"Les policiers détestent aller en prison"
A la prison de Nivelles, comme dans les autres établissements pénitentiaires du pays où les gardiens se croisent les bras, ce sont les policiers locaux qui surveillent les détenus ce jeudi.
Publié le 07-02-2013 à 04h15 - Mis à jour le 07-02-2013 à 10h04
:focal(115x89:125x79)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/FYHR2FBWB5HSBKEGSW5KAEJSQI.jpg)
A la prison de Nivelles, comme dans les autres établissements pénitentiaires du pays où les gardiens se croisent les bras, ce sont les policiers locaux qui surveillent les détenus ce jeudi. "Les policiers détestent cette mission !", affirme le commissaire divisionnaire Pascal Neyman. Le chef de corps de la zone de police Nivelles-Genappe comprend ses hommes. "Ils ne sont vraiment pas les mieux placés pour faire ce travail : en prison, ils retombent sur des gens qu’ils ont arrêtés à l’extérieur. Il y a toujours un certain stress. Mais comme il faut bien y aller, ils y vont "
Si, à Nivelles, on n’a jamais enregistré d’incident pendant les grèves de gardiens, psychologiquement, ça reste compliqué, pour les uns comme pour les autres. "On peut pallier l’absence des agents, mais la relation n’est évidemment pas la même entre un détenu et un gardien qu’entre un détenu et un policier."
D’autant que les policiers ne sont absolument pas formés pour jouer les agents pénitentiaires et s’occuper des détenus qu’ils ont eux-mêmes mis sous les verrous, ajoute le patron de la zone de police brabançonne. "Ils assurent le service comme un dimanche. Pour les détenus, il n’y a pas de préau et pas de visites. Heureusement, les grèves des gardiens ne durent en général pas trop longtemps".
Au détriment d’autres missions
N’empêche, chaque fois que des policiers locaux doivent jouer les pompiers dans les prisons, ce sont des capacités qu’on enlève aux zones, au détriment d’autres missions. Ce jeudi, entre 15 et 20 hommes quitteront le commissariat, suite à une réquisition de la direction de la prison. Soit environ un cinquième des membres du personnel. Qui ne travailleront pas en intervention ; qui ne patrouilleront pas dans les quartiers ; qui ne poursuivront pas leurs enquêtes, comme ils le font d’habitude. "Le fédéral ne met pas d’effectifs supplémentaire à notre disposition pour assurer la présence en prison en plus de nos missions ordinaires. Notre personnel n’est pas extensible !"
Il faut donc postposer des jours de récupération, rappeler des gens en congé et faire appel aux bonnes volontés. Sans compter que le budget de la police locale n’est pas plus extensible que son personnel. Ces prestations supplémentaires ont pourtant un coût, qui n’est pas remboursé par le fédéral.
Pour Pascal Neyman, le remplacement des agents pénitentiaires par des policiers est carrément "une aberration historique", héritée du temps où la gendarmerie remplissait cette mission. "Ce n’est pas à nous de faire ça." A qui alors ? "L’armée est plus habituée à des missions de maintien de l’ordre."
Le chef de corps de la zone Genappe-Nivelles dénonce une autre absurdité. Quand les gardiens de prison sont en grève, l’activité judiciaire tourne au ralenti et les transferts de détenus sont moins nombreux. Seules les audiences qui doivent se tenir "à date" (comme les chambres du conseil) et qui ne peuvent pas être reportées sont maintenues. Les membres du corps de sécurité (qui sont payés par le Service public fédéral Justice), chargés de soulager les polices locales pour encadrer les transferts de détenus - ils sont six pour la zone de Nivelles-Genappe - se tournent partiellement les pouces au palais. "Pourquoi ne pas envoyer ces assistants de sécurité dans les prisons ?"