"Peu importe qu’Osama Krayem ait renoncé, les attentats de Bruxelles ont eu lieu à cause de lui"
Le parquet fédéral plaide la pleine responsabilité du Suédois dans les attentats du 22 Mars. Malgré le fait qu’il a renoncé à la dernière minute à se faire exploser dans le métro bruxellois.
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- Publié le 31-05-2023 à 13h51
- Mis à jour le 01-06-2023 à 12h12
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Peut-on renoncer à se faire exploser dans le métro de Bruxelles et, en même temps, être pleinement responsable des attentats ? Oui, estime le parquet fédéral qui a défendu cette thèse mercredi, au deuxième jour de son réquisitoire devant la cour d’assises, au sujet d’Osama Krayem.
Le Suédois d’origine syrienne, né le 16 août 1992 à Malmö, est l’un des principaux accusés au procès des attentats du 22 Mars. Il a combattu en Syrie dans les rangs de l’État islamique. Il a été condamné à 30 ans de prison pour sa participation aux attentats de Paris. Volubile durant les auditions, il se retranche dans le silence et n’apparaît que rarement aux audiences. Mercredi encore, il était absent dans le box des accusés.
Pourtant, c’est lui qui a fait marche arrière, au matin du 22 mars 2016 dans la station de métro Pétillon, a laissé Khalid El Bakraoui poursuivre son effroyable route vers Maelbeek avec son sac rempli d’explosifs, puis est revenu à la planque de la rue des Casernes à Etterbeek où il a vidé dans la toilette le TATP qu’il devait faire exploser.
Le coursier de la cellule belge
Pour la procureure Paule Somers, “peu importe qu’il ait renoncé”, les attentats “ont eu lieu à cause de lui”.
L’homme n’est pas connu de la police belge et c’est donc lui qui est chargé par la cellule bruxelloise de faire les courses. Il va chercher un vélo d’exercice au Décathlon d’Evere pour l’amener à la planque de la rue du Dries à Forest. Mais il achète aussi les composants des futures bombes : les précurseurs, trois poubelles métalliques chez Blokker pour l’explosif de Zaventem, les grands sacs Karrimor utilisés à Maelbeek.
Les enquêteurs ont retrouvé en outre de nombreuses traces de son ADN dans les planques qu’il a fréquentées à Bruxelles : sur un ventilateur utilisé par les terroristes pour sécher le TATP, sur une boîte de boulons, sur une foreuse utilisée pour percer les poubelles métalliques. Selon le parquet fédéral, Osama Krayem est à la manœuvre. La veille des attentats, dans l’appartement de la rue Max Roos, il se brûle au visage, de même qu’un des frères El Bakraoui l’est à la cheville. Le TATP s’enflamme. Les terroristes jettent de l’eau sur lui. Tant d’eau qu’elle transperce le plafond des voisins d’au-dessous.
Osama Krayem reconnaît être allé chercher de la crème contre les brûlures chez le pharmacien, mais a nié durant ses auditions avoir participé à la confection des explosifs. “Ces questions m’énervent un peu et je vous dis et redis que je n’ai pas participé à la confection de ces bombes”, a-t-il dit aux enquêteurs.
Une formation aux explosifs en Syrie
Paule Somers rappelle que l’accusé a suivi une courte formation aux explosifs quand il était en Syrie. L’État islamique avait mis à profit son immobilisation (il avait été blessé) pour le former. Il avait même reçu la visite de Mohamed al-Adnani, le numéro deux de l’organisation, à la maison des blessés. Une rencontre qualifiée de “fortuite” par l’accusé.
C’est lui aussi qui, en pleine rue à Etterbeek, a raccordé une des deux batteries de la charge explosive que portait Khalid El Bakraoui, en chemin vers le métro Pétillon, le jour des attentats.
Tous des éléments à charge pour le parquet fédéral dont les douze jurés devront juger de la pertinence après avoir entendu les avocats de la défense.
”Pourquoi s’intéresser à Anvers ?”
Seul anglophone de la cellule selon les procureurs, Osama Krayem surfait en anglais sur les ordinateurs retrouvés dans les planques. L’enquête a révélé que des reportages en anglais ont été visionnés, sur la façon d’éviter les contrôles policiers, la manipulation d’un silencieux mais aussi sur le port d’Anvers. “Pourquoi s’intéresser à Anvers ? Pourquoi ? ”, s’interroge Paule Somers.
Le parquet fédéral émet l’hypothèse que les terroristes, à partir du moment où la cellule a été opérationnelle le 1er décembre 2015, étaient à la recherche des cibles. Le port d’Anvers, les centrales nucléaires, le 16 rue de la Loi, une école à Houthalen ont été googlés.
Osama Krayem a toujours considéré, dans ses auditions, que “la Belgique n’est pas un territoire de guerre” et que le vrai combat devait être mené en Syrie. Il se définit comme un “salafiste djihadiste”, un “soldat de Daech” poussé par la foi, prêt à “mourir” pour sauver des musulmans en Syrie (assaillis par d’autres musulmans, NdlR)
Mais, et c’est une contradiction notée par le parquet fédéral, il est aujourd’hui poursuivi en Belgique pour l’assassinat dans un contexte terroriste de 32 personnes à Bruxelles et Zaventem. Pour le parquet fédéral, il est l’un des coauteurs de ce double attentat du 22 Mars.