”Avec la mafia albanaise et bulgare, si tu fais un pas de travers, t’es fini”
Cinq personnes ont été placées sous mandat d’arrêt, le 4 février, soupçonnées d’être impliquées dans un trafic international de stupéfiants opérant depuis Meise.
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Publié le 06-02-2023 à 18h29 - Mis à jour le 07-02-2023 à 09h35
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Les arrestations de trafiquants de stupéfiants sont devenues quotidiennes en Belgique. Surtout depuis la mise au jour des informations circulant sur Sky ECC (messagerie cryptée utilisée au sein de la criminalité organisée, NdlR) et décryptées en mars 2021 par la police belge. Plus de 1 200 personnes ont été arrêtées, près de 500 enquêtes judiciaires lancées ou enrichies et, surtout, plus d’un milliard de messages ont été interceptés.
Des messages qui, aujourd’hui encore, sont décortiqués par les enquêteurs, permettant la succession d’opérations et d’interpellations dans le milieu de narcotrafiquants en Belgique. Ce fut encore le cas le 4 février lorsque la police annonça plusieurs arrestations dans un réseau albano-bulgare qui opérait depuis Meise.
”Comme une famille”
À la suite de cette opération, onze personnes ont été interpellées, dont cinq placées sous mandat d’arrêt pour “participation à une organisation criminelle” a indiqué le parquet de Hal-Vilvorde. Plusieurs perquisitions ont été organisées, simultanément à Bruxelles (Evere, Saint-Gilles, Auderghem, Woluwe-Saint-Pierre et Schaerbeek), dans l’arrondissement de Hal-Vilvorde (Meise, Grimbergen, Diegem et Wezembeek-Oppem) et en Flandre orientale (Saint-Nicolas, Evergem et Alost). Douze armes à feu, 40 kilos de cocaïne (pour une valeur de près de 2 millions d’euros), 13 kilos d’héroïne et près de 100 000 euros en espèces ont été saisis.
L’enquête ciblant ce réseau a débuté fin 2021 lorsque le parquet de Hal-Vilvorde a ouvert, sur la base d’informations collectées lors de l’opération Sky ECC, un dossier sur un réseau albano-bulgare de dimension internationale actif dans le trafic de stupéfiants. Mehmet (prénom d’emprunt) a “travaillé” pour ce type de bandes et se dit “soulagé” par ces arrestations. L’homme, déjà condamné à de très nombreuses reprises pour trafics de stupéfiants, avoue avoir “rendu quelques services” pour le milieu. Aujourd’hui, il dit avoir changé de vie, mais se remémore encore avec frayeur ses fréquentations d’antan. “Ces gens me font peur encore aujourd’hui. Ils peuvent être très disponibles, très sympas, un peu comme une famille. Mais une famille qui ne te pardonne rien si tu ne files pas droit. Avec eux, ça rigole pas : si tu fais un pas de travers, t’es fini.”
Une organisation bien huilée
En Belgique, il est beaucoup question de la Mocro maffia (réseaux d’origine marocaine implantée surtout à Anvers et aux Pays-Bas) gravitant autour du port d’Anvers – principale porte d’entrée de la drogue en Europe. Mais les réseaux albanais et bulgares sont aussi dans le viseur des enquêteurs belges. A en croire Mehmet, s’y attaquer est cependant moins évident. “Moi j’étais personne, un clochard qui a trouvé l’occasion de sniffer contre un service ici et là, de la petite main-d’œuvre qu’on a probablement réussi à remplacer par un autre con qui n’avait pas le choix et s’est retrouvé, comme un con, à bosser pour des gros trafiquants. Mais au-dessus, ce sont des gens super bien organisés, comme on peut l’être dans des grandes entreprises style Google. La police ne les aura jamais. Ils sont trop forts. À la tête de ces clans, ils sont tellement propres sur eux qu’on ne va jamais soupçonner qu’ils trempent dans des histoires de drogues et de prostituées”, poursuit Mehmet, presque émerveillé.
Ce qui est certain, c’est que les coups de filets dans ces réseaux polycriminels (trafic de stupéfiants, proxénétisme et traite des êtres humains) ne sont pas très nombreux. Parmi les derniers gros poissons récemment interpellés, il y a principalement le Bulgare Evelyn Baneva et l’Albanais Naser Kelmendi.
Baneva, surnommé “le roi de la cocaïne” a été arrêté dans l’une de ses résidences en Ukraine en septembre 2021. Cet ancien lutteur reconverti en homme d’affaires était recherché par Interpol et avait été condamné, en Bulgarie, à 7 ans de prison pour blanchiment d’argent.
Kelmendi a lui été interpellé plus tôt, en 2013. Ce parrain de la mafia était notamment recherché par les États-Unis qui l’avaient placé sur “liste noire”, accusé d’être à la tête d’un des plus vaste réseaux de trafic d’héroïne et de cocaïne de la planète.