"Certains partis sont assis sur des montagnes de trésorerie": les verts s’opposent au PS et au MR sur la réforme du financement des partis
Kristof Calvo (Groen) et Gilles Vanden Burre (Ecolo) mettent la pression pour obtenir une réforme d’un système de dotation aux partis politiques particulièrement généreux en Belgique. Ils pointent du doigt les réticences du PS et du MR. “Le système actuel est en fait assez juste”, rétorque Georges-Louis Bouchez.
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- Publié le 30-01-2023 à 06h32
- Mis à jour le 30-01-2023 à 09h58
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Les partis politiques se financent en grande partie avec de l’argent public. Mais ce système de dotation, souvent contesté, est imparfait. La Vivaldi, dans son accord de gouvernement, s’est d’ailleurs engagée à poursuivre “la réforme du système de financement des partis.”
Cette réforme est au point mort. Kristof Calvo, député Groen, a manifesté son agacement mercredi sur la VRT, incriminant “le PS” pour qui “le financement des partis est l’affaire des présidents” et Georges-Louis Bouchez (président du MR) comme étant “le premier à dire que les impôts sont trop hauts”, mais se plaçant pourtant lui-même comme “un gros obstacle à la diminution du financement des partis.”
Ce coup de gueule s’explique par la volonté de l’ancien chef de groupe Groen de voir se réaliser une partie, au moins, du chapitre de l’accord de gouvernement consacré au renouveau démocratique qu’il a lui-même négocié.
Calvo veut “une économie importante”
“L’idée derrière cette réforme du financement des partis, c’est une promesse de faire de la politique autrement. Il est important qu’on réalise cette ambition pour regagner la confiance du citoyen, prolonge Kristof Calvo, contacté par La Libre. “Je vois, dans ces dernières déclarations, que Bouchez a défendu le système actuel. Mais globalement, ce débat se joue moins du côté francophone, donc j’invite les partis francophones à davantage s’y investir. J’espère que mercredi on pourra passer à une prochaine étape. Il ne reste pas beaucoup de temps”.
Côté socialiste, on fait remarquer que le dernier conclave budgétaire a abouti fin 2022 à ce qu’on rabote les dotations des partis de 5,3 %.
”Je veux une réforme structurelle, qui doit comporter une économie plus importante. Les dotations données aux partis sont très importantes en Belgique, par rapport à d’autres pays. Pourquoi, au fond, finance-t-on un parti ? Pour amener des idées, pas pour mener une campagne électorale permanente”, estime Kristof Calvo. Nous avons déjà déposé des propositions de lois, par exemple pour instaurer le même plafond que celui qui existe aujourd’hui lors des campagnes électorales, mais hors campagne”, souligne Kristof Calvo.
La campagne permanente, un effet pervers
En effet, en période de campagne, les dépenses autorisées aux partis sont limitées. Par contre, aucun plafond n’existe en dehors de cette période ce qui entraîne un effet pervers : une campagne électorale qui se révèle permanente.
La proposition de Groen ne sera toutefois pas discutée en l’état. Il y a un an, la commission a décidé de ne pas travailler sur un texte spécifique mais de globaliser. Un rapport, qui compare la situation de la Belgique avec d’autres pays, a été demandé à des experts de la Chambre. Il en ressort que la Belgique se montre très généreuse.
Chaque année, les partis politiques belges perçoivent ainsi plus de 75 millions de dotations.
En France, la participation financière de l’État pour le financement des partis et le remboursement des dépenses électorales était fixée, pour 2022, à 66,15 millions d’euros. C’est moins qu’en Belgique, pour une population 6 fois supérieure.
Et en Allemagne, le montant total du financement public prévu pour l’ensemble des partis s’élève à 200 millions d’euros. En proportion, les partis belges perçoivent trois fois plus d’argent que les Allemands.
”On est tout conscient des excès du système actuel. Certains partis sont assis sur des montagnes de trésorerie, et c’est un peu malsain. Je ne veux pas revenir en arrière, avec le privé qui financerait le politique. Mais doit-on pouvoir faire faire de la promotion immobilière comme la N-VA ou dépenser 2 millions d’euros par an sur Facebook ? À notre avis non, mais c’est pourtant légal. On veut réguler et instaurer un plafond de dotation”, pointe Gilles Vanden Burre, chef de groupe Ecolo/Groen à la Chambre.
Bémol : la réforme n’apparaît plus guère comme une priorité de la majorité. “Il y a des partis – plutôt le PS et le MR, mais aussi l’Open VLD -, qui souhaitent que le débat se déroule entre présidents de partis”, pointe Gilles Vanden Burre.
Le PS veut “prendre tout en compte”
La critique est reprise de volée par le PS. “Que le débat concerne les présidents de parti, ce n’est pas un scoop. Car on parle de la dotation des partis”, glisse la porte-parole du groupe PS à la Chambre. “Nous n’esquivons rien. L’accord de gouvernement prévoit qu’on se penche sur le financement des partis. Le débat est en cours et on a encore un an de législature pour y travailler. Nous souhaiterions une sorte de second tour pour entendre des politologues d’autres pays. En commission, nous avons ouvert un débat pour limiter la propagande de certains partis sur les réseaux.” Le PS ne s’engage toutefois pas sur la question de la diminution des dotations. “On ne peut réduire la question seulement à cela. Nous voulons que le débat ait lieu, en prenant tout en compte, le personnel mais aussi les dépenses sur les réseaux sociaux.”
"La dotation de la RTBF est de 330 millions d'euros par an. C'est plus que l'ensemble des partis réunis"
Le MR, quant à lui, assume d’être en faveur du maintien des dotations du parti, utilisées “dans des frais de personnel mais aussi pour faire connaître nos propositions.” “Nous ne pouvons rentrer dans le jeu des poujadistes qui surfent sur le populisme qui lui, en effet, n’a pas besoin de construire des idées de fond mais juste de trouver des coupables”, précise la porte-parole des libéraux, taclant au passage le Vlaams Belang et le PTB. “Dire c’est la faute des étrangers ou c’est la faute des riches ne demande pas d’avoir des collaborateurs. C’est avec un projet de société construit que l’on lutte contre les populismes."
”La dotation de la RTBF, c’est 305,6 millions d’euros par an, plus que l’ensemble des partis réunis. Et oui, il faut assumer que la politique coûte de l’argent. Car on n’a malgré tout rien trouvé de mieux que les partis politiques pour structurer le débat public. Qu’on les aime ou pas, on en a besoin en démocratie”, pointe Georges-Louis Bouchez qui ne souhaite pas quant à lui limiter les montants investis sur les réseaux sociaux, estimant “que chaque parti doit pouvoir utiliser son argent comme il le souhaite.”
”Je trouve très intelligent, comme le fait la N-VA, d’avoir acheté des actifs et de ne pas être dépendant d’une éventuelle défaite électorale”, conclut le président du MR. “Ils sont riches car ils ont gagné les élections. Le système est en fait assez juste”,
