Le contrôle de la recherche d'emploi peut avoir des effets néfastes sur les chômeurs (INFOGRAPHIE)
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- Publié le 24-04-2019 à 06h52
- Mis à jour le 24-04-2019 à 06h53
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Une étude révèle un jeu de vases communicants entre les différents régimes de la Sécu.Ces dernières années, le nombre de chômeurs a fortement diminué en Belgique. Dans le même temps, la population de personnes en incapacité de travail ou en invalidité (incapacité de plus d’un an) a nettement augmenté (voir infographie). En 2016, le taux d’invalidité dans notre pays était de 8,9 %. Un record pour un phénomène dont on connaît encore mal les causes.
C’est pour cette raison que le département d’économie appliquée de l’ULB (Dulbea), avec le soutien du service des indemnités de l’Inami, a cherché à mieux comprendre les effets de réformes dans certaines branches de la sécurité sociale sur les transferts des bénéficiaires vers l’incapacité de travail et l’invalidité. Plus particulièrement, Octave De Brouwer, Elisabeth Leduc et Ilan Tojerow ont voulu voir quel était l’impact du contrôle de la disponibilité des chômeurs. Ils présentent le fruit de leur travail ce mercredi à l’Inami.
Chômeurs de longue durée
Précisément, les chercheurs se sont penchés sur l’effet de la mise en place d’un programme de contrôle du comportement de recherche d’emploi, entré en vigueur dans les années 2000 pour les chômeurs de longue durée. Entre 2006 et 2013, seuls les chômeurs de moins de 50 ans étaient soumis à ce contrôle. Le Dulbea a dès lors comparé le taux d’entrée en incapacité de travail pour deux populations : l’une âgée de 46 à 49 ans, soumise au contrôle, et l’autre de 50 à 53 ans, dispensée de contrôle.
Les chercheurs ont remarqué que le programme de contrôle augmente le taux d’entrée en incapacité de travail de 115 %. Cela signifie que le contrôle du comportement de recherche aboutit à multiplier par deux le nombre de personnes qui passent chaque trimestre du régime de chômage vers le régime d’invalidité.

Les scientifiques ont ensuite vérifié si l’impact variait selon le genre. Et ils ont constaté que le contrôle n’a pas d’impact significatif lorsque le chômeur est un homme contrairement à ce que l’on observe lorsque le chômeur est une femme (+ 191 %, soit près de trois fois plus de femmes qui passent en invalidité à la suite d’un contrôle). En analysant plus en profondeur les caractéristiques des chômeuses, ils ont remarqué que l’impact était encore plus fort (+243 %) sur les chômeuses isolées. Des personnes en situation précaire, qui doivent assumer seules les revenus et la garde de leurs enfants. Les personnes à la santé fragile ou qui vivent dans une région avec un plus grand taux de chômage sont également plus enclines à entrer en invalidité.
Mieux mesurer les effets néfastes
Ces premiers résultats, d’une recherche toujours en cours, indiquent que le contrôle de la recherche d’emploi peut avoir des effets néfastes sur les chômeurs en entraînant la sortie d’une partie d’entre eux du marché du travail et provoquant un basculement des dépenses publiques de l’assurance-chômage vers l’assurance maladie-invalidité. "Cela pose la question des régimes de sécurité sociale en silos séparés, appuie François Perl, directeur général du service des indemnités de l’Inami. On doit mieux mesurer l’impact d’une mesure sur les autres régimes. Si une mesure diminue les bénéficiaires dans un régime mais l’augmente dans un autre, c’est contre-productif sur le plan budgétaire."
Par ailleurs, insiste Ilan Tojerow, cela indique qu’il faudrait prendre en compte la situation familiale des individus dans la confection des mesures de contrôle des chômeurs.