Douche froide pour les détenus, le modèle punitif va encore se durcir: “Ce qui est dit sur les visites carcérales est effrayant”
La politique carcérale portée par le ministre Van Quickenborne (Open VLD) désespère la section belge de l’Observatoire international des prisons.
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- Publié le 23-11-2020 à 20h43
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Des tours de vis et de la répression à tout va. Point. La politique carcérale du gouvernement Vivaldi, portée par le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne (Open VLD), c’est une nouvelle douche froide pour les détenus, se désespère la section belge de l’Observatoire international des prisons (OIP). “La levée de boucliers est générale sur le terrain comme dans le monde académique”, soutient Marie Berquin, co-présidente. “Mais l’heure est à la poursuite et au durcissement de méthodes qui n’ont jusqu’ici pas démontré leur efficacité”.
L’OIP pointe un déni scientifique “particulièrement inquiétant”. Dans aucune des réformes annoncées, le gouvernement qui veut, par exemple, condamner encore plus fermement la récidive ne semble prendre en compte les observations et recommandations des experts.
L’efficacité plutôt que la pertinence...
Ni sur l’inutilité d’étendre le nombre de prisons. Ni sur la nécessité de lutter contre l’inflation carcérale (en limitant, par exemple, les possibilités de placements en détention préventive). Ni sur “l’absence totale d’objectivation et de mesure de la récidive”. Sans parler de l’absence de volonté de réformer en profondeur le système pénal.
Rien de tout ça dans la note présentée par le ministre Van Quickenborne qui s’oriente plutôt vers un renforcement du modèle punitif, analyse l’OIP. Le gouvernement fait le choix de systématiser la réaction pénale et de la rendre plus rapide (“dans les deux mois”). Le modèle des comparutions immédiates, qui privilégie l’efficacité à la pertinence, est pourtant largement critiqué comme une justice expéditive, avec une sévérité accrue sans possibilité pour la défense de se préparer, souligne l’OIP.
L’humanité à la trappe
Concernant la détention, l’humain passe à la trappe. “Ce qui est dit sur les visites carcérales est effrayant”, juge Marie Berquin. Le gouvernement tire ainsi un bilan positif des expériences de visioconférences effectuées pendant le premier confinement : entre mars et septembre 2020, plus de 55 000 “visites numériques” ont déjà eu lieu dans 35 prisons, se félicite la note. La représentante de l’OIP s’indigne : “Il y a un problème dans cette phrase : le terme “visite” est totalement inapproprié. Les détenus ont été privés de leurs droits de visite! Le recours au numérique a été une solution de secours dans l’extrême urgence. Mais cela ne peut absolument pas remplacer les visites physiques essentielles aux détenus comme à leurs familles”.
Un autre projet donne froid dans le dos : la mise en place d’un système de responsabilité pénale partielle pour les auteurs de crimes qui auraient un affaiblissement de leurs facultés mentales mais pas au point que l’absence totale de responsabilité puisse être constatée. On arriverait ainsi à ce que des personnes présentant des troubles psychiques et/ou mentaux se retrouvent en détention. Cela ne fera qu’aggraver les situations de détresse psychique de ces détenus, accuse l’OIP : “Ce projet laisse aussi porter à la société le choix de réponses répressives envers ceux pour lesquels un parcours de soins serait de loin plus adapté”.
La priorité que veut se donner le gouvernement de construire rapidement des centres de psychiatrie légale abonde dans ce sens. C’est, ici encore, une option ultra-sécuritaire qui est privilégiée au détriment de logiques médicales, dénonce l’OIP.