Willy Borsus: "Un plan A wallon, avec A comme action"
Rudy Demotte, Jean-Marc Nollet, André Antoine : les chefs de file PS, Ecolo et CDH du gouvernement wallon ont confié à "La Libre" leurs soucis et espoirs de rentrée politique. Voici venu le tour de l’opposition. Le ton est tout autre.
Publié le 13-09-2012 à 04h15 - Mis à jour le 13-09-2012 à 07h12
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Entretien Rudy Demotte, Jean-Marc Nollet, André Antoine : les chefs de file PS, Ecolo et CDH du gouvernement wallon ont confié à "La Libre" leurs soucis et espoirs de rentrée politique. Voici venu le tour de l’opposition. Le ton est tout autre. "Nous tirons la sonnette d’alarme. Il y a un gros problème de fonctionnement de ce gouvernement. Il est paralysé par ses querelles intestines, nombreuses et à répétition", lance d’emblée Willy Borsus, chef de groupe MR au Parlement wallon et vice-président du Mouvement ; "ce n’est pas en enjolivant les chiffres et en s’abstenant de prendre les décisions stratégiques que seront apportées les réponses aux efforts à faire dans le déploiement socio-économique wallon".
Vouloir évaluer le plan Marshall, vouloir baliser l’horizon à dix ans, ce ne serait donc pas une bonne politique ?
Plus que jamais, on a besoin de choix, d’une vision, d’actions immédiates. Mais derrière son annonce, l’"Horizon 2022" du gouvernement wallon tient aujourd’hui sur son site en un feuillet. Sa première mesure est annoncée pour 2013. Rappelons aussi des déclarations fortes qui ont précédé le "séminaire" de Tournai. Un : M. Nollet voulait mobiliser les réserves considérables des outils financiers wallons. Une réplique de la FGTB plus tard, le sujet est enterré. Deux : le CDH a enflammé le débat sur l’équilibre entre les réseaux. Rien n’a suivi. Enfin, je suis choqué par l’annonce faite d’un dégagement de 370 millions pour le plan Marshall en 2013 ; le ministre du Budget les avait déjà officiellement annoncés lors du dernier ajustement !
Reste qu’il faut bien “faire avec” la crise, avec les futures nouvelles compétences, avec le futur nouveau financement…
Se pencher sur la situation socio-économique wallonne, c’est une bonne idée. Elle en a bien besoin, parce que les principaux paramètres sont alarmants. L’indicateur de croissance du PIB par habitant maintient la Wallonie en queue des régions comparables : à 78 % de la moyenne UE à 15 pays, à 86 de la moyenne UE à 27. Le chômage repart à la hausse, grosso modo au double du chômage en Flandre : 16,5 % de la population active, contre 7,9. Quant au Budget, le ministre Antoine a dit qu’il était confronté à une enquête d’Eurostat. Ce n’est pas anodin : l’Europe s’intéresse à notre réalité comptable.
Jusque-là, n’est-ce pas devenu habituel ?
Je n’en tire aucune conclusion. Mais l’Institut des comptes nationaux, lui, continue à établir des différences significatives, au détriment de la Région wallonne, avec les chiffres de solde négatif avancés par le ministre. L’écart entre ceux-ci et l’ICN est de 548 millions en 2009, 169 en 2010, 133 en 2011. Quant à l’endettement, le ministre l’évalue à 5,65 milliards et l’ICN, à 8.
Sur l’Horizon 2022, le MR n’a tout de même pas refusé la main tendue par Rudy Demotte…
Parce que nous sommes ouverts à un travail prospectif, à une vraie expertise externalisée. Mais notre réalité, ce sont 11 plans successifs. La Wallonie doit détenir le record du monde des conceptions de plans Or, quel est le ressenti de la population ? Votre dernier "baromètre" indique que la majorité Olivier est désavouée après trois ans de travail : PS, CDH et Ecolo ont ensemble 57 % d’intentions de vote contre 67 % de voix aux élections régionales de 2009. Ce n’est pas encore l’impopularité de Hollande, mais le ressac est significatif.
Le MR veut bien adhérer à une telle dynamique prospective, à la condition d’accorder les priorités à la gouvernance, à l’innovation technologique, à la formation, aux défis démographiques… N’est-ce pas très proche du menu gouvernemental, tout ça ?
A de grosses nuances près ! La première, c’est que nous souhaitons toujours un audit sur l’état effectif des finances régionales. Comment projeter une relance dans l’avenir si on ne définit pas rigoureusement les moyens dont on va disposer ? Deuxièmement, nous voulons porter rapidement des réformes de structure, qui rationalisent les institutions et outils de gouvernance publique. Et puis, s’il est vrai que nous rejoignons certains objectifs du gouvernement, il n’y a plus un jour à perdre. Or, ce gouvernement est usé prématurément.
Propos classique d’opposition, non ?
J’illustre mon propos par un exemple, puisé dans les deux derniers gouvernements réunis avant les vacances. A la réunion du 12 juillet, 96 points étaient à l’ordre du jour ; 33 (un tiers !) ont été reportés, un a été retiré, un a disparu. A celle du 19 juillet, sur 116 points inscrits, 22 ont été reportés, un a été retiré, 11 ont disparu.
N’est-il pas plus utile à la Wallonie d’évoquer son Horizon à 2022 plutôt que quelque fumeux plan B ?
En 2012, notre plan ne doit pas être B mais A, avec A comme action. La meilleure façon de "rendre service" au débat de 2014 et à l’avenir des Wallons, c’est de se mettre à la tâche aujourd’hui. Pas dans la symbolique, pas dans les images. L’exercice, lundi, de la "présentation" au Premier ministre de la méthodologie 2022, ce n’est plus de la communication, c’est de l’incorrection!
N’y a-t-il pas du dépit dans le message du MR, pour n’avoir pas pu détricoter la majorité Olivier à l’occasion de la sortie de crise fédérale, courant 2011 ?
Non, non ! Personne n’a cru un instant chez nous, et personne n’a demandé d’ailleurs, que l’on vienne ajouter un remaniement dans les entités fédérées à une crise exceptionnellement longue au niveau fédéral. Ce ne fut un élément ni de condition, ni de négociation. Notre déception, vive, est d’une autre nature. L’Olivier, à son départ, était censé ouvrir une nouvelle ère pour la Wallonie. Comment aujourd’hui espérer son sursaut ?