Les futurs trains de la SNCB sont trop bas par rapport à la majorité des quais: "Un non-sens total pour les personnes à mobilité réduite"
Actuellement, seulement 21 gares belges sur 546 remplissent les conditions décrites par la SNCB pour qu’une personne à mobilité réduite puisse s’y rendre en toute autonomie, soit même pas 4 %. Concrètement, pour qu’une gare soit entièrement accessible il faut : des ascenseurs ou rampe pour chaque quai, un rehaussement des quais, le placement de lignes podotactiles pour chaque quai, et au moins un automate accessible aux personnes en chaise roulante.
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Publié le 03-12-2019 à 17h00 - Mis à jour le 04-12-2019 à 13h56
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Actuellement, seulement 21 gares belges sur 546 remplissent les conditions décrites par la SNCB pour qu’une personne à mobilité réduite puisse s’y rendre en toute autonomie, soit même pas 4 %. Concrètement, pour qu’une gare soit entièrement accessible, il faut : des ascenseurs ou rampe pour chaque quai, un rehaussement des quais, le placement de lignes podotactiles pour chaque quai, et au moins un automate accessible aux personnes en chaise roulante.
Si ces 21 gares sont intégralement accessibles aux PMR et proposent aussi l’assistance personnelle (du personnel envoyé sur place pour aider une PMR à monter dans le train ou activer une rampe d'accès par exemple) afin de leur permettre de monter dans le train, 94 gares n’ont pas d’accessibilité intégrale, mais proposent une assistance. 70 gares ont l’accessibilité intégrale, mais pas l’assistance personnelle. Et 361 n’ont ni l’une ni l’autre.
Et la question de l'accessibilité est à prendre en considération quand on sait que cette problématique concerne un Belge sur trois. En effet, en Belgique, plus de 30 % de la population est considérée comme appartenant à cette catégorie. "Les difficultés de mobilité peuvent aussi bien être liées à l'âge, à la maladie, à un état provisoire (une femme enceinte, une personne chargée de commissions ou encore le simple fait de transporter des bagages), comme à un handicap temporaire ou définitif (la maladie, la cécité, une personne se déplaçant en béquilles ou chaise roulante)", détaille Mathieu Angelo, le directeur du Collectif Accessibilité Wallonie-Bruxelles (CAWaB).
De plus, face au vieillissement de la population, l'enjeu lié à la mobilité des personnes à mobilité réduite est devenu primordial.
"La SNCB a privilégié le plus de passagers possibles au détriment de l’accessibilité"
En janvier 2020, de nouveaux trains (commandés par la SNCB en 2015) vont être mis en circulation sur le réseau ferroviaire. Plus modernes et confortables, ces nouveaux trains à double-étage sont très attendus par les navetteurs.
Problème, ces trains flambants neufs ne seront pas exactement à la même hauteur que les quais. Chez nous, il faut savoir que 18% des quais sont à 76 cm (la hauteur que souhaite généraliser la SNCB sur le réseau par l'intermédiaire de travaux), 55% sont à 26 et le reste est à 55 cm.
Chaque M7 disposera d'une voiture multifonctionnelle à une hauteur de 62 cm. Il s’agit d’une moyenne entre une hauteur de quais de 55cm et de 76 cm, "soit la majorité de nos quais", précise Elisa Roux, porte-parole de la SNCB. Pour le CAWaB, ce choix relève d'un manque de réflexion autour de l'accès aux PMR
"Ils ont tablé entre les deux pour la hauteur des M7. Or, la plupart des quais mesurent 76cm et la SNCB vise à généraliser cette hauteur sur l’ensemble du réseau. La compagnie ferroviaire a donc privilégié le plus de passagers possibles au détriment de l’accessibilité. Le fait qu’il y ait deux étages compliquent la donne. Il faudrait en effet emprunter des escaliers pour monter dans les trains car les quais mesurent 75 cm et la hauteur du train est de 62 cm. Nous déplorons ce choix car cela va représenter des difficultés en plus pour les PMR", poursuit Mathieu Angelo.
