Master plan des prisons: un programme ambitieux mais parfois chaotique
L’accueil, lundi, des premiers détenus de la prison de Leuze est une bonne occasion de faire le point sur les différents Master Plans prévoyant la construction de nouveaux établissements pénitentiaires en Belgique.
Publié le 05-08-2014 à 17h38 - Mis à jour le 05-08-2014 à 18h47
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L’accueil, lundi, des premiers détenus de la prison de Leuze (voir ci-dessous) est une bonne occasion de faire le point sur les différents Master Plans prévoyant la construction de nouveaux établissements pénitentiaires en Belgique.
Laurent Sempot, porte-parole de l’administration pénitentiaire, nous rappelle qu’il en existe trois.
Selon lui, ce programme est le plus ambitieux depuis la vague de construction de prisons, dites Ducpétiaux, du nom de leur concepteur, au XIXe siècle.
"Depuis , observe M. Sempot, on a eu droit à la construction de nouvelles prisons comme celles de Lantin ou de Jamioulx par exemple mais, cette fois, c’est de plusieurs établissements répondant aux normes de sécurité les plus modernes et à des régimes de détention différenciés qu’il est question. De plus, ces nouvelles prisons sont érigées sur la base de partenariats public-privé, le privé assurant les coûts de construction et se voyant, en échange, accorder la maintenance de l’établissement, en ce compris les services de catering et de blanchissage, pendant vingt-cinq ans."
1. Le Master Plan 1. Il prévoyait la construction de quatre nouvelles prisons et de deux centres de psychiatrie légale destinés à abriter des internés :
- la prison de Marche-en-Famenne : d’une capacité de 312 détenus, elle a été inaugurée en novembre 2013;
- la prison de Beveren : d’une capacité de 312 détenus également, elle a été ouverte en mars 2014;
- la prison de Leuze : inaugurée en mai 2014, elle a accueilli lundi ses 7 premiers détenus mais pourra en recevoir 312, elle aussi;
- la prison de Termonde : d’une capacité de 444 places, elle doit remplacer la vétuste prison existante. Elle aurait déjà dû ouvrir ses portes mais des riverains ont introduit un recours (pendant) devant le Conseil d’Etat. De l’aveu de M. Sempot, le dossier est assez complexe mais le principe de son édification est maintenu;
- le centre de psychiatrie légale de Gand : inauguré récemment, il attend ses premiers internés (ils seront 272 en tout);
- le centre de psychiatrie légale d’Anvers : sa construction est en cours et l’ouverture est prévue en 2015. Le complexe pourra prendre en charge 180 personnes.
2. Master Plan 2. Ce Master Plan prévoit la construction à terme de la prison de Haren, en banlieue bruxelloise. On en est à la phase du permis de bâtir. Ce nouveau complexe pénitentiaire sera le plus important du pays puisqu’il pourra accueillir, sur le même site, 1 190 détenus, répartis sur huit entités dont trois prisons pour hommes, une prison pour femmes et un établissement pour jeunes. Il sera appelé à remplacer les prisons moyenâgeuses de Forest, de Saint-Gilles et de Berkendael. A l’heure qu’il est, on envisage son inauguration pour 2017 si tout va bien, en 2019 si les riverains devaient mettre les bâtons dans les roues de sa réalisation.
Le projet de construction d’une prison à Sambreville a, de son côté, glissé du Master Plan 1, où il figurait initialement, au Master Plan 2, dans la mesure où l’administration pénitentiaire et l’administration communale sont en conflit s’agissant du choix du terrain. "Nous en avions identifié un , explique Laurent Sempot, mais on veut nous en imposer un autre et le dossier est bloqué car se posent notamment des problèmes de dépollution des sols."
En tout état de cause, la situation est complexe et Sambreville, qui doit remplacer les prisons de Dinant et de Namur, n’est pas près de voir le jour.
3. Le Master Plan 3. Là, on n’en est qu’au stade de l’étude de faisabilité. Il n’existe pas encore de nom ou de lieu défini mais il s’agit d’idées en cours de gestation.
D’abord inscrit au Master Plan 1, le projet de construction d’un centre pour jeunes délinquants à Achêne a pris du retard et a même changé de nature, à la suite de la défédéralisation de la matière. On parle désormais de nouvelles options et notamment d’un établissement de très haute sécurité. Quoi qu’il en soit, le terrain existe et la capacité de la future prison est connue : 120 places.
On songe aussi à étendre l’établissement de défense sociale de Paifve (pour le porter à 300 lits) et d’agrandir le centre en milieu ouvert de Saint-Hubert.
4. Le futur. Laurent Sempot explique en outre que d’autres idées sont dans les cartons. Le gouvernement Leterme avait donné son accord de principe à la construction d’une nouvelle prison à Anvers, en remplacement de l’actuelle, mais le changement de majorité à la tête de la ville a changé la donne de sorte que la Régie des bâtiments est à la recherche d’un autre terrain que celui initialement choisi.
Par ailleurs, il est également question de remplacer la prison de Merksplas et de construire des établissements pénitentiaires à Bourg-Léopold et à Ostende et un centre semi-ouvert à Wortel.
Enfin, le remplacement de la prison de Verviers par une nouvelle construction est envisagé (le terrain existe déjà) mais aucune date n’est fixée.
Reste au futur gouvernement à faire avancer ces dossiers, sur le plan budgétaire notamment et surtout. Et à convaincre de nombreux observateurs que la construction de ces nouvelles entités constitue une bonne réponse à la question lancinante de l’utilité de l’enfermement.
La prison de Leuze a ouvert ses portes dans la douleur
Lundi, les sept premiers détenus de la nouvelle prison de Leuze-en-Hainaut ont pris possession de leur cellule. Tous les lundis, sept nouveaux détenus, en provenance d’autres prisons du pays, franchiront les portes de cet établissement pénitentiaire flambant neuf.
Le complexe pénitentiaire comprend plusieurs entités et est entouré d’un mur de béton de 6 m de haut.
La sélection des prisonniers s’est d’abord faite sur base volontaire mais la direction a également choisi les détenus sur la base de critères déterminés. Les détenus arrivés lundi iront travailler à la cuisine et à la buanderie.
Des solutions in extremis
Jusqu’à la fin de la semaine passée, un doute planait sur la possibilité d’accueillir des détenus. En cause, notamment, un manque d’effectifs du côté de la police locale mais aussi de sérieux problèmes de communication sur le réseau ASTRID, le réseau des services de secours. Finalement, des solutions ont été trouvées. Le député-bourgmestre de Leuze Christian Brotcorne (CDH), qui était prêt à signer un arrêté interdisant l’arrivée des premiers détenus, a reçu la garantie que trois équivalents temps plein de la police fédérale seront détachés pour les tâches spécifiques de la prison.
Par ailleurs, un crédit de 50 000 euros annuel a été accordé à la commune pour des engagements futurs. Et quinze agents de sécurité seront aussi spécialement affectés aux transferts des détenus.
En outre, en attendant la construction d’un mât ASTRID sur le site de la prison (un chantier qui sera assuré d’ici cinq à douze mois), un système provisoire a été mis en place et testé. Une nouvelle évaluation aura lieu le 22 août.
La nouvelle prison, inaugurée le 20 mai 2014, a été construite sur la base d’un partenariat public-privé. L’Etat fédéral, propriétaire, paiera, pendant vingt-cinq ans, une indemnité de disponibilité à un consortium privé.