Des derniers mots contrastés au procès des attentats du 22 mars
Cour et jury délibèrent. L’arrêt sur les peines est attendu en fin de semaine.
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- Publié le 11-09-2023 à 21h12
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C’est la règle avant que les jurés ne partent en délibération, que ce soit sur la culpabilité ou sur la peine : les accusés peuvent adresser un dernier mot aux jurés. Cinq des sept accusés du procès des attentats du 22 mars ont profité de cette dernière tribune.
À l’issue de cette dernière prise de parole, le jury et la cour d’assises se sont retirés pour délibérer collégialement sur les peines à prononcer. L’arrêt motivé sur les peines devrait être prononcé d’ici la fin de cette semaine.
Les derniers mots de Salah Abdeslam, qui a réaffirmé qu’il n’était pas au courant des projets d’attentat pour le 22 mars 2016 et qui a partagé son impression d’être “diabolisé”, ont contrasté avec la demande de pardon de Mohamed Abrini, la prise de responsabilité de Bilal El Makhoukhi et la prise de conscience d’Ali El Haddad Asufi et d’Hervé Bayingana Muhirwa.
Osama Krayem, qui ne s’est pas exprimé durant tout le procès, a gardé bouche close. Sofien Ayari, qui avait été très long lors de son dernier mot avant la délibération sur la culpabilité, n’a rien voulu ajouter : “Je pensais que c’était la dernière fois que j’allais parler, alors j’avais tout dit en juillet”.
Mohamed Abrini, “l’homme au chapeau” qui a renoncé à se faire exploser à Zaventem, a été quelque peu brouillon, comme à l’accoutumée quand il a l’occasion de s’exprimer. ” J’aimerais dire aux victimes que je suis désolé, que je demande pardon pour tout ce qui s’est passé et ce qu’elles doivent subir”, a-t-il dit. Et d’ajouter, quelque peu maladroit : “Je suis encore plus désolé parce qu’elles ont été abandonnées par les autorités et par les assurances”. À côté de la demande de pardon, il a adopté un ton plus politique : “Il y a des millions de musulmans sur terre, il y en a toujours qui voudront instaurer un califat. J’ai peur qu’il y ait d’autres attentats. Il faut faire quelque chose pour que ça n’arrive plus. Il faut parler, j’ai peur qu’il y ait d’autres décisions hâtives”.
Refusant d’être “diabolisé” et vu comme “un symbole du djihad”, Salah Abdeslam a répété ne pas avoir participé aux attentats perpétrés le 22 mars 2016 à l’aéroport de Zaventem et à la station de métro bruxelloise Maelbeek, qui ont causé la mort de 35 personnes. Ce faisant, il s’est une nouvelle fois présenté en victime. “Je l’ai dit et je continuerai à le dire : je n’ai pas participé au 22 mars. Je ne connaissais pas le projet. Je subis un harcèlement juridique. C’est parce que je suis Abdeslam Salah, médiatisé et diabolisé. […] Tu deviens le symbole du djihad, t’es un terroriste”, a-t-il lancé.
Je ne connaissais pas le projet. Je subis un harcèlement juridique. C’est parce que je suis Abdeslam Salah, médiatisé et diabolisé. […] Tu deviens le symbole du djihad, t’es un terroriste.
”Ce que je voudrais, c’est qu’on me juge comme les autres. Les années passent, on se remet en question, on essaye d’être meilleur, mais on ne veut pas me donner ma chance, m’aider dans ce sens”, a-t-il poursuivi.
Les regrets d’Ali El Haddad Asufi
Ali El Haddad Asufi, un proche d’Ibrahim El Bakraoui, a toujours protesté de son innocence. Le jury ne l’avait pas entendu, le reconnaissant coupable de participation aux activités d’un groupe terroriste et d’assassinat dans un cadre terroriste. Ce verdict, a-t-il dit, fut pour lui “un coup de massue”. Mais, comme il le concède : “Maintenant, c’est gravé dans le marbre, je l’accepte”.
Et de faire son mea culpa au sujet de ce qu’il voit comme son aveuglement à l’égard d’Ibrahim El Bakraoui : “J’aurais dû me réveiller à un moment ou à un autre, j’aurais dû me poser les bonnes questions. […] Tous les jours dans ma cellule je me demande comment j’ai pu être aussi con, aussi aveugle”.
Deux prises de conscience
Bilal El Makhoukhi et Hervé Bayingana Muhirwa ont aussi reconnu leur responsabilité. “Tout ce que j’ai toujours refusé de voir : l’impact sur les victimes, sur leurs familles. Ici, je l’ai vu”. Et d’ajouter : “Je ne peux que me dire que j’ai ma part de responsabilité et je ne me trouve pas d’excuse”.
Hervé Bayingana Muhirwa dit aussi avoir pris conscience : “J’ai pleinement pris la mesure du mal que les victimes ont subi”. Et d’ajouter : “J’aimerais œuvrer à mon petit niveau pour quelque chose de meilleur”.