Poursuivi pour avoir financé son frère djihadiste
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Publié le 17-01-2020 à 10h29 - Mis à jour le 13-02-2020 à 20h33
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Moussa a envoyé à Saïd, son frère parti en Syrie, une partie des allocations que ce dernier continuait à percevoir indûment.
C’est un cas de figure que l’on a régulièrement rencontré au cours des dernières années chez ceux que l’on appelle les "Foreign Terrorist Fighters". Un jeune Belge, parti en Syrie combattre dans les rangs djihadistes, continue de percevoir ses allocations de chômage car il a remis ses cartes de pointage à une personne de confiance.
Vu que les paiements sont automatisés, le versement des allocations se poursuit tant que l’autorité compétente - Actiris à Bruxelles - n’effectue pas de contrôle. Cela peut prendre du temps.
Le "djihadiste au chômage" fait en sorte que ses allocations, tombées sur son compte bancaire belge, lui parviennent sur place.
Il était impossible de virer l’argent de compte à compte vers la Syrie. La personne de confiance retire donc l’argent du compte et l’envoie vers un "collecteur" qui a été renseigné au djihadiste par le groupe auquel il appartient.
Un système de collecte performant
Au faîte de sa puissance en 2014 et 2015, l’État islamique était très bien organisé. Les collecteurs se trouvaient en Turquie ou, moins fréquemment, au Liban. En quelques jours, l’argent parvenait à son destinataire, soit via un "cash courrier" ou un système de compensation.
Avec cet argent, le djihadiste pouvait ainsi améliorer son ordinaire, voire acheter son équipement ou son arme.
Saïd G., parti en septembre 2014 à 33 ans, a ainsi continué à recevoir sur son compte les 1 200 euros d’allocation mensuelle jusqu’en mars 2015.
Il serait mort à l’automne 2015, si du moins l’on en croit les photos et vidéos montrant son cadavre alors envoyées à sa famille par un de ses frères d’armes. Ce qui, là aussi, était aussi une pratique récurrente au sein de l’État islamique.
Des cartes de pointage ont été retrouvées chez sa sœur. Les enquêteurs ont établi que son aîné, Moussa G., lui avait fait parvenir deux fois 1 000 euros, ce qui, en droit belge, est considéré comme du financement du terrorisme.
Moussa, un père de cinq enfants âgé de 40 ans, répondait de ces faits jeudi en correctionnelle.
Pour le procureur fédéral, Raphaël Malagnini, il est évident que toute la famille G. était parfaitement informée du sort de Saïd et que Moussa était la "tête de pont" entre son frère et la famille. Aux yeux du procureur, par ces envois, Moussa a permis à Saïd de vivre sur place et de poursuivre les combats. Il a requis trois ans de prison car Moussa, qui a commis quelques erreurs de jeunesse, a un casier chargé.
Moussa conteste : longuement interrogé par le tribunal, il dit qu’il pensait que son frère était dans une milice assurant la reconstruction des routes, tout en combattant à la fois l’EI et le régime de Bachar el-Assad. S’il savait que son frère était impliqué dans le terrorisme islamiste, il n’aurait pas envoyé d’argent, assure-t-il.
Jugement le 13 février.