Le burn-out touche aussi les étudiants: "Je me mettais devant mes feuilles mais je n’y arrivais plus"

Contribution externe
Le burn-out touche aussi les étudiants: "Je me mettais devant mes feuilles mais je n’y arrivais plus"
©shutterstock

Une contribution de Blandine Clément , membre de l'Etincelle , un kot-à-projet néo-louvaniste centré sur le journalisme dont La Libre Etudiant est partenaire.

Pour certains ou certaines, les études constituent les plus belles années de leur vie. Pour d’autres, cette période peut se transformer en véritable cauchemar. Si la parole autour du burn-out professionnel tend à se libérer, celui des étudiants reste encore très tabou et méconnu. Rosalie, qui a vécu un burn-out durant le deuxième confinement, nous raconte son expérience.

Zoom sur le burn-out étudiant

Le burn-out étudiant est un syndrome d’épuisement provoqué par un déséquilibre prolongé entre les sources de stress pesant sur la personne, stress lié à son parcours académique, et les ressources dont elle dispose.

Ce sujet de recherche étant relativement récent, il n’y a à ce jour pas encore d’étude significative sur sa prévalence en Belgique. Cependant, le SPF emploi a évalué en 2010 que 0,8% de la population rencontrera un burn-out au cours de sa vie, bien que ces chiffres tendent à être en constante augmentation.

La maladie de la fatigue

Comme son nom l’indique, le burn-out se manifeste principalement par une fatigue extrême, provoquant une perte d’efficacité et d’épanouissement. Rosalie témoigne :

« Tout d’un coup, je ne savais plus rien faire, j’étais épuisée tout le temps. Je me mettais devant mes feuilles, mais j’avais beau faire ce que je pouvais, je ne retenais rien. Je n’y arrivais plus. Quand je voyais des amis, après une heure, j’étais vidée. Tenir une conversation était devenu épuisant. »

D’autres symptômes peuvent s’ajouter à cela. On retrouve fréquemment de l’irritabilité, une anxiété constante, des difficultés de concentration et de mémoire, une perturbation du sommeil, etc. Il n’est pas rare qu’un cercle vicieux s’installe, dans lequel le jeune déjà épuisé redouble d’efforts pour travailler, ce qui aggrave ses symptômes.

« J’ai commencé à avoir mal à la tête quand j’étudiais. J’étais tout le temps à bout de nerfs, je pleurais tout le temps. J’avais envie de partir, de fuir, je ne voyais pas comment j’allais arriver au bout des choses que je voulais faire. J’avais l’impression que mon cerveau ne fonctionnait plus, qu’il était en mode automatique. Je ne me rappelais rien, j’oubliais parfois même des discussions entières : plus rien ne s’enregistrait. J’oubliais tout le temps mon pique-nique, mes couverts… »

Des causes plurielles

Les sources d’épuisement peuvent être multiples : charge de travail importante bien entendu, mais aussi des ambitions élevées, une sur-identification au travail, des difficultés à gérer son temps… Quand il n’y a pas assez de ressources pour compenser, comme une estime de soi solide ou encore le soutien de l’entourage, le risque est grand de tomber en burn-out. À noter que les personnes perfectionnistes, consciencieuses et dévouées sont généralement plus vulnérables à ce trouble.

Chez les étudiant.e.s, à la différence des employé.e.s, la période de vie génère des sources de stress spécifiques. En effet, celle-ci est souvent marquée par des horaires très chargés, avec la nécessité de travailler le soir et le weekend, sans oublier un éventuel job étudiant. D’autres changements marquants caractérisent ces années : la nécessité de construire ou maintenir un cercle social, de s’intégrer dans une nouvelle colocation et plus largement, de forger son identité.

Indéniablement, l’impact négatif de la pandémie sur la santé mentale des étudiants s’applique aussi au burn-out, qui peut être favorisé par des cours en distanciel, un isolement social et des possibilités moindres de se changer les idées.

« Le covid a beaucoup joué parce qu’il n’y avait plus que l’étude au centre de ma vie. Il n’y avait plus les autres choses dans lesquelles je pouvais m’épanouir, comme les mouvements de jeunesse, la danse, le foot, etc. Il n’y avait pas d’autres sources de distraction. Je n’avais plus qu’un seul but dans ma vie : réussir mes études. »

Après la chute, se relever

Fort heureusement, il est possible de sortir d’un burn-out, grâce à différents comportements permettant de favoriser la guérison. Avant tout, il est primordial d’accorder du temps pour le repos, la détente et les loisirs afin de récupérer de l’énergie.

« J’ai appris à prendre du temps pour moi, à faire des choses qui me font du bien, ce que je ne faisais jamais avant. Par exemple, prendre des bains, regarder des films, faire du sport… Je sors, je fais la fête, je rencontre des gens. Ce sont des activités qui me donnent de l’énergie et qui me permettent d’aller en cours, d’affronter ce qui est plus compliqué. »

D’autres facteurs permettent d’aider les jeunes à retrouver de l’aplomb : une gestion du temps efficace, un sommeil suffisant, une alimentation équilibrée, etc. Garder un cercle social est également essentiel pour s’en sortir, c’est même l’un des facteurs de protection les plus significatifs.

« Ma famille a très bien réagi, elle m’a bien accompagnée. Mes copines aussi ont été hyper présentes et me soutenaient beaucoup pour les cours. Mes parents m’ont mis en contact avec certains de leurs amis qui ont fait des burn-out. Je les ai appelés, et ça m’a vraiment aidée. Ils étaient les seuls à vraiment comprendre ce que je vivais et à me donner des conseils adéquats. » »

L’épuisement comme avertissement

Enfin, le burn-out étudiant constitue très souvent un signal d’alarme, mettant en évidence des habitudes et croyances dysfonctionnelles. En cela, il ne faut pas négliger une réflexion nécessaire sur son rapport aux études et multiplier les sources de valorisation pour que la réussite académique n’en soit pas l’unique dépositaire.

« On m’avait dit en primaire que je n’arriverais jamais à intégrer certaines écoles ou filières. Ce sont des paroles qui marquent, qui font que tu as envie coûte-que-coûte de réussir. J’ai dû apprendre à me rendre compte que les études ne sont pas au centre, qu’elles ne te font pas réussir ou non ta vie. Il y a plein d’autres choses qui te permettent d’apprendre et de réussir. »

Le témoignage de Rosalie, ainsi que celui de nombreux autres étudiants épuisés, nous offre l’opportunité de questionner plus largement les fondements de notre société. Quelle place donner à la réussite académique? Comment s'assurer que le plaisir d'apprendre reste bien présent? Les questions sont posées...

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...