De Wever: "Il faut vous préparer rapidement à la fin du pays !"

Faites vos jeux, rien ne va plus. Ou pas grand-chose... Samedi, un clash sans précédent jusqu’ici dans cette crise politique qui dit, enfin son nom, a éclaté entre le président de la N-VA Bart De Wever et la représentante du Parti socialiste à la table des négociations, Laurette Onkelinx.Réunion francophone avant la plénière Nouvelle plénière ce lundi dans un climat tenduEcolo et Groen! déposent une proposition sur la tablePolitic Twist, le blog politique décalé

Martin Buxant
De Wever: "Il faut vous préparer rapidement à la fin du pays !"
©BELGA

Faites vos jeux, rien ne va plus. Ou pas grand-chose... Samedi, les leaders des différentes formations politiques associées à l’exercice institutionnel en cours s’étaient retrouvés pour faire le point après les consultations royales de jeudi et de vendredi. Vite fait: on a rediscuté une énième fois du périmètre des "responsabilisations" à négocier, on s’est enfilé une portion de tarte et on a offert des roses rouges à la présidente des socialistes flamands, Caroline Gennez, pour ses 35 ans. Mais la fête a été gâchée. Un clash sans précédent jusqu’ici dans cette crise politique qui dit - enfin - son nom a éclaté entre le président de la N-VA Bart De Wever et la représentante du Parti socialiste à la table des négociations, Laurette Onkelinx.

Sous les yeux écarquillés des autres présidents de parti, ces deux-là se sont violemment opposés - notamment au sujet du sort de la Région bruxelloise. Excédée par la vision de la N-VA pour Bruxelles, la vice-Première ministre a fini par lâcher qu’elle ne croyait plus guère à une issue positive pour les négociations en cours et pour le pays :

- "Mais là, je parle pour Laurette!", a-t-elle fulminé....

- "Alors, il faut vous préparer rapidement à la fin du pays !", a répondu Bart De Wever devant des témoins médusés.

Ce à quoi Laurette Onkelinx a rétorqué:

- "Ne vous inquiétez pas, nous nous y préparons déjà. Et Bruxelles n’est pas à vendre"...

- Médusés, le Groen! Wouter Van Besien et la SP.A Caroline Gennez sont intervenus pour dire qu’ils n’étaient pas séparatistes...

- "Surréaliste", résume un participant de cette surprise party explosive. Qui ajoute : "On sait bien que quand Laurette dit: "Je parle pour Laurette", elle dit tout haut ce que tout le PS pense tout bas"...

Et dimanche ? Rebelote. Une réunion associant techniciens et politiques s’est déroulée dans l’après-midi en l’absence d’Elio Di Rupo. Wouter Beke (CD&V) et Bart De Wever (N-VA) étaient les seuls présidents de parti présents. Laurette Onkelinx (PS), Jean-Marc Nollet (Ecolo) et Melchior Wathelet (CDH) représentaient les trois partis francophones. Là, lors d’un tour de table consacré à la révision de la loi de financement, Philippe Muyters (N-VA) a remis sur la table l’idée d’une régionalisation de l’impôt des personnes physiques. "Pour nous, a-t-il dit, il serait bon de passer d’un système de subvention à un système clair et transparent permettant aux entités fédérées de percevoir les impôts. Ce qui, a-t-il complété, n’exclut pas qu’une certaine forme de solidarité continue entre les entités fédérées." Coup de bambou chez certains négociateurs francophones qui voient là une ligne rouge franchie par les nationalistes flamands. "Régionaliser l’IPP, c’est clairement mettre à mal la solidarité interpersonnelle !, se fâche un francophone. Cela va, en outre, créer des distorsions dans le marché du travail entre entités fédérées, ainsi qu’une concurrence fiscale entre Régions !" Bref : intolérable... D’autres francophones, pourtant, tempèrent : "On ne va pas casser la baraque parce que la N-VA a répété son programme lors d’un tour de table à une réunion dominicale"...

Il apparaît aujourd’hui que la N-VA s’était engagée auprès du préformateur Elio Di Rupo à ne pas réclamer de régionalisation de l’IPP. Mais les nationalistes flamands reviennent à présent sur cet engagement car ils estiment que les transferts de compétences négociés jusqu’ici sont largement insuffisants (allocations familiales, emploi, soins de santé...)

Donc, les deux piliers de la négociation - le PS et la N-VA - ne se font plus guère confiance. A la N-VA, on flaire le piège, le guet-apens, voire le "coup monté". "C’est au jeu de celui qui réussira à faire partir la N-VA de la table des négociations ou à la faire rentrer bredouille de la négociation", se désespère une source flamande. Côté francophone, on dit : "Il y a des éléments qui n’entrent pas dans le périmètre de ce que nous sommes prêts à négocier. La régionalisation de l’IPP en fait partie. Point."

Quoi d’autre, docteur ? Ecolo et Groen! ont mis sur la table une demande de responsabilisation environnementale des entités fédérées (lire ci-contre). Et ce lundi (roulement de tambour), une nouvelle session plénière (avec les sept présidents de parti) doit avoir lieu. Au menu (notamment) : Bruxelles et la scission de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. "Dans le contexte actuel, il ne faut pas être un grand devin pour savoir que personne ne va présenter de larges concessions", pointe un négociateur. Le préformateur Elio Di Rupo présidera ces réjouissances politico-institutionnelles.

Et il n’y a plus d’anniversaire à fêter.


CD&V. Le père de la loi de financement, Eric Kirsch, un haut gradé de la planète CD&V, avait été repêché par Yves Leterme comme chef de cabinet il y a quelques mois au départ de Hans D’Hondt vers le ministère des Finances. Là, le Premier ministre lui a notamment confié comme mission de plancher sur une révision de la loi de financement - ce qu’il n’a pas eu le temps de faire puisque le gouvernement Leterme est tombé. Dans les années ‘80, Eric Kirsch était considéré comme l’un des "Toshiba-boys" de Jean-Luc Dehaene, ces "cabinettards" qui, armés de leurs ordinateurs portables de la marque japonaise, avaient élaboré les modèles de la loi de financement des différents niveaux de pouvoir et redessiné la Belgique en 1993 lors des accords de la Saint-Michel. Aujourd’hui, Eric Kirsch est étroitement associé aux réunions techniques par le CD&V alors que la N-VA a exigé une refonte fondamentale de la loi de financement.

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...