Pour le parquet de Charleroi, rien ne prouve que les gestes des policiers soient la cause du décès de Jozef Chovanec
Si tous les projecteurs étaient braqués, mardi, sur les autorités policières pour sa communication et sa gestion du dossier, c’est à présent du côté du parquet de Charleroi que se posent de nombreuses questions.
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Publié le 02-09-2020 à 21h29 - Mis à jour le 07-09-2020 à 20h21
Les rebondissements dans l’affaire Chovanec sont dignes d’une saga judiciaire dont la Belgique se passerait volontiers. Les multiples fuites dans la presse ont suscité de nombreuses questions sur le rôle joué notamment par l’ancien ministre de l’Intérieur, Jan Jambon (N-VA). Auditionné ce mardi, le nationaliste flamand a répété qu’en février 2018, il n’avait pas été mis au courant des faits dans leur entièreté.
Si tous les projecteurs étaient braqués, mardi, sur les autorités policières pour sa communication et sa gestion du dossier, c’est à présent du côté du parquet de Charleroi que se posent de nombreuses questions. Et pour cause, le parquet aurait été en possession de l’ensemble des éléments dès le début de l’affaire, mais n’aurait pas agi comme l’aurait exigé la gravité des faits.
Les policiers pas liés à la mort
Pointé du doigt, le parquet carolo s’est défendu ce mercredi. Un communiqué publié mercredi soir revient sur cette enquête “toujours en cours mais sur laquelle il fallait communiquer, compte tenu de nombreuses affirmations erronées véhiculées par les médias”.
Le communiqué signé par le Parquet général évoque le déroulé de cette fameuse soirée du 23 février et confirme que, dès le 27 février, le juge d’instruction en charge du dossier a ordonné la saisie des images. “Une copie a été enregistrée sur une clef USB dont le contenu fut ensuite gravé sur un Cd-Rom. Cela signifie que la police a donc toujours gardé l’original des images, nonobstant la saisie opérée, et qu’elle pouvait parfaitement visionner celles-ci à tout moment, indépendamment de l’enquête judiciaire en cours, et spécialement dans le cadre de ses compétences disciplinaires”. Le parquet précise par ailleurs que la vidéo a été visionnée notamment par un juge d’instruction mais aussi deux enquêteurs du Comité P.
Enfin, le parquet souligne que, “contrairement à ce qui a pu être affirmé, il ne semble pas prouvé, à ce stade de l’enquête, que les gestes posés par les policiers sont la cause directe du décès de la victime. Il s’agit là du nœud de l’enquête. Par leurs comportements, les policiers peuvent-ils être considérés comme pénalement responsables de la mort de la victime ? Sur ce point, de nombreuses expertises ont été ordonnées par le juge d’instruction. En l’état actuel des expertises, aucun élément ne démontre de signe de compression thoracique exercée par les policiers qui serait en lien avec le décès de la victime.”
La Slovaquie veut une enquête européenne
Si cette communication du parquet, plus claire cette fois, permet de mieux comprendre qui sont les acteurs concernés par les faits, une question demeure sans réponse : pourquoi un premier procès-verbal, plutôt laconique, a été suivi, 55 minutes plus tard, d’une version un peu plus étoffée qui n’aurait, par ailleurs, jamais atterri au cabinet de Jan Jambon ?
Pour Thierry Marchandise, ancien procureur du Roi à Charleroi, le parquet a rempli sa mission principale qui est “celle de mener une instruction rapidement”. Mais l’ancien magistrat s’interroge surtout sur la lenteur de l’instruction. “Avec tous les éléments à disposition, l’affaire aurait pu être clôturée en 6 mois. Mais le communiqué de ce mercredi soir évoque des devoirs complémentaires qui peuvent donc justifier que l’instruction prenne plus de temps.”
L’affaire est donc loin d’être clôturée, d’autant qu’on apprenait, mercredi soir, que la Slovaquie indique ne pas suffisamment faire confiance à une enquête belge et souhaite donc que la Commission européenne se penche sur cette affaire, décidément pleine de rebondissements.