Il y avait une taupe à la police: le ripou de Schaerbeek tuyautait en direct les terroristes de Paris et Bruxelles
Il y avait une taupe à la police, une grosse taupe qui informait en direct le frère du principal coordinateur des attentats de Paris et Bruxelles.
- Publié le 19-06-2020 à 08h10
- Mis à jour le 19-06-2020 à 08h11
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Le ripou de Schaerbeek a eu 203 contacts avec Yassine Atar, frère du principal coordinateur des attentats.
Il y avait une taupe à la police, qui informait en direct le frère du principal coordinateur des attentats de Paris et Bruxelles. Dans la période des attentats, ce policier belge a eu 200 contacts avec Yassine Atar, le frère d’Oussama Atar. Il lui a fourni les informations policières qu’il demandait, et même sur ce que la police savait des frères El Bakraoui qui préparaient les attentats de Zaventem et du métro Maelbeek.
Ce policier vient d’éviter le pire : de façon inespérée pour lui, ses conseils Sven Mary et Romain Delcoigne ont pu lui éviter de devoir retourner en prison. Si la cour d’appel de Bruxelles l’a condamné mercredi à 50 mois d’emprisonnement, Mohammed S. a obtenu le sursis pour ce qui excède la détention préventive.
L’ex-inspecteur de la zone de police Bruxelles Nord ne se bornait pas à informer des gens qui préparaient les attentats. Il informait des suspects sur des enquêtes en cours. Quand les collègues arrivaient, tout avait été nettoyé, il n’y avait plus rien à trouver. Comme il travaillait au dispatching en tant qu’opérateur, on l’a même suspecté d’avoir modifié l’angle d’une caméra braquée sur le domicile d’un suspect, pour saboter l’observation.
Le 3 juin 2017, la Belgique livrait à la France Yassine Atar, alors inculpé pour les attentats de Paris. On ignorait encore à ce moment qu’Atar avait un très bon copain au dispatching de la police de Schaerbeek/Saint-Josse/Evere.
Né à Tanger le 15 octobre 1966, Mohammed S. était technicien à la Stib avant d’entrer à la police. Il alimentait Atar depuis au moins l’été 2014 en informations confidentielles sur des enquêtes en cours, des immatriculations, des numéros de châssis, puisées dans les bases de données de la police (BNG), du Registre national et de la DIV.
Un proche d’Atar devait arriver à Brussels Airport ? Son ami le policier lui apprenait que les services antiterroristes le soupçonnaient de préparer un attentat et avaient donné pour instruction de le mettre sous surveillance. Le ripou transmettait les infos à Atar par WhatsApp.
Dans la période critique entre le 10 septembre 2015 - 2 mois avant les attentats de Paris - et le 20 mars 2016 - juste avant ceux de Bruxelles -, le policier a eu 203 contacts (SMS ou conversations directes) avec Atar.
L’inspecteur ripou ne faisait pas dans le détail. Il envoyait à Atar des captures d’écran avec les renseignements demandés.
En utilisant les codes d’accès de collègues, pour leur faire porter le chapeau. Comme on ne saura jamais l’ampleur des infos qui ont fuité, le policier jouait sur du velours et se permettait de répondre qu’il "ne se rendait pas compte", qu’il avait "été naïf", qu’il "ne savait pas". "Des réponses qui laissent pantois", ont répondu les juges qui l’ont pourtant gratifié du sursis.
Les attentats de Paris ont eu lieu le 13 novembre 2015. Le policier a encore eu un contact la veille avec Atar, le 12.
Le 14, alors que toutes les polices sont aux trousses des auteurs de 137 assassinats, une recherche a été effectuée dans les bases de données belges pour une plaque d’immatriculation en lien avec les attentats. En décembre, alors que les terroristes traqués sont introuvables, Yassine Atar demande au policier schaerbeekois d’effectuer une recherche, pour lui, dans le Registre national. Le policier accepte, puis lui rapporte le résultat ; la communication dure six minutes.
Le 16 mars 2016, soit 6 jours avant les attentats de Bruxelles, le policier faisait parvenir à Atar des captures d’écran contenant des informations se rapportant à Jawad B., que les services belges allaient suspecter au mois de juin de préparer un attentat, qui n’a jamais eu lieu, au Village des supporters installé place Rogier à l’occasion de l’Euro de football.