Les cours de religion doivent-ils devenir facultatifs? Un sujet sensible sur lequel chaque parti a ses priorités
La question se pose dans les écoles officielles, en marge du débat sur la place de la philo/citoyenneté.
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Publié le 20-11-2020 à 09h29
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Le groupe de travail chargé de plancher sur l’opportunité de faire passer d’une à deux heures par semaine les cours de philosophie et citoyenneté entre dans le vif du sujet. Examiner cette question est inscrit dans la déclaration de politique communautaire. Une douzaine de députés membres de la commission de l’Éducation vont donc se mettre à l’œuvre pour poursuivre le travail entamé sous la précédente législature avec une première réunion, mercredi matin (ou début décembre si les travaux budgétaires monopolisent les agendas).
Un référentiel, des programmes
Depuis 2016 en primaire et 2017 dans l’enseignement secondaire, l’éducation à la philosophie et à la citoyenneté fait partie des programmes scolaires. Les compétences à acquérir sont définies dans un référentiel : construire une pensée autonome et unique, se connaître soi-même et s’ouvrir aux autres, construire la citoyenneté dans l’égalité en droits et en dignité, et s’engager dans la vie sociale et démocratique. Chaque réseau adapte ces consignes dans ses programmes.
Dans les écoles officielles (réseaux villes et communes et WBE) et dans le réseau libre non confessionnel (Felsi), une heure par semaine est obligatoire pour tous les élèves. Pour une deuxième période, ils peuvent opter soit pour un deuxième cours de philosophie et citoyenneté, soit pour un cours d’une des religions reconnues ou de morale non confessionnelle. Dans l’enseignement catholique, la philosophie et citoyenneté est inscrite transversalement dans les programmes. Elle ne fait pas l’objet d’un cours proprement dit.
Une deuxième heure obligatoire
Qu’est-ce qui pourrait changer ? L’idée sur la table est de rendre aussi obligatoire la deuxième heure de philosophie et citoyenneté. "C’est une question de vivre ensemble, insiste Joëlle Maison, porteuse de ce projet depuis longtemps. Quel que soit le modèle choisi, il faut prôner le dialogue interconfessionnel pour tous les élèves. Les visions du monde des uns et des autres doivent pouvoir se confronter. Il faut désamorcer, déconstruire les préjugés."
La députée Défi insiste sur l’importance d’arrêter de séparer les élèves en fonction de leur religion ce qui, en plus, représente d’énormes difficultés en termes d’organisation dans les écoles officielles où ils ont le choix entre sept cours dits philosophiques différents (philo et citoyenneté, morale non confessionnelle et les religions catholique, islamique, israélite, protestante et orthodoxe) ! "Les horaires sont de tels casse-tête que certains pouvoirs organisateurs constituent leurs groupes-classes en fonction de la religion de leurs élèves pour une facilité d’organisation, ce qui n’a vraiment pas de sens en termes de mixité !" Mais si on augmente le temps consacré à la philo et citoyenneté, faut-il rallonger les horaires ? Défi propose de faire de la place en sortant le cours de religion des grilles et en le rendant facultatif. Un avis que ne partagent pas toutes les formations (lire ci-dessous).
Lors d’une réunion préparatoire en juin, les députés du groupe de travail ont posé une série de questions dont ressortent plusieurs grands thèmes : l’actuelle fréquentation des cours dits philosophiques (on assiste à l’effondrement de la religion catholique et de la morale, au contraire des autres religions, l’islamique en particulier, qui enregistrent de plus en plus d’inscriptions), la question de l’emploi (quelles seraient les implications d’un éventuel changement ?) et la question juridique (la Constitution protège les cours philosophiques). En corollaires doivent aussi être abordées la formation des enseignants, l’inspection des cours et l’information aux parents. Sur base des renseignements fournis, les débats vont commencer.
Chaque parti a ses priorités. À ce stade, la parole de chacun est prudente, les mots mesurés. On sent à quel point le sujet est sensible.
Chaque parti a ses priorités
Du côté du PS , la position est claire. "Nous souhaitons que ces deux heures de philosophie et de citoyenneté deviennent obligatoires dans la grille horaire, pour tous les élèves, et ce, dans tous les réseaux, rapporte la députée Delphine Chabbert. Nous sommes favorables à ce que des cours de religion ou de morale soient dispensés en dehors de la grille obligatoire."
Au MR , Stéphanie Cortisse précise que le parti est aussi favorable à deux heures pour tous. "Mais dans le libre, la matière pourrait rester transversale à condition qu’elle soit là aussi intensifiée. Quant aux cours de religion, faut-il les rendre facultatifs et doivent-ils rester dans la grille horaire ? Ces réflexions sont entamées."
Chez Écolo , Kalvin Soiresse-Njall insiste pour que la question du sens soit abordée en priorité. "Certes, la pensée critique est importante. Mais quel message veut-on envoyer ? L’enjeu est aussi d’éviter que les élèves en questionnement identitaire se replient dans des sphères où les autorités publiques n’ont pas de prise."
Dans l’opposition, le CDH aborde ces travaux dans un esprit constructif. "Nous ne voulons pas arriver avec une position figée", rapporte Marie-Martine Schyns. "La mise en place de ce groupe de travail est une opportunité de réfléchir en profondeur. Nous serons très attentifs à l’emploi de toutes les personnes engagées dans tous les cours philosophiques et au respect de leur statut."