Des détenus de Forest ont monté deux concerts de musique classique: "Grâce à ça, j'ai déjà une promesse de stage de trois mois"
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Publié le 14-01-2020 à 18h17 - Mis à jour le 14-01-2020 à 18h21
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Des détenus de Forest ont monté deux concerts de musique classique. Le projet Escapades débouche sur des promesses de stage à Bozar. Un tremplin pour la sortie de prison.
Dans le hall du Conservatoire royal de Bruxelles, Piotr se démène pour que tout soit prêt pour le concert de musique classique qui démarre dans une demi-heure. Au programme de la grande salle, à 20h15 lundi soir, il y avait Mozart, Haydn, Tan Dun, Chostakovitch, Bach… Ce soir, le trentenaire tient la caisse. Mais demain matin à 8 heures pile, il devra être de retour à la prison de Forest, où il purge une peine de 8 ans. “J’ai eu une permission de sortie de 16 heures pour assister au concert ce soir.”
Le quatuor à cordes et les guitaristes entendus lundi soir avaient déjà donné un premier concert, intra muros, dans la salle de théâtre de l’établissement pénitentiaire bruxellois. S’y ajoutaient, au Conservatoire, des virtuoses au piano –trop délicat à déplacer pour un soir en prison – dont l’éblouissante Yu-Fen Chang.
L’organisation de A à Z
“On s’est occupé de toute l’organisation à huit détenus. On a choisi les musiques et les instruments, conçu les affiches et les flyers, géré le budget”, explique fièrement Piotr. “On s’est réunis une fois par semaine pendant 4 mois pour créer cet événement”. Ce soir, ils ne sont que trois détenus présents: Piotr et Juan ainsi que Thomas (qui est désormais libéré). Les autres n’ont pas reçu l’autorisation de quitter la prison pour l’occasion.
Ces ateliers au sein de l’établissement pénitentiaire, mis sur pied par le Service laïque d’aide aux justiciables et aux victimes (SLAJV), en collaboration avec Bozar, s’inscrivent dans le projet Escapades. A l’initiative de ce projet conçu pour aider les condamnés à préparer leur sortie, on trouve Patrick de Clerck, directeur de l’Asbl Music Projects for Brussels, qui a coaché les détenus de Forest pour monter le double événement.
Plus qu’un symbole
“Je suis ouvert à toutes les musiques. C’est pour ça que je me suis inscrit à l’atelier”, continue Piotr, qui est servant technique à la prison. “Grâce à ça, j’ai déjà une promesse de stage de trois mois à Bozar”, se réjouit-il. “J’aimerais bien le faire dans le secteur de la publicité”. Devant le tribunal de l’application des peines, la perspective d’un stage peut faciliter la libération anticipée.
C’est l’autre face vertueuse du projet Escapades: raccrocher les détenus à la société qui ne les attend pas forcément à l’extérieur. Lundi soir, la directrice de la prison de Forest et le directeur du Palais des Beaux-Arts étaient tous deux présents au concert – c’est plus qu’un symbole.
“En fonction des intérêts des détenus et et des possibilités de Bozar, les participants peuvent intégrer une des nombreuses équipes d’organisation d’événements”, précise Amandine Jansen, chargée de projet au SLAVJ. Un stage rémunéré, à temps plein, pendant trois mois. Qui débouche parfois sur un emploi. Un ex-détenu a ainsi obtenu un CDD de 4 mois à Bozar. Qui sera peut-être suivi, qui sait?, d’un autre contrat.