On ne peut plus enfermer d'enfants au 127 bis: le Conseil d’Etat suspend l’arrêté royal initié par Theo Francken
Publié le 04-04-2019 à 16h54 - Mis à jour le 19-04-2019 à 15h11
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Le Conseil d’Etat vient de suspendre partiellement l’arrêté royal qui règle les conditions d’enfermement des familles en séjour irrégulier, entré en vigueur le 11 août 2018. Il s’agissait d’une initiative du secrétaire d’Etat à l’Asile et à la migration de l’époque, Theo Francken (N-VA), qui avait été approuvée par le gouvernement Michel.
L’ouverture, dans le centre fermé 127 bis de Steenokkerzeel, d’une annexe réservée aux familles, avait fait grand bruit au coeur de l’été. Depuis 2008, la Belgique n’enfermait plus les enfants étrangers en séjour irrégulier. Cette détention était de nouveau rendue possible, pour une période d’un mois maximum, en vue d’un retour forcé vers le pays d’origine.
Trois jours après l'ouverture de la section familles du 127 bis, une maman originaire de Serbie et ses 4 enfants, âgés de 1 à 6 ans, y étaient envoyés. Plusieurs autres ont suivi. En décembre, alors que Maggie de Block (Open VLD) avait remplacé Theo Francken comme responsable de l’Asile et de la Migration, une cinquième famille y était enfermée, selon le décompte d’Amnesty International.
"Une pratique intolérable"
Très vite, le 22 août 2018, quinze associations (Ciré, Ligue des droits de l'homme, le Service droits des jeunes...), francophones et néerlandophones, appuyées par l’Ordre des barreaux francophone et germanophone, ont introduit un recours, devant le Conseil d’Etat pour demander la suspension et l’annulation de cet arrêté royal.
En permettant d’enfermer des enfants pour des raisons administratives, la Belgique renoue avec “une pratique intolérable” qui revient dix ans en arrière et fait fi des condamnations de la Cour européenne des droits de l’Homme, dénonçaient-elles.
Juridiquement, l’enfermement des enfants est contraire au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant inscrit dans la Constitution belge et dans la Convention internationale des droits de l’enfant. Le secteur associatif demandait au Conseil d’Etat de mettre fin à cette situation insupportable. “Une balançoire, un toboggan et des casques anti-bruit (le centre 127bis est au bord des pistes de l’aéroport de Bruxelles national, Ndlr) n’y changeront rien. On n’enferme pas un enfant. Point”, scandait-il.
L'arrêt est tombé ce jeudi
Le Conseil d’Etat vient de leur donner partiellement raison. Par un arrêt n° 244.190 du 4 avril 2019, il suspend l’exécution de certaines dispositions de l’arrêté royal qui détermine les règles de fonctionnement des maisons familiales "notamment parce qu'il n'exclut pas la possibilité d’une détention d’enfants en bas âge en des lieux où ils sont susceptibles d’être exposés à des nuisances aéroportuaires sonores très importantes, alors que la durée de cette détention peut aller jusqu’à un mois".
"On l'espérait mais c'est inattendu. On s'en réjouit évidemment!", réagit Sotieta Ngo, directrice du Ciré. "Au-delà du principe de l'enfermement, des enfants auquel on est opposé, on mettait en question les conditions de leur détention.". Concrètement, cela veut dire qu'on ne peut plus utiliser les unités familiales du 127 bis, poursuit-elle. "C'est une vraie victoire. La détention des enfants ne peut plus avoir lieu, sauf si on déplace les pistes de l'aéroport. ".