Reine Fabiola : l’icône médiatique d’une certaine Espagne
"Fille préférée de Madrid" , selon une déclaration du conseil municipal de la capitale espagnole, la reine Fabiola a longtemps été l’un des personnages les plus présents dans la presse espagnole. Ce n’était plus le cas. Ses dernières visites à son pays d’origine sont passées inaperçues, même pour cette presse qui lui avait consacré de nombreuses pages pendant presque 40 ans depuis ses noces en 1960.
- Publié le 07-12-2014 à 20h33
- Mis à jour le 09-12-2014 à 15h59
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Dans son pays natal, Fabiola n’était plus la personnalité très populaire qu’elle avait pourtant été.Paco Audije Correspondant à Madrid Fille préférée de Madrid", selon une déclaration du conseil municipal de la capitale espagnole, la reine Fabiola a longtemps été l’un des personnages les plus présents dans la presse espagnole. Ce n’était plus le cas. Ses dernières visites à son pays d’origine sont passées inaperçues, même pour cette presse qui lui avait consacré de nombreuses pages pendant presque 40 ans depuis ses noces en 1960.
A l’époque de Franco
L’annonce de son destin royal déclencha l’enthousiasme des médias dans cette Espagne franquiste alors isolée du reste de l’Europe. Une foule en délire accompagnait ses trajets dans les rues de Madrid. Ce qui reste de cette génération aime revenir sur l’attachement de "la Reine espagnole des Belges", selon l’expression utilisée par plusieurs médias hier encore.
L’aristocratie espagnole et la bonne société de l’époque avaient vu ce mariage comme une ouverture, puisqu’il signifiait l’établissement d’un lien avec une monarchie constitutionnelle européenne. En Espagne, il n’y avait alors pas de roi, mais un dictateur, Franco.
Si la télévision publique nationale (TVE) a diffusé un documentaire retraçant la vie de Fabiola, à aucun moment dans ce récit, où prédominaient le noir et blanc, on n’a pu voir la Reine avec le dictateur. "J’ignore si Fabiola était franquiste", nous déclare le journaliste Jaime Peñafiel, spécialiste des royautés européennes, "mais, avant qu’elle parte vers Bruxelles, je suis le témoin d’un hommage qu’elle a voulu rendre aux gris", les policiers que l’opposition craignait et citait toujours par la couleur de leurs uniformes.
Plusieurs sources suggèrent qu’en 1960, à Bruxelles, on aurait eu peur que Franco accepte l’invitation (officielle, presque inévitable) à la cérémonie de mariage à la cathédrale Saints Michel et Gudule. "Franco ne s’y est pas rendu mais il a offert un cadeau magnifique, une couronne d’argent très ancienne, avec incrustations de pierres précieuses. Ce bijou avait été acheté par doña Carmen Franco, qui a payé un prix fort. Plus tard, on aurait découvert qu’une partie des rubis et des émeraudes d’origine avaient été remplacés par des morceaux de verre", affirme Jaime Peñafiel.
Plus tard, en 1961, les photos d’une rencontre entre Baudouin, Fabiola et Franco, sur le yacht du dictateur, face à la côte basque, provoqueront la polémique.
L’Espagne d’hier
Ces derniers jours, les médias espagnols ont plutôt rappelé les origines "madrilènes et aristocratiques" de Fabiola, ainsi que ses séjours fréquents à Motril en Andalousie, où le roi Baudouin est décédé, et à Zarauz, au Pays Basque, où son père possédait une grande maison seigneuriale. Le bourgmestre de Motril a d’ailleurs ordonné que les drapeaux officiels soient mis en berne samedi, tandis qu’un livre de condoléances a été ouvert aux citoyens de cette localité très touristique.
A Zarauz, on se souvient de la sociabilité de la Reine. Dans un reportage de la chaîne publique basque (ETIB), deux anciens vendeurs de journaux, Carmen Garro (90 ans) et son frère Paco (78 ans), rappellent que Fabiola était très sympathique. On y voit les images d’une jeune femme à vélo dans les rues de Zarauz où elle allait tous les jours à l’église des Carmélites. Le vieux Paco Garro admire toujours la couverture du mariage de Baudouin et Fabiola. "Il y a eu un numéro spécial, avec un énorme tirage, de "Hola" (le titre le plus puissant de la presse rose, NdlR), puis d’autres éditions encore. Nous étions obligés de commander des réimpressions."
L’image de la reine Fabiola a toujours évolué dans son pays d’origine, "à mi-chemin entre la grande politique et la chronique sociale". Elle a peut-être régné aussi sur les cœurs d’une certaine Espagne en train de disparaître.