Deux ans maximum pour réussir la première, cinq pour le bac: à quoi ressemblera l'enseignement supérieur en 2022-2023
Voici tous les changements envisagés dans l’enseignement supérieur, à ce stade, dans le projet du gouvernement.
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Publié le 30-04-2021 à 21h26 - Mis à jour le 02-05-2021 à 19h07
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Le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a adopté en première lecture l’avant-projet de décret qui réforme le décret dit "Paysage", celui qui organise les études supérieures dans les universités, les hautes écoles et les écoles supérieures des arts francophones. Ce texte, présenté vendredi soir dans un communiqué de presse repris par les agences, doit maintenant faire l’objet de discussions avec les acteurs du secteur puis revenir en deuxième lecture avant d’entamer le reste de son parcours : l’avis du Conseil d’État, la troisième lecture et le vote au Parlement. "Il faut s’attaquer à certaines maladies de jeunesse du décret, explique la ministre de tutelle, Valérie Glatigny (MR), dans son communiqué. Car trop d’étudiants passent un grand nombre d’années dans l’enseignement supérieur sans, à terme, devenir détenteurs d’un diplôme."
L’heure des grandes manœuvres a sonné. Et La Libre a pris connaissance de l’ensemble des mesures envisagées à ce stade pour septembre 2022.
1. L’aide à la réussite sera accentuée
Avant le début de l’année académique, les établissements d’enseignement supérieur seront tenus de transmettre à l’Ares (la coupole de l’enseignement supérieur et de la recherche) un plan stratégique d’aide à la réussite pour l’année académique suivante.
Dans son communiqué de presse, la ministre Glatigny précise que "83 millions d’euros sont déjà alloués annuellement par la Fédération Wallonie-Bruxelles aux établissements pour mettre en place des mécanismes d’aide à la réussite : ces moyens seront renforcés et devront être attribués en priorité à ceux qui en ont le plus besoin".
2. Qui est concerné par les changements et à partir de quand ?
Plusieurs règles vont changer pour les étudiants qui s’inscriront en première année de l’enseignement supérieur en 2022-2023. C’est logique. Le tout premier objectif du nouveau texte est de leur permettre d’acquérir, dès le début de leur parcours, des bases pédagogiques solides. Les étudiants déjà engagés dans leurs études resteront, eux, transitoirement soumis aux règles actuelles.
Mais attention : ces dispositions transitoires ne seront plus valides en cas de changement de cycle. Autrement dit : ceux qui débarqueront en master en septembre 2022 et après passeront, eux aussi, sous la nouvelle réglementation.
3. Les critères de réussite seront revus : comment ?
Pour que chaque étudiant puisse mieux savoir où il en est qu’aujourd’hui, de nouvelles balises sont ajoutées.
Rappelons qu’un cycle d’études est constitué d’un programme découpé en blocs annuels de 60 crédits sauf exceptions (autrefois, on aurait parlé d’années d’études), eux-mêmes constitués d’un certain nombre d’unités d’enseignement (avant, on parlait de cours), elles-mêmes composées d’activités d’apprentissage. Ce découpage a pour but d’assurer un parcours progressif et cohérent.
Chaque année d’études fait l’objet d’un PAE (programme annuel d’études, propre à chaque étudiant) validé par un jury. Les 60 premiers crédits d’un cycle constituent le bloc 1 de celui-ci. Les 120 crédits suivants constituent la poursuite d’études de ce cycle. C’est valable pour les bacheliers comme pour les masters.
Afin de souligner l’importance des fondements du bloc 1, la totalité des crédits du bloc 1 devront désormais être acquis avant que l’étudiant puisse s’inscrire en poursuite d’études. Aujourd’hui, 45 crédits suffisent.
Si au terme d’une inscription au bloc 1 d’un cursus déterminé l’étudiant a acquis ou valorisé les 60 premiers crédits de ce cursus, il accède directement à la poursuite d’études.
