Mouchka Stassart: "Je vous le dis, j’aime la vie "

C’était l’été dernier en bord de Meuse à Godinne dans la maison de feu André Wynen : Mouchka Stassart était aux anges qu’on ait trouvé un titre original - celui du présent papier - au récit de sa vie qu’a soigneusement consigné la secrétaire du Groupe Mémoire, Claire Pahaut.

Christian Laporte
Mouchka Stassart: "Je vous le dis, j’aime la vie "
©D.R.

C’était l’été dernier en bord de Meuse à Godinne dans la maison de feu André Wynen : Mouchka Stassart était aux anges qu’on ait trouvé un titre original - celui du présent papier - au récit de sa vie qu’a soigneusement consigné la secrétaire du Groupe Mémoire, Claire Pahaut. L’ouvrage (1) sortira pour ses 90 ans, le 17 février, mais son héroïne n’y transmettra plus sa joie si communicative. Elle qui avec la fougue voire l’inconscience de la jeunesse avait résisté aux nazis avant de gagner le difficile combat pour l’égalité entre hommes et femmes à la Sabena, s’en est allée sur la pointe des pieds vendredi.

Amanda (Mouchka) Stassart habitait à Paris avec ses parents à la veille de la Seconde Guerre. Fraîchement inscrite à la Sorbonne, elle rejoignit, sous le pseudo de Diane, un réseau d’évasion dont elle ne découvrit le nom et l’histoire qu’après la guerre. C’était la fameuse ligne Comète ! Le 15 février 44, arrêtée par la Gestapo le même jour que sa mère, elle fut incarcérée à Fresnes et à Romainville avant d’être déportée à Ravensbrück et à Mauthausen.

Elle y vécut l’enfer, soumise à des expériences qui firent qu’elle ne connut jamais les joies de la maternité. Libérée le 22 avril 1945 par la Croix-Rouge suisse, elle se retrouva seule à Paris. Sa mère était décédée à Ravensbrück dans des circonstances dramatiques - elle avait dû la conduire elle-même au four crématoire alors que son père était porté disparu. Ce n’est que 60 ans après qu’elle apprit son arrestation, sa déportation et son décès à Ellrich, camp commando de Dora-Mittelbau. Mais Mouchka Stassart ne se résigna pas devant le destin. N’ayant pu retrouver la Sorbonne, elle travailla à la Sûreté de l’Etat à Paris, mais fut refusée à Air France, n’étant pas française ! Qu’à cela ne tienne, elle postula à la Sabena pour y mener une longue carrière. Très déterminée, elle y fut cheffe-hôtesse principale pendant 23 ans, mais marqua aussi la vie de la société par son combat - réussi - pour l’égalité des chances.

Première présidente des hôtesses de l’air belges, Mouchka Stassart accompagna le roi Baudouin lors de son premier voyage au Congo en 1955 avant de participer à bien des visites d’Etat et d’être sollicitée par la princesse Paola pour travailler avec elle. Pensionnée malgré elle à 45 ans, elle fonda avec Georges Gutelman la TEA, une nouvelle compagnie qu’elle codirigea jusqu’en septembre 91. Entre-temps en 1984, elle mit toute son énergie dans le rapatriement des réfugiés juifs éthiopiens, les Falachas (Opération Moïse). Toujours à l’écoute des hôtesses en difficulté, elle répondit aussi présent lorsqu’il fallait relancer le devoir de mémoire. Son esprit jeune, sa grande foi en la liberté et la démocratie l’amenèrent à accompagner les jeunes dans les camps de concentration et d’extermination où elle leur relevait souvent le moral. Une grande dame s’en est allée...

(1) Rens. : 0497/570.750. Les funérailles auront lieu ce 11 janvier à 11h30 en l’église St-Lambert à Woluwe et à 13h30 au crematorium d’Uccle.

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