La veuve d'une victime de Maelbeek livre un témoignage empli de colère : "C'est la première fois que je parle et que j'ouvre mon coeur"

La veuve d'Yves Ciyombo, tué dans l'explosion à Maelbeek, a livré mardi matin un témoignage empli de colère envers les accusés et les attentats du 22 mars 2016 au cours desquels elle a perdu son mari.

BRUSSELS, BELGIUM - FEBRUARY 13 : President Laurence Massart pictured during the continuation of the Assizes trial of the 22 March 2016 attacks with the investigating judges and detectives. In the double attack, first at Zaventem airport and then at Maelbeek metro station, a total of 32 people were killed. More than 340 were injured...February 13, 2023 in Brussels, Belgium, 13/02/2023 ( Photo by Bert Van Den Broucke / Photonews
La Présidente Laurence Massart photographiée lors de la poursuite du procès en Assises des attentats du 22 mars 2016 avec les juges d'instruction et les enquêteurs. (Photo by Bert Van Den Broucke / Photonews) ©BVB

"C'était toute ma vie et vous me l'avez enlevé", a-t-elle lancé devant la cour d'assises chargée de juger ces attaques, souhaitant aux accusés qu'ils "souffrent le plus possible".

Après le témoignage, il y a près de deux semaines, de la famille d'Yves Ciyombo, c'est son épouse qui est venue évoquer la perte de cet homme de 27 ans, père de leurs deux filles. Elle a expliqué avoir décidé en dernière minute de venir à la barre après avoir entendu les plaintes des accusés quant à leurs conditions de transfert et des fouilles à nu avec génuflexions auxquelles ils étaient soumis jusqu'il y a peu. "Cela m'a donné le courage de venir aujourd'hui."

"J'ai tenu à venir pour que mon mari ne soit pas juste un nom. Derrière ce nom, il y a une personne qui aimait la vie, positive, joyeuse, un vrai soleil", a-t-elle ajouté.

Le soir des attaques, cette juriste âgée aujourd"hui de 32 ans s'est rendue avec sa famille à l'hôpital militaire de Neder-over-Hembeek pour tenter de trouver des informations concernant Yves. "On nous a laissés à notre propre sort. J'étais en mode zombie. On ne ressent plus rien dans ces cas-là. C'était toute ma vie et vous me l'avez enlevé", a-t-elle lancé, pleine de colère et de larmes, se souvenant avec douleur de l'incertitude du moment.

"Ce jour-là, mon coeur était mort", a confié la jeune femme à propos du jour où elle a appris le décès de son mari. "Je n'ai plus rien ressenti pour personne. J'étais dans mon lit et je ne ressentais plus rien."

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Après les attentats, elle est restée cloîtrée, "muselée dans (s)on coin", de peur de souffrir, de ne "pas être entendue de toute façon", a-t-elle expliqué.

La témoin a décrit un mari et un père aimant, qui préparait des gâteaux pour ses filles de 3 et 4 ans à l'époque. "À chaque fois que c'est possible pour moi, je leur parle de lui, de ce qu'il aimait."

"Une chose que ces personnes-là ne pourront jamais nous enlever, c'est l'amour que l'on se porte à l'autre. Il me manque énormément et à mes filles aussi", a poursuivi la veuve d'Yves. Elle regrette plus que tout que ses filles n'aient jamais la chance de voir leur papa venir les chercher à l'école, qu'on leur ait enlevé la chance de vivre avec "un papa en or".

"Dans les pires moments, ma fille aînée a déjà dit qu'elle voudrait le rejoindre au ciel car elle ne veut plus vivre", a encore confié la trentenaire. La plus petite, quant à elle, ne se souvient plus vraiment de son père.

"J'ai délaissé mes filles pendant des années car je n'avais plus rien à leur donner", s'est-elle remémorée, évoquant une tentative de suicide ratée. "J'aurais aimé être à sa place. Lui, il aurait assuré sur tous les fronts, il aurait profité de la vie."

Assurant ne ressentir "aucune émotion pour les accusés", la jeune veuve a néanmoins souhaité devant la cour que le jury les condamne à "la peine maximale" et "qu'ils souffrent le plus possible". "Les vrais musulmans ne feraient jamais de mal à une mouche", a-t-elle ajouté, déplorant une "capacité de réflexion limitée" des accusés. "Je ne pense pas qu'on puisse commettre des actes pareils quand on a connu l'amour comme celui d'Yves et moi. Mais je pense qu'ils ne ressentent rien car, pour eux, on n'est que des mécréants."

Boule anti-stress en main, la trentenaire a reproché aux accusés d'avoir ôté "tous leurs droits" aux victimes décédées. "Je ne vous pardonnerai jamais. Je suis incapable de vous pardonner, alors que je sais que c'est mon salut."

"C'est la première fois que je parle et que j'ouvre mon coeur", a-t-elle conclu, la présidente de la cour lui répondant que c'est là "le début d'une nouvelle page". En sortant de la salle d'audience, elle dévisagera les accusés, les lèvres serrées.

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