"On ne parle pas que des personnes en fauteuil roulant"
La société ferroviaire mise donc sur l’assistance en gare. Problème, seulement 94 gares sont équipées, un chiffre qui devrait toutefois grimper à l’avenir. "Dans les pays voisins, comme la France ou l’Allemagne, on a fait le choix de l’accessibilité, avec des quais à la même hauteur que les trains mais ici, on mise sur l’assistance en gare. Pourtant, toutes ne disposent pas totalement accessible malgré que l’on propose une assistance, c’est donc un non-sens total pour l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite", précise-t-il.
Face à cet argument, la SNCB se défend en rappelant le service proposé, c’est-à-dire une personne du service B For You pour placer la rampe mobile. "C'est une assistance, possible gratuitement dans 132 gares, qui est de toute façon nécessaire pour que la personne à mobilité réduite puisse passer du quai au train, et ce, pour des raisons de sécurité. La voiture multifonctionnelle dispose d’emplacements suffisants et confortables pour les personnes en chaise roulante, et des toilettes adaptées", indique la porte-parole de la société ferroviaire.
Mais pour Victor, qui se déplace en fauteuil roulant depuis dix ans, ces quelques centimètres auraient pu faciliter son quotidien.
"Pouvoir monter de plein pied dans le train, avec une hauteur égale celle des quais et du train, cela aurait été plus facile pour tous. Et je ne parle pas que des personnes en fauteuil roulant, mais de toutes les personnes à mobilité réduite, comme les personnes âgées, les gens chargés de valises, les femmes enceintes ainsi que les mamans ou les papas avec poussette", confie-t-il.
Deux fois plus de gares seront accessibles aux PMR d’ici 2024
Lors de la dernière commission parlementaire consacrée à la mobilité, en réponse à une question parlementaire, le ministre de la mobilité François Bellot (MR) a donné quelques précisions sur l’évolution de l’accessibilité dans nos gares. "Il faudrait un milliard d’euros pour rendre accessible toutes les gares du pays. Actuellement, de nombreuses gares font l’objet de travaux, il est surtout question de mise à niveau des quais et d’accessibilité. Il y a encore, bien entendu, d’autres équipements".
Concrètement, un coordinateur accessibilité prendra ses fonctions le 1er janvier 2020, avec à sa tête une équipe d’experts, et devra mettre un plan stratégique pour améliorer l’accès des gares et des trains aux personnes à mobilité réduite. "Concernant notre coordinateur accessibilité, son rôle sera de s'occuper de l'accessibilité des personnes à mobilité réduite de façon transversale à toutes les directions (je n'ai pas plus de détails... si tu as besoin de plus, il va falloir attendre un peu... ) toujours dans notre soucis permanent d'améliorer l'accessibilité de nos gares aux PMR. C'est d’ailleurs une de nos priorités", explique Elisa Roux.
Si actuellement, 71 gares sont entièrement accessibles aux PMR et le but est de doubler ce chiffre d’ici 2025. Concrètement, cela signifie des investissements très importants dans l’infrastructure de gare. "La SNCB prévoit de rendre chaque année dix gares intégralement accessibles au cours de la période 2019-2022, en collaboration avec Infrabel. J’ajouterai ici que, quand on fait des travaux dans une gare, quels qu’ils soient, ils essayent de rendre l’ensemble de la gare accessible aux PMR et ce du trottoir jusqu’à devant la gare. Après, c’est l’affaire d’autres. La SNCB poursuivra l’analyse de sa politique des PMR au cours des prochains mois et y intégrera aussi l’offre d’assistance", a poursuivi le ministre de la mobilité.
Une décision que salue le CAWaB. "D’ici 2030, l’objectif est que 80 % des gares soient totalement accessibles aux navetteurs. C’est un très bel objectif. Actuellement, 71 gares sont accessibles et 246 le seront donc d’ici dix ans", rapporte Angelo.
"Le responsable de cette cellule sera dédié à 100 % à la coordination de l’accessibilité aux usagers sur le rail où il travaillera avec une équipe. Avant, il était seul et c’était bien le problème. C’est important que ce soit une chaîne de travail qui s’occupe de travailler sur le parcours du navetteur, du moment où il part de chez lui au moment où il pénètre dans le train, avec le passage aux communications données sur le web, aux guichets et à la bonne hauteur des quais. C’était indispensable qu’une personne pense à ce sujet de manière transversale".