Faut-il limiter le nombre d’étudiants en psychologie et logopédie?
Le dernier rapport concernant la qualité de ces études évoque des cohortes de plus en plus nombreuses et ouvre la voie à la réflexion.
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Publié le 20-12-2022 à 14h45 - Mis à jour le 20-12-2022 à 17h24
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Plusieurs filières d’enseignement supérieur souffrent aujourd’hui, en Fédération Wallonie-Bruxelles, d’une forte augmentation du nombre d’étudiants, sans adaptation de leurs moyens financiers, humains et matériels.
Les cursus de psychologie, logopédie et éducateurs spécialisés sont concernés, expose le dernier rapport en date de l’Aeqes (Agence d’évaluation de la qualité de l’enseignement supérieur). Il porte sur dix filières menant à ces secteurs, organisées dans trois formes d’enseignement : à l’université, en hautes écoles et dans les établissements d’éducateurs spécialisés. Plus de 21 500 étudiants étaient concernés à la rentrée 2019-2020. C’est 20 % de plus qu’en 2013-2014, lors de la précédente évaluation de l’Aeqes.
Plus de la moitié des étudiants sont à l’université (51 %, pour 33 % en hautes écoles et 16 % dans les établissements d’éducateurs spécialisés). Le bachelier en éducateur spécialisé en accompagnement psychoaffectif en occupe 33 %, et le bachelier en sciences psychologiques et de l’éducation (orientation générale), 24 %. “Les universités sont le moteur de cette prise de poids, résume l’Aeqes, avec un gain de 70 % en six ans, alors que la fréquentation des hautes écoles et des établissements d’éducateurs spécialisés a tendance à se tasser.”
Une hausse du nombre d’étudiants constitue, certes, un signe de vitalité, mais pas seulement. Plusieurs contraintes demandent à être prises en compte, sous peine de pénaliser la qualité de la formation.
Un afflux de Français
Avant tout, un fait. Souvent, la massification constatée est causée par le contournement, par des étudiants étrangers, des règles plus sévères de limitation des effectifs appliquées dans leur pays. C’est le cas des étudiants français, en particulier. Et les bacheliers de psycho et logopédie sont particulièrement visés. Avec plusieurs conséquences.
Comme le financement par étudiant n’augmente pas ni, dès lors, les ressources humaines et matérielles, la qualité de la formation peine à être maintenue (et, avec elle, la maîtrise des compétences concernées et la reconnaissance des programmes). “L’accompagnement souvent individualisé des stages nécessite d’être repensé, dans la mesure où le nombre de périodes horaires qui y sont dédiées n’est plus suffisant”, conclut l’Aeqes à titre d’exemple.
Se pose donc la question du mode d’admission. Faut-il imposer un ou des examens d’entrée et un ou des numerus clausus ? Concernant l’afflux de non-résidents attirés par le libre accès aux études, on peut rappeler que leur proportion est déjà réduite à 30 % par décret dans une série de filières (les bacheliers en logopédie, justement, mais aussi en kiné, audiologie, médecine vétérinaire et sciences psychologiques). Même chose en médecine et dentisterie où le quota a même été rabaissé à 15 % pour les six premières années du nouveau concours d’entrée prévu en août prochain.
“Quelques années après leur diplôme, 62 % des étudiants français diplômés de master de spécialisation ne sont plus actifs comme médecins en Belgique”, précise le rapport qui avait été envoyé à la Commission européenne en décembre 2021, dans le cadre de la procédure en infraction lancée à ce propos contre la Belgique. Est-il bien adroit d’attirer l’attention des autorités avec un nouveau durcissement de la règle, se demandent certains.
Un test de compétences à l’entrée
Derrière la maîtrise du flux, étudiants non-résidents compris, se cache aussi celle des compétences minimales requises à l’entrée des études. “Psycho, logo et éducateurs spécialisés nécessitent peu de prérequis, mais une série de compétences transversales, telles que la maîtrise de la langue et l’utilisation d’une méthode de travail appropriée”, lit-on. L’Agence recommande “un test propédeutique à l’entrée des études” qui permettrait à chaque étudiant de savoir où il en est, à chaque enseignant de se rendre compte du niveau de ses étudiants, et la prise en charge de ceux qui en auraient besoin.
Les potentialités d’insertion professionnelle
Troisième paramètre concernant la gestion des flux : les besoins du terrain. “La potentielle limitation du nombre d’étudiants est à penser en lien avec le nombre de diplômés sortants et les potentialités d’insertion professionnelle”, estime enfin l’Aeqes. Dans la foulée, elle réclame la mise au point d’outils capables de mesurer à la fois l’insertion professionnelle et les besoins de la société. Non sans rappeler les prémisses du dossier Inami en médecine et dentisterie, qui a empoisonné pendant des années des cohortes de futurs soignants…