Un jeune Molenbeekois à François Hollande: "Les piliers de l’islam, c’est sacré" (PHOTOS + VIDEO)
C’est un homme « plus libre » qui s’est présenté lundi à Molenbeek, un homme qu’une fine pluie a accueilli, ce qui a fait dire à Geluck, arrivé à vélo d’on ne sait où, que c’est « en hommage à François Hollande ». L’ancien président français est venu en effet visiter l’exposition de caricaturistes qui s’est ouverte au Karreveld et qui se veut comme des « traits d’union » en faveur du vivre ensemble.
Publié le 20-11-2017 à 14h57 - Mis à jour le 20-11-2017 à 17h04
C’est un homme « plus libre » qui s’est présenté lundi à Molenbeek, un homme qu’une fine pluie a accueilli, ce qui a fait dire à Geluck, arrivé à vélo d’on ne sait où, que c’est « en hommage à François Hollande ». L’ancien président français est venu en effet visiter l’exposition de caricaturistes qui s’est ouverte au Karreveld et qui se veut comme des « traits d’union » en faveur du vivre ensemble.
Depuis les attentats de Paris du 13 novembre 2015, Hollande n’était jamais venu en visite officielle dans la commune bruxelloise, ni d’ailleurs Charles Michel. Les deux hommes ont été accueillis par la bourgmestre Françoise Schepmans, plusieurs membres du collège échevinal, une classe de 6e de l’école communale N°7 ainsi qu’une quinzaine de membres du Conseil consultatif des jeunes.
Après un tour des dessins, pendant une bonne demi-heure, l’ancien président, les caricaturistes Plantu, Geluck et Kroll et les jeunes ont discuté de la liberté d’expression. Tout tourne indirectement autour de Charlie Hebdo, absent de cette exposition, de sa récente Une sur Tariq Ramadan et son « sixième pilier de l’islam » et de l’outrage qu’elle a pu provoquer chez des musulmans.
L’ancien président parle plus librement, maintenant qu’il n’est plus à l’Elysée. Pour lui, la limite de la liberté d’expression, « c’est de ne pas s’attaquer à un groupe humain, à une part d’humanité » pour vouloir la détruire. Le Premier ministre belge place le curseur à un niveau plus exigeant : la limite est « l’oppression, la stigmatisation » d’une communauté.
Plantu, qui est le commissaire de l’exposition et le président de l’association Cartooning for Peace (Paris) qui l’a mise sur pied, pose directement la question aux jeunes Molenbeekois : la Une de Charlie Hebdo vous a-t-elle choqués ? « Les piliers de l’islam, c’est sacré », dit l’un. « Notre religion est pudique », ajoute une autre, pour qui l’important est de jeter des ponts entre les gens, pas de les opposer.
Manifestement, la liberté d’expression a des limites pour plusieurs jeunes car ni Geluck, en invoquant le malaise des « petits athées » qui entendent parler d’un Dieu qui décide tout, ni Plantu qui évoque les nombreuses caricatures de Jésus, ni Kroll qui évoque le rôle désobéissant des dessinateurs de presse, ne semblent les convaincre.
« La liberté d’expression est une garantie du vivre ensemble », leur dit l’ancien président français. « Si on commençait à s’attaquer aux libertés des dessinateurs, c’est la vôtre qui serait bientôt mise en cause ». Hollande et Michel ont tous les deux été caricaturés, parfois férocement, mais il faut savoir « prendre du recul », précise le Premier ministre belge.
Mais les ponts sont jetés. François Hollande propose aux jeunes Molenbeekois de venir à sa Fondation à Paris. L’an dernier, ceux-ci s’étaient rendus au Bataclan. Hollande suggère à la volée un jumelage de la commune avec « le seizième arrondissement », bastion de la droite parisienne, « ou un autre ». Rien d’officiel. Jusqu’ici, Molenbeek était jumelée avec Levallois-Perret, où siège la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Ni le maire de cette commune des Hauts-de-Seine, Patrick Balkany, ni Molenbeek ne veulent poursuivre le jumelage, depuis des propos acrimonieux échangés en 2015.
« Nous voulons changer l’image de Molenbeek », explique Chaïmal Sebbar, membre du Conseil consultatif. « Nous avons interrogé les jeunes de la commune, district par district, et ce qu’ils veulent, c’est en finir avec l’image des délinquants, des voyous, mais aussi que Molenbeek, et plus généralement Bruxelles, deviennent plus propres ». Chaïmal étudie la criminologie à la VUB. Bilingue donc ? « Quadrilingue », sourit-elle.