Traitements inhumains et dégradants dans nos prisons
Un comité européen pointe à nouveau du doigt les prisons de Forest et d'Andenne quant à la surpopulation carcérale et la problématique des grèves des gardiens.
Publié le 13-12-2012 à 13h21
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Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) pointe une nouvelle fois du doigt dans son nouveau rapport concernant les prisons de Forest et d'Andenne la surpopulation carcérale et la problématique des grèves des gardiens de prison.
Une délégation du CPT avait effectué une visite en Belgique, la sixième, du 23 avril au 27 avril 2012. Elle s'est rendue pour la première fois à la maison d'arrêt de Forest et a brièvement visité la prison d'Andenne.
De manière globale, le CPT se dit très préoccupé de constater que des recommandations formulées depuis longue date n'ont toujours pas été mises en oeuvre, en particulier en ce qui concerne la mise en place d'un d'un service garanti pendant les grèves ainsi qu'en matière de lutte efficace contre la surpopulation carcérale.
D'une capacité officielle de 405 places, la prison de Forest hébergeait 706 détenus lors de la visite du CPT. D'une capacité de 395 places, l'établissement d'Andenne comptait 425 détenus lors de la visite.
La Comité reste convaincu que la mise à disposition de places d'emprisonnement supplémentaires ne constitue pas la seule réponse au problème de surpopulation."Il y a tout lieu de craindre que les dispositions prises ou annoncées par les autorités belges ne seront pas suffisantes", ajoute-t-il.
De l'avis du CPT, les conditions de détention à Forest, notamment dans deux ailes, peuvent être considérées comme s'apparentant à un traitement inhumain et dégradant pour les détenus qui y sont soumis. A Andenne, les conditions matérielles étaient tout à fait satisfaisantes.
Pour les deux prisons, le CPT fait état d'allégations de détenus relatives à l'usage de propos désobligeants et d'injures voire de propos racistes de la part de membres du personnel. Il rappelle que ces comportements sont condamnables. Il revient également sur quelques cas particuliers, "dénotant un esprit de vengeance".
Tant à Forest qu'à Andenne, le CPT est frappé par le nombre restreint de membres du personnel de surveillance en contact direct avec les détenus. "La prison (d'Andenne) n'est sûre ni pour les détenus ni pour le personnel", résume le Comité, faisant écho aux avis du personnel.
Au sujet des grèves, le CPT constate une nouvelle fois que sa recommandation d'instaurer un service garanti n'a pas été suivi. "Et les forces de l'ordre ne sont pas formées à la maîtrise et à la gestion d'établissements pénitentiaires", souligne-t-il.
Le Comité P dénonce les interventions policières dans les prisons lors de grèves
Le Comité P, qui contrôle les services de police, estime que les agents ne doivent intervenir dans les prisons que si des troubles menacent, ressort-il du dernier rapport annuel du Comité P. C'est ce qu'écrit jeudi De Standaard. "Nous pensons que la police ne doit intervenir lors d'une grève dans les prisons que s'il est question de troubles ou que si on en prévoit et que le personnel de la prison ne peut pas y faire face", précise le Comité P. Actuellement, des policiers locaux ou fédéraux prennent la relève des gardiens de prison quand ceux-ci partent en grève.
"Une grève, ce n'est pas la même chose que des émeutes", poursuit le Comité P. "Si ce n'est pas nécessaire au maintien de l'ordre, les polices locale et fédérale ne devraient plus intervenir dans les prisons. La problématique devrait être abordée via une circulaire ministérielle."
La ministre de l'Intérieur, Joëlle Milquet, abonde dans le sens de la vision du Comité P.
Les syndicats de police pour un service minimum en cas de grève
"Nous sommes satisfaits que le Comité P partage notre position", se réjouit Vincent Gilles, président national du Syndicat libre de la Fonction publique (SLFP)-Police. "La police est envoyée de manière excessive en milieu carcéral lors de grèves du personnel."
Les syndicats plaident dès lors pour l'introduction d'un service minimum dans les prisons, afin d'assurer la sécurité des prisonniers notamment. "Le conseil européen de vigilance est également arrivé à cette conclusion", ajoute Vincent Gilles. "Ce service minimum existe déjà au sein de la police et nous n'hésitons pourtant pas à déposer des préavis de grève pour nous faire entendre. Les autorités politiques doivent désormais prendre leurs responsabilités."
Le Syndicat National du Personnel de police et de Sécurité (SNPS) souhaite également combler "le fossé" entre les syndicats et le ministère de la Justice, en désaccord sur les tâches exercées par la police en cas de grève. "Il existe un protocole d'accord entre les agents pénitentiaires et les autorités compétentes, dont la police, prévoyant la marche à suivre en cas de préavis de grève", explique Gert Cockx, président national du SNPS. "Mais cela n'empêche pas les grèves sauvages. Le service minimum est donc une nécessité."