Procès des attentats: Hervé Bayingana, le logeur des deux terroristes fugitifs, a-t-il franchi la ligne rouge du terrorisme?
Converti, il a évolué dans un cercle radical. Avant de franchir la ligne rouge du terrorisme?
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Publié le 07-02-2023 à 20h41
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Son profil diffère des neuf autres accusés du procès des attentats du 22 mars 2016. Né en 1985 à Kigali (Rwanda), Hervé Bayingana Muhirwa est arrivé en Belgique à l’âge de 13 ans avec sa mère, ses frères et sa sœur. Sa famille est catholique pratiquante. À 16 ans, il commence à s’intéresser à l’islam. En 2011, il franchit le pas et se convertit.
Rapidement, il embrasse un islam dur. Il fréquente la mosquée Loqman de Molenbeek, connue comme un foyer de djihadisme. “Il semble engagé amicalement dans un réseau imprégné de radicalisme”, a relevé, mardi devant la cour d’assises, l’enquêtrice qui a synthétisé son parcours.
Et de fait, en 2015, plusieurs de ses fréquentations sont condamnées pour terrorisme. Parmi celles-ci, un de ses plus proches amis, Bilal El Makhoukhi. Ce vétéran du djihad, touché par un tir de sniper en Syrie, a perdu l’usage d’une jambe et est rentré en Belgique, où il est jugé dans le cadre du dossier Sharia4Belgium. Hervé Bayingana le conduit à Anvers pour son procès.
En janvier 2016, après avoir effectué quelques jobs d’intérimaire, Hervé Bayingana est engagé comme responsable de nuit dans un centre de demandeurs d’asile de la Croix-Rouge. Il trouve ce travail social gratifiant et s’y plaît. Personne ne décèle dans son comportement la moindre trace de radicalisme.
Une rencontre fortuite ?
À l’entendre, c’est à la mi-février 2016 qu’il rencontre – par hasard en rue – un des membres de la cellule. Najim Laachraoui, qui avait autrefois évolué dans le même groupe d’amis, avait été envoyé en Belgique au départ de la Syrie où il avait rallié les rangs de l’État islamique. Revenu en Belgique à l’automne 2015, Laachraoui, sous l’alias Soufiane Kayal, était depuis décembre 2015 l’objet d’un avis de recherche pour son rôle dans les attentats du 13 novembre à Paris.
Selon Hervé Bayingana, ils ont bu un verre. Ils auraient parlé “de tout et de rien”. Toutefois, dans un audio à son commanditaire en Syrie envoyé entre le 13 et le 15 mars 2016, Laachraoui mentionne l’arrivée d’un “frère de plus dans la logistique”, présenté par “Abou Imrane”, en qui les enquêteurs voient Bilal El Makhoukhi.
Dans un autre audio, envoyé la veille des attentats, Najim Laachraoui désigne cette nouvelle recrue sous le nom “d’Amine”, indiquant qu’il “nous a aidés”. Pour les enquêteurs, cet Amine est Hervé Bayingana. Mais ce dernier le nie.
Toujours est-il que le 15 mars 2016, alors que la cellule est aux abois après l’assaut de la rue du Dries, Hervé Bayingana avait hébergé chez lui, pour une nuit au moins, Mohamed Abrini et Osama Krayem, les deux terroristes qui renonceront à se faire exploser à Zaventem et à Maelbeek.
Sans planque après le 22 mars 2016, les deux fugitifs reviennent chez lui. À l’entendre, Hervé Bayingana, “sous le choc”, “tétanisé, “ne sachant pas quoi faire”, aurait alors fait le lien avec Laachraoui et les attentats. Il leur aurait demandé de partir mais, selon ses dires, les deux comparses revenaient sans cesse.
Le 8 avril 2016, les trois hommes, localisés grâce à l’adresse IP de l’ordinateur d’Hervé Bayingana utilisé par Osama Krayem pour contacter son frère en Suède, sont arrêtés.