Centre de guidance en perdition
"L’affaire Martin a secoué l’opinion publique et le monde politique belge remet en débat les conditions et les suivis de la libération conditionnelle en particulier pour les délits sexuels. C’est à ce moment même qu’on prive de ses moyens de subsistance un service spécialisé en la matière", déplore le Centre d’appui bruxellois.
Publié le 22-09-2012 à 04h15 - Mis à jour le 22-09-2012 à 08h23
:focal(115x89:125x79)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/JYV7HJ32QJCAZK2YFGEM3LE6SA.jpg)
Aplusieurs reprises depuis le printemps, les dirigeants du Centre d’appui bruxellois (CAB), organisme chargé de l’évaluation médico-psychologique des auteurs d’infractions à caractère sexuel, ont écrit à la ministre de la Justice Annemie Turtelboom (Open VLD) pour lui faire part de leur inquiétude. Ils attendent toujours que celle-ci leur réponde.
Le budget 2012 du CAB a été réduit de 7,2 %, à la suite à des restrictions budgétaires et des économies linéaires décidées par Mme Turtelboom, dans le cadre de la politique de rigueur imposée par le gouvernement.
Pour Francis Martens (UCL) psychologue de renommée internationale mais aussi vice-président du CAB, la situation n’est plus tenable. "Ces mesures d’économie répondent à une logique arithmétique aveugle qui remplace la réflexion politique" , estime-t-il.
Le Centre disposait depuis 2009 d’un budget global de 180 000 euros budget, disent M. Martens et ses "collègues", qui aurait dû être indexé pour couvrir les frais du personnel actuel (2,5 équivalents temps pleins).
"Il faut savoir que les subsides alloués par le SPF Justice nous arrivent souvent avec un retard de sept, huit mois, ce qui nous a obligés à ouvrir des lignes de crédit auprès des banques, démarche qui coûte cher. Mais, enfin, nous tenions le coup" , explique M. Martens.
Cela dit, le SPF Finances et l’ONSS ont récemment menacé le CAB d’une liquidation judiciaire de l’ASBL.
"Si ce budget est amputé de 13 000 euros, le CAB se retrouvera dans l’impossibilité de fonctionner. Il n’aura plus les moyens suffisants pour payer les salaires, ni la totalité de ses frais de fonctionnement pourtant déjà limités", scande M. Martens.
Selon lui, sans réaction positive de la part de la ministre, le Centre fermera ses portes fin novembre.
"Notre gestion est prudente mais il faut savoir que le nombre de dossiers dont nous assurons le suivi a doublé ces cinq dernières années (NdlR : passant de 168 dossiers traités en 2007 à 308 en 2011) alors que le budget bougeait à peine et que le cadre de personnel demeurait identique. Le CAB est donc endetté de façon structurelle. Une diminution de ses subsides entraînera sa disparition" , ajoute M. Martens.
Qui s’étonne. "L’affaire Martin a secoué l’opinion publique et le monde politique belge remet en débat les conditions et les suivis de la libération conditionnelle en particulier pour les délits sexuels. C’est à ce moment même qu’on prive de ses moyens de subsistance un service spécialisé en la matière." Cherchez l’erreur en quelque sorte.
"Notre organisme a été créé par la loi du 12 mars 2000, dans la foulée de tragédies comme les affaires Dutroux ou Derochette. Notre rôle est d’aider à limiter la récidive en matière d’abus sexuels et de contrôler le respect des conditions de suivi thérapeutique. Notre travail est reconnu par tous les acteurs de la Santé et de la Justice et nous sommes régulièrement sollicités par les médias ou les autorités publiques pour des avis concernant la problématique de la délinquance sexuelle. Vouée à la prévention de la récidive, notre action contribue autant à une meilleure protection des victimes qu’à une diminution de la surpopulation carcérale. Nous servons vraiment à quelque chose" , estime M. Martens.
Qui ne comprend pas comment ni pourquoi Mme Turtelboom demeure sourde à toutes les démarches de l’ASBL. "Pas de réponse à nos lettres, sinon un vague accusé de réception, pas de réponse à nos différentes demandes d’audience, pas de réaction. Ce n’est pas normal. On dirait que Mme Turtelboom, au lieu d’annoncer franchement la couleur, a entrepris de nous asphyxier."