La communication de la police pointée du doigt dans l’affaire Chovanec: "Quand j’ai vu cela la première fois il y a 15 jours, j’ai été choqué"
Jan Jambon s’est défendu en expliquant que le dossier reçu à l’époque et les éléments connus à ce jour sont différents.
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Publié le 01-09-2020 à 19h17 - Mis à jour le 02-09-2020 à 21h27
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La commission mixte Intérieur et Justice de ce mardi était très attendue. Et pour cause, l’ancien ministre de l’Intérieur Jan Jambon (N-VA) était invité à s’expliquer sur l’affaire Chovanec. Lors de la session précédente, l’actuel ministre de l’Intérieur, Pieter De Crem (CD&V), avait été clair : Jan Jambon était au courant de l’affaire. Il y a quelques jours, le nationaliste flamand a d’abord expliqué ne pas avoir eu connaissance du dossier pour, ensuite, dire qu’il ne s’en souvenait pas.
Ce lundi, une nouvelle fuite dans la presse a mis en lumière que le rapport de police sur cette affaire était incomplet puisqu’il n’évoquait pas, par exemple, l’attitude des policiers au moment de l’interpellation de Chovanec dans sa cellule.
Un rapport de police incomplet
Cette faille dans la communication est devenue la principale ligne de défense de Jan Jambon qui a, ce mardi en commission, insisté à de multiples reprises sur ce point. “Le dossier qui m’a été présenté il y a deux ans et demi est différent de ce que nous savons aujourd’hui. À l’époque, j’avais un rapport de police sommaire, neutre. Je le répète : jamais, ni moi ni mon cabinet, n’avons vu ces images avant. Quand j’ai vu cela la première fois il y a 15 jours, j’ai été choqué”, a déclaré l’actuel ministre-Président flamand ce matin en commission. Jan Jambon a d’ailleurs demandé que le fameux rapport puisse être consulté par les députés. La présidente de la commission Justice, Kristien Van Vaerenbergh (N-VA,) en a fait la demande au ministre de l’Intérieur Pieter De Crem (CD&V).
Mais un autre document a fuité, ce mardi, dans la presse : le procès-verbal qui relate ce qui s’est passé lors de l’arrestation de Jozef Chovanec dans la soirée du 23 février 2018. Si le document de cinq pages détaille une arrestation plutôt musclée, les policiers qui sont interrogés pour ce procès-verbal évoquent aussi le comportement problématique de Jozef Chovanec qui semblait “sous influence”. Pour “le protéger de lui-même”, les policiers ont donc dû intervenir de façon musclée, mais l’usage de la force aurait été proportionnel, selon les policiers interrogés.
Hormis ces éléments, rien, dans ce document, ne mentionne ni le salut nazi, ni l’ambiance hilare qui régnait au sein de la cellule, ni même l’étouffement, pendant 16 minutes, de Jozef Chovanec.
Un document qui semble donc conforter les propos de Jan Jambon. Se pose alors une question : qui a rédigé ce fameux rapport de police où une série d’éléments fondamentaux n’ont pas été communiqués ?
“Je dis aux officiers d’oser parler”
La question a été posée ce mardi à Catherine De Bolle, à la tête de la police fédérale en février 2018. Et sa ligne de défense est proche de celle de Jan Jambon. “Je n’ai pas été informée des faits et ils devaient être pourtant apportés à ma connaissance. Les images et le contenu ne m’ont pas été présentés. Quand une enquête débute, le secret de l’instruction doit être respecté, mais la procédure interne n’a pas fonctionné, et je souhaite savoir pourquoi”, s’est interrogée l’actuelle directrice d’Europol. “Il ressort également qu’un juge d’instruction a été saisi, mais quand on lit le communiqué après avoir vu les images diffusées il y a quinze jours, ce communiqué prend une tout autre dimension”, explique Catherine De Bolle.
L’actuel commissaire général de la police fédérale, Marc De Mesmaeker, a assuré, pour sa part, que l’enquête interne est en cours et devrait permettre d’en savoir davantage sur le rôle joué par chaque acteur impliqué dans cette affaire. L’objectif est triple, selon le commissaire : comprendre le comportement de certains agents, faire la lumière sur la gestion et l’organisation de la police et, enfin, faire éclater la vérité “dans l’intérêt de la police elle-même et pour la confiance que je veux voir instaurée avec la population”. Marc De Mesmaeker a d’ailleurs rappelé qu’un policier qui a connaissance d’un fait aussi grave ne doit pas rester muet. “Les processus opérationnels, c’est une chose, le comportement de nos officiers en est une autre. Je le répète et je dis à mes officiers d’oser parler”, s’est exclamé le commissaire général.
D’autres auditions ont été demandées
Ces réponses sont toutefois loin de satisfaire les députés. Ahmed Laaouej, chef du groupe PS à la Chambre, a estimé que Jan Jambon “n’est pas crédible dans ses explications”, tandis que pour Zakia Khattabi (Écolo), “il est temps d’ancrer la question de responsabilité politique”.
De nombreux députés ont également demandé que les autorités de la police aéroportuaire et celles de la police administrative, pointées du doigt pour une communication défaillante, puissent être entendues.
Les députés ont aussi réclamé une chose : ne plus se réunir dans des commissions mixtes pour permettre de reprendre le travail dans la commission Justice d’abord, celle de l’Intérieur ensuite. Décision actée par la présidente de la commission Justice, Kristien Van Vaerenbergh (N-VA), qui a conclu cette dernière commission mixte sur un goût d’inachevé.