Stéphane Pauwels, né grande gueule : "Déjà gamin, on pouvait l'admirer comme le détester"
Stéphane Pauwels sera jugé, en compagnie de 26 autres prévenus, à partir de ce lundi dans le cadre d'un vaste dossier de home-invasions. L'animateur télé, soupçonné d'avoir commandité une de ces agressions, a une personnalité qui divise. Ce trait de caractère, clivant, il le traîne depuis son plus jeune âge. Retour sur la genèse du personnage Pauwels.
- Publié le 13-09-2020 à 13h51
- Mis à jour le 22-10-2020 à 09h50
Toutes les personnes qui côtoient ou ont côtoyé Stéphane Pauwels sont unanimes : avec lui, c’est noir ou c’est blanc. On l’aime ou on le déteste. Peu enclin au compromis et à l’art du consensus, ce qui n’a pas manqué d’occasionner de nombreux clashs au cours de sa carrière, le Mouscronnois de naissance déchaîne les passions depuis tout petit. Mais quel est véritablement le parcours de ce personnage atypique ?
Né en août 1968 dans une famille assez stricte, Stéphane Pauwels ne connait pas une enfance particulièrement joyeuse. Elle est d’ailleurs marquée par la séparation de ses parents, et par l’absence de sa mère par la suite. Le jeune Stéphane profite du sport et des salles de classe pour s’extraire de la morosité du cocon familial. Daniel Senesael, actuel bourgmestre d’Estaimpuis et ancien professeur de Stéphane Pauwels au lycée d’État de Mouscron, avait déjà bien cerné le "phénomène" à l’époque. "Je l’ai eu pendant 2 ans, de 12 à 14 ans. C’était un élève assez particulier, il était très généreux de cœur et très imaginatif et inventif. Par contre, ce n’était pas un élève qui rentrait dans la norme. Il a passé presque autant de temps derrière la porte que dans ma classe", s’exclame le bourgmestre, hilare.
"C’était quelqu’un de spontané, intrépide et fanfaron. C’était un fonceur, il n’avait pas peur d’aller au-devant des difficultés et de sauter dans l’inconnu", continue le maïeur socialiste.

Pour Stéphane Neirinck, ami de longue date de Stéphane Pauwels, le discours est le même. Pour lui, "Steph" n’a pas changé d’un poil. "Je le connais depuis 45 ans. Selon moi il n’a pas changé du tout. Déjà gamin, à 10 ans, il avait un avis tranché sur tout. Il a toujours fait l’unanimité. Mais dans les deux sens. On pouvait l’admirer comme le détester. Le juste milieu n’existe pas avec lui. Même quand il était petit. Je me souviens d’un entraîneur de basket qui disait de lui ‘Purée, celui-là, il a une gamelle…"
Amateur de sport, c’est à Herseaux, à quelques kilomètres de sa ville natale, que Stéphane Pauwels commence par pratiquer la gymnastique et le football, avant de dériver vers le basket, discipline en vogue dans la région.
Papillonnages professionnels
Après des années passées ensemble sur les bancs de l’école, les deux amis se perdent un peu de vue, Stéphane Pauwels qui rêve d’indépendance, étant parti faire ses classes à l’école militaire de Neder-Over-Hembeek, avant de finalement devenir sergent à la caserne d’Arlon. Mais il ne se passe pas longtemps avant que les chemins des deux amis se croisent à nouveau. Stéphane Neirinck, alors GO au Club Med en Martinique, se souvient bien de l’été où il a invité "Steph" pour "travailler" avec lui. "J’avais fait venir Stéphane pour qu’il bosse avec moi et en même temps qu’on puisse passer des vacances ensemble. Le soir de son arrivée, je termine ma journée, je rentre et qui je vois chanter sur scène devant 800 personnes ? Stéphane ! Ca m’avait vraiment stupéfait…", raconte son ami de toujours.
Celui qui est aussi parrain de la fille de Pauwels reconnaît chez son ami un côté "brut de décoffrage". "Il n’a pas de filtres. Tant pis si, parfois, il blesse. L’important pour lui, c’est qu’il ait dit ce qu’il avait à dire, sans langue de bois. Le fait qu’il ait des clashs réguliers, ça ne me surprend pas. Il ne changera pas. Mais il s’est déjà beaucoup amélioré. Avec l’âge, l’expérience, il prend plus de recul. Mais, une chose est sûre, c’est un personnage qui dérange."

