient tout fixé sur pellicule fixe et mobile - ne furent pas interceptés, ce qui permet de bénéficier, 60 ans après, d’images exceptionnelles.

Il existait certes déjà des versions papier de l’aventure mais pas encore de récit aussi détaillé que celui qu’Alain Beltjens - qui fit carrière comme avocat au barreau de Bruxelles et qui signa de nombreux ouvrages sur les origines de l’Ordre de Malte - a réalisé pour le bulletin familial des Schaetzen et que "La Libre" reproduit en exclusivité sur son site Web. A peine romancé, il fourmille de détails sur la blague. Ainsi, les étudiants de l’entourage royal avaient tous été anoblis et dotés de noms mi-sérieux, mi-comiques - ah ! le comte Juan de Médeult... - mais Beltjens et Masson avaient tout prévu : il y avait parmi eux un délégué de l’Education nationale et trois inspecteurs de la PJ mais aussi un aumônier et un commissaire de district de la troupe de scouts royale et pas moins de trois chauffeurs pour piloter tout ce petit monde qui s’était mis sur son 31. Dans son récit, Alain Beltjens explique l’énervement du directeur de l’Institut mais aussi l’incroyable accueil des "mille vierges" qui chanteront la Brabançonne dans les deux langues nationales. Il est vrai que le faux Baudouin leur accordait quatre jours de congé !

Autre temps fort : le dénouement de la blague où, stoïque, le faux Roi refusa de mettre les mains en l’air et le dos face au mur. A tel point que le policier, prenant peur, lui demanda s’il était oui ou non le Roi... La fausse Cour de Belgique hérita d’un blâme alors que Mgr Van Waeyenbergh songeait sérieusement à les punir mais ils s’en tirèrent bien mieux que la brave Mère supérieure qui avait été déplacée par les annonciades alors qu’elle n’était pour rien dans le gag.


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