La langue de la procédure pénale doit pouvoir changer d'entrée de jeu
Publié le 15-05-2017 à 06h54 - Mis à jour le 15-05-2017 à 06h57
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Pourquoi perdre temps et argent dans la traduction des PV, se demande DéFi.Les députés DéFi Olivier Maingain et Véronique Caprasse viennent de déposer une proposition de loi visant à prévoir le changement de langue de la procédure pénale dès le premier interrogatoire du suspect.
Ils sont partis du constat suivant. En matière pénale, les procès-verbaux relatifs à la recherche et à la constatation des infractions sont, quelle que soit la langue de la personne interrogée, rédigés en français ou néerlandais selon la région où l’infraction a été commise. Ce sont les principes de territorialité et de droit du sol qui jouent.
Le fiasco Wesphael
Un éventuel changement de langue ne peut être demandé et obtenu qu’à un certain stade de la procédure pénale. Résultat : tous les actes et procès-verbaux établis avant l’information ou l’instruction devront ensuite être traduits. De telles traductions, estiment Mme Caprasse et M. Maingain, impliquent non seulement des coûts plus ou moins importants selon la gravité et la complexité de l’affaire mais également et surtout de potentielles erreurs de traduction, problématiques voire incompatibles avec le bon fonctionnement de la justice et les droits de la défense.
Ces erreurs ont été soulignées de façon presque caricaturale dans l’affaire Bernard Wesphael, accusé du meurtre de sa femme Véronique Pirotton, à Ostende, et acquitté par la cour d’assises du Hainaut le 6 octobre 2016.
L’accusé, qui parle français, a été entendu dès son arrestation par des enquêteurs néerlandophones, compte tenu du lieu de commission des faits présumés. Les procès-verbaux d’audition établis par les enquêteurs et le magistrat instructeur l’ont été en néerlandais, après traduction du français vers le néerlandais des déclarations de M. Wesphael.
Cette audition, qui constitue l’une des premières pièces fondamentales de la procédure, a ensuite dû être intégralement retraduite en français puisque la cour d’assises du Hainaut était compétente, compte tenu du lieu de résidence de l’accusé. Ces traductions successives des pièces du dossier ont abouti à des contradictions et à la rédaction de phrases incompréhensibles. Cela a affaibli la crédibilité du travail d’enquête et a même entraîné un report du procès.
Un changement immédiat
Pour les auteurs de la proposition de loi, il convient d’accorder à tous les justiciables, quelle que soit leur région linguistique, le droit de demander qu’il soit fait usage de leur langue tout au long de l’enquête et de la procédure pénale.
A leurs yeux, l’Etat belge doit élargir les garanties actuelles en matière d’emploi des langues au bénéfice de la personne mise en cause, inculpée ou accusée et poursuivie, en prévoyant le changement de langue de la procédure pénale dès le premier interrogatoire.
Dans une telle hypothèse, le juge d’instruction saisi ordonnera le renvoi du dossier à un juge d’instruction du ressort de la juridiction d’une autre région linguistique la plus rapprochée du domicile du prévenu et la procédure sera poursuivie dans la langue demandée par le suspect.