Si tel n’est pas le cas, l’étudiant reste inscrit en première année. La composition de son programme d’études variera alors selon le nombre de crédits valorisés. Au-dessus de 45 crédits, il devra d’abord viser les crédits non acquis précédemment. Il pourra les compléter par des unités d’enseignement de la poursuite d’études pour lesquelles il remplit les conditions prérequises, sans que le nombre total de crédits excède 60 crédits. Même chose entre 30 et 44 crédits, avec la possibilité de compléter son programme avec des activités de remédiation. En dessous de 30 crédits, ces dernières seront obligatoires.
4. En bloc 1, trois possibilités d’évaluation par épreuve passée en janvier
Il sera obligatoire de proposer aux étudiants de bloc 1 en échec lors de la session de janvier au moins deux autres occasions de valider les unités d’apprentissage concernées lors des deux quadrimestres suivants.
Cependant, les étudiants qui n’auront pas présenté une ou plusieurs épreuve(s) lors de cette première session perdront l’occasion de se refaire au quadrimestre suivant. Pire : si leur absence est jugée non motivée, celle-ci entraînera l’impossibilité d’être admis aux autres épreuves.
5. Des durées maximales seront imposées par cycle
Des critères supplémentaires sont introduits. Pour le premier cycle de 180 crédits, un étudiant qui n’aura validé aucune unité d’apprentissage du bloc 1 en "première année" devra se réorienter.
En outre, chaque étudiant devra réussir ses 60 premiers crédits en deux ans maximum, mais aussi 120 crédits en quatre ans maximum, et 180 crédits en cinq ans maximum.
Pour le deuxième cycle aussi, 60 crédits devront être validés en deux ans maximum, 120 en 4 ans et 180 en maximum six ans.
Une fois par cycle, une année supplémentaire sera accordée en cas de réorientation.
6. La moyenne de 10/20 ne suffira plus forcément
Les titulaires des activités d’apprentissage d’une unité d’enseignement auront le choix de la méthode de calcul pour évaluer l’élève.
Une unité d’enseignement pourra ainsi être inscrite en échec si une des activités d’apprentissage est sanctionnée d’une note inférieure à 10/20, même si la moyenne est supérieure à la moitié des points.
7. Les proclamations disparaîtront, sauf en bloc 1
Plusieurs changements visent un allègement de la charge administrative des établissements.
Ainsi, les résultats ne seront plus communiqués que par voie d’affichage, sauf pour les premières années du premier cycle où la proclamation est maintenue.
8. La date limite d’inscription sera avancée
Par ailleurs, les inscriptions devront avoir lieu avant le 30 septembre, au lieu du 31 octobre actuellement.
Il y a deux raisons principales. D’un point de vue organisationnel, les établissements doivent établir tous les programmes individuels des étudiants et les rendre compatibles avec l’organisation des cours le plus tôt possible dans l’année. D’un point de vue pédagogique, plus le temps avance, plus il devient difficile pour les étudiants de rattraper les cours auxquels ils n’ont pas pu assister. Il est toutefois prévu d’autoriser les étudiants de première année de premier cycle qui pensent s’être trompés à modifier leur inscription entre le 30 septembre et le 31 octobre.
9. La carte d’étudiant deviendra obligatoire
La fourniture d’une carte d’étudiant sera obligatoire et généralisée. Devront a minima y figurer une photo couleur, la mention du numéro d’étudiant et le logo de l’établissement. Seul et unique moyen d’assurer un contrôle de l’identité, c’est aussi un signe d’appartenance pour l’étudiant.
10. Quelles sont les premières réactions ?
Les syndicats attendent d’avoir reçu le document officiel avant de se prononcer. Dans l’opposition, la cheffe de file CDH au Parlement, Alda Greoli, regrette le manque d’information. "Dommage, dit-elle, de ne pas s’être assuré l’accord préalable du terrain." D’autre part, la députée s’interroge. "On semble essentiellement parler du parcours de l’étudiant mais qu’en est-il des autres aspects de cette réforme ? Quid des années propédeutiques ? De l’orientation ? De l’organisation et de la mission de l’Ares ?" Enfin, sur son site, la Fédération des étudiants francophones craint que le projet ne mette encore davantage en difficulté les étudiants les plus précarisés.