La Belgique encore épinglée par la Cour européenne des droits de l’homme
La détention psychiatrique, un type d'emprisonnement méconnu mais qui pose problème en Belgique, comme le déclare la Cour européenne des droits de l’homme.
Publié le 11-01-2013 à 07h15 - Mis à jour le 11-01-2013 à 07h16
Ce sont un peu les oubliettes de nos prisons : elles ont pour nom "annexes psychiatriques". Des délinquants déclarés pénalement irresponsables y aboutissent bien souvent après une décision de la Commission de défense sociale, dans l’attente d’une place libre dans une institution psychiatrique ou tout simplement qu’une telle institution les accepte.
Pour beaucoup d’entre eux, cela signifie une incarcération à vie sans aucun traitement. Est-ce acceptable dans une société telle que la nôtre ? Non, a répondu hier la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui a condamné la Belgique après avoir été saisie de trois cas distincts.
Les requérants étaient trois hommes âgés respectivement de 60, 42 ans et 64 ans. Le premier est actuellement interné à l’annexe psychiatrique de la prison de Louvain. Les deux autres sont internés à l’annexe psychiatrique à la prison de Merksplas. Ils y ont été internés sur décision de justice suite à des faits respectifs d’agressions sexuelles répétées, de tentative de meurtre et de viols sur deux sœurs alors qu’elles étaient mineures. Des faits extrêmement graves donc. Et répétés.
Pour leurs recours à Strasbourg, ils invoquaient plusieurs violations de la Convention européenne des droits de l’homme. Invoquant l’article 3 (interdiction des traitements inhumains et dégradants), l’un d’eux se plaignait de sa détention pendant plus de 15 ans dans l’annexe psychiatrique de prison où il disait ne pas bénéficier des soins et de l’encadrement à son état et ne pas avoir de perspective réaliste de reclassement. Sous l’angle de l’article 5.1 (droit à la liberté et à la sûreté), les trois hommes se plaignaient de leur privation de liberté. Sous l’angle de l’article 5.4 (droit de statuer à bref délai sur la légalité de sa détention), l’un alléguait que ses recours devant les instances de défense sociale avaient été inéquitables et inefficaces.
La Cour européenne des droits de l’homme leur a donné raison. Elle a condamné l’Etat belge à leur verser respectivement 5 000 euros, 15 000 euros et 16 000 euros pour le préjudice moral subi.
Ce n’est pas la première fois que la Belgique est condamnée dans un tel dossier. En octobre dernier, Strasbourg avait déjà rappelé à l’ordre la Belgique. Et l’avocat de Herentals qui a obtenu gain de cause hier à Strasbourg attend des arrêts dans une quinzaine d’autres affaires introduites à Strasbourg.
Plus d’un millier d’internés séjournent dans les prisons belges. Le sénateur SP.A Bert Anciaux s’en est ému récemment. Il a déposé une proposition en vue de modifier la loi de défense sociale qui date de 1930.
Le problème ne pourra pas être réglé tant qu’il n’y aura pas davantage de places disponibles dans les institutions spécialisées. La Ligue flamande des droits de l’homme le relevait également : beaucoup d’institutions refusent les détenus internés car elles estiment - parfois à juste titre - que ces pensionnaires sont trop dangereux.