Les années suivantes sont faites de papillonnages professionnels, durant lesquels Stéphane Pauwels exerce les fonctions de maître-nageur, disc-jockey à l’Eden à Mouscron, chargé de la promotion chez Skyrock et responsable de la communication pour le publicitaire Giraudy, il fait son retour dans sa région natale, pour y retrouver une vieille connaissance. "En 1994, j’ai été élu pour la première fois bourgmestre d’Estaimpuis", se remémore Daniel Senesael. "Je pensais qu’il était intéressant d’avoir avec moi quelqu’un qui avait du franc-parler, qui bousculait un peu les habitudes. Je trouvais que Stéphane avait le profil voulu donc je l’ai engagé en tant qu’attaché de presse communal."
"Et au final j’ai eu raison", s’exclame-t-il. "C’est lui qui a remis une dynamique au sein de la commune. Pour les opérations qu’on menait à l’époque, c’était toujours le premier volontaire et le plus dynamique. Il a créé le journal L’Estaimpuisien en 1995 et encore d'autres projets. Ça n’a pas plu à tout le monde, c’était comme à l’école finalement", renchérit Daniel Senesael.
Après trois années riches en initiatives mais aussi en stress, la collaboration entre les deux hommes prend fin, ce qui permet à Stéphane Pauwels de faire un premier pas dans le monde du football. "Au bout de 3 ans, il a eu l’opportunité d’aller travailler à l’Excelsior de Mouscron avec le bourgmestre de l'époque, Jean-Pierre Detremmerie. Je l’ai fortement incité à accepter, j’étais content qu’il parte", raconte le maïeur en riant. "J’étais heureux de travailler avec lui mais, honnêtement, ça devenait trop difficile à gérer. Je ne regrette pas du tout de l’avoir embauché, mais c’était parfois épuisant car il voulait toujours créer, faire des choses. Et il ne respectait pas les règles… Quand il fallait passer commande pour la commune, il ne rentrait pas de bon de commande, il s'en foutait. On faisait beaucoup de choses à la dernière minute. Autant il était bouillant d’énergie et d’idées, autant il fallait souvent le freiner, vérifier qu’il ne dépasse pas les bornes."
L’époque mouscronnoise
À l’été 1996, Stéphane Pauwels rejoint donc l’Excelsior, récemment promu en première division belge, en tant que responsable commercial et marketing du club. C’est ce que l’on appelle être au bon moment au bon endroit, la saison 1996-1997 restant la plus belle de l’histoire du club, avec une troisième place au classement final, significative de qualification européenne. La faste période mouscronnoise est également marquée par l’émergence d’une bande de potes au sein du club. Fabrice Mestdagh, attaché de presse à l’époque et ami de Stéphane Pauwels, garde d’excellents souvenirs de cette folle période. "On était quasiment 20 heures sur 24 ensemble. C’était vraiment une belle équipe. Avec le speaker officiel de Mouscron notamment, nous formions une bande de copains. C’est ce qui a fait aussi la particularité du club. On allait bosser, mais on le faisait entre potes", explique l’ancien journaliste sportif.
Á l’époque déjà, le culot légendaire de Stéphane Pauwels n'est plus un secret pour personne. L’absence de diplôme dans le domaine ne l’empêche pas de réaliser quelques beaux coups pour le club de Mouscron. "Il essayait de signer un nouveau sponsor, et il avait rendez-vous avec le patron des cuisines Hans Verkerk. Avant d’y aller il m’avait dit ‘Fabrice, je joue ma place là…", relate Fabrice Mestdagh. "Au final ça s’est super bien passé", rigole-t-il. "C’était le plus gros contrat de sponsoring que Mouscron n’avait jamais signé de son histoire ! Le soir de la signature, il était au bar avec le patron des cuisines Hans Verkerk et il buvait des bières comme s’il le connaissait depuis 20 ans. Du Steph quoi !"
Fabrice Mestdagh reconnaît allègrement que son ami est "une grande gueule". "Il dit parfois tout au haut ce que certains ne pensent même pas tout bas. Il dit ce qu’il pense, même si ce sont parfois de grosses conneries. Mais c’est lui. Et contrairement à l’image qu’il peut donner, c’est quelqu’un de sensible et d’assez humain."

Troubles
La belle histoire à l'Excel dure trois ans. En 1999, Pauwels rejoint le club de Lille pour être attaché de presse. De fil en aiguille, il devient coordinateur sportif du club nordiste et homme de confiance de l’entraîneur, Vahid Halilhodžić. En 2003, il s'envole en Algérie, auprès de l’équipe nationale, en tant que directeur technique, et retrouve le coach Georges Leekens, qu’il avait côtoyé à l’Excelsior. Poursuivant son parcours de touche-à-tout, il revient en Belgique en 2004 et est nommé directeur technique du club de La Louvière. Bien qu'elle réalise, cette année-là, la meilleure saison de son histoire, La Louvière est en proie à de grosses difficultés financières et "Steph" est remercié. S’ensuit alors une sombre période pour le Mouscronnois, avec la révélation au grand jour de l’affaire des matchs truqués et de la mafia chinoise. La VRT, via son émission Panorama, cite Pauwels comme potentiel complice des agissements de la mafia alors qu’il travaillait pour le club louviérois. Bien que Stéphane Pauwels sera innocenté, cet épisode ternit son image.
La suite, ce sont ses passages par la RTBF, RTL-TVI et d’autres chaînes françaises de radio et télévision, où il n'hésite jamais à donner son avis tranché, quitte à se tromper, et à partir au clash. Ces nombreuses activités s'arrêtent brutalement suite à son arrestation, en août 2018, dans le cadre d’une enquête sur sa participation présumée à un home-invasion. Stéphane Pauwels est soupçonné d'avoir commandité la violente agression, à Ohain, de l'ex-petit ami de sa compagne de l'époque. Pour ces faits, le Mouscronnois est jugé pour complicité. Il seront 27 sur le banc des prévenus pour 26 dossiers d'agressions commises dans des habitations, entre 2015 et 2017, dans le but de dérober argent, voitures, bijoux... Le procès s'ouvre ce lundi au Lotto Mons Expo.