Affiches électorales: les appellations d’origines

Réveil, Défi, Entente, Proximité, Autrement, Oxygène, Renouveau C’est quoi, cet inventaire à la Prévert ? Pardi, la singularité la plus répandue des élections communales, et de celles-ci seules : le recours à des appellations locales spécifiques pour une partie des listes qui se présentent à l’heureux électeur.

Paul Piret
Affiches électorales: les appellations d’origines
©Johanna de Tessières

Réveil, Défi, Entente, Proximité, Autrement, Oxygène, Renouveau... C’est quoi, cet inventaire à la Prévert ? Pardi, la singularité la plus répandue des élections communales, et de celles-ci seules : le recours à des appellations locales spécifiques pour une partie des listes qui se présentent à l’heureux électeur.

Il y a là deux cas de figure.

Ou bien les candidats d’une liste ne se revendiquent d’aucun parti en place. Forcément, ils se chercheront une enseigne qui leur est propre. C’est surtout vrai dans les communes plus petites et rurales; c’était plus vrai encore avant les mouvements de fusion qui ont contribué à politiser davantage, au sens structurant, les personnalités locales.

Ou bien des candidats se revendiquent d’un parti, serait-ce à intensité variable : mandataires, affiliés, sympathisants. Pour autant, ils ne renvoient pas explicitement à leur formation. Pourquoi ça ? Deux scénarios encore.

Soit ils ne veulent pas y recourir : cachez-moi ces sigles que l’on ne saurait voir Parce qu’ils ne les trouvent pas très porteurs sur le moment (on a ainsi vu des abandons de "PS" entre 2000 et 2006, en ces temps d’"affaires" pour le parti); parce qu’ils souhaitent s’affranchir de leur appartenance sur leurs terres (quitte à s’en revendiquer dans d’autres cénacles - provincial, régional ou fédéral); parce qu’ils préfèrent jouer sur leur notoriété propre (le cas classique des "listes du bourgmestre" et leurs variantes); parce qu’ils préfèrent user d’une appellation qui situe mieux l’enjeu local (les appellations qui se réfèrent à la dénomination de leur commune)

Ou alors, ils ne peuvent pas s’en revendiquer. C’est lorsqu’ils ouvrent leur liste à des candidats qui, eux, ne sont pas "partis politiques". Ou lorsque leurs propres partis les en empêchent (dissidences, rivalités du même bord, reproches d’indiscipline, etc.). Ou lorsque se forment des cartels qui, à défaut d’appellation spécifique, devraient se présenter sous une enfilade de sigles pas très commode.

Dans tous les cas, le phénomène est répandu. Et cette ampleur ne paraît pas varier énormément de 6 en 6 ans. La disparité joue plutôt entre formations.

Voyons ça pour les quatre grands partis francophones, dans leurs sigles actuels. Sur les 262 communes wallonnes, Ecolo s’est présenté en 2000 sous son numéro national dans 186 cas; le PS, dans 154; le MR, dans 88; le CDH, dans 59. En 2006, ces chiffres respectifs furent 147, 133, 81 et 82. Cette fois, Ecolo aligne 157 fois son numéro commun sur 207 participations revendiquées; le PS, 128 fois pour 251 participations; le MR, 89 fois sur 260; le CDH, 69 fois sur 255. Aucune de ces quatre formations ne se présente sous un numéro régional dans 70 communes sur les 262 (elles étaient 68 en 2006). (1).

Ces chiffres n’intègrent pas les cas - pas nombreux - de mentions explicites des sigles du parti accolées à d’autres en cartels, que ces autres se présentent sous les sigles de partis associés ou sous des appellations locales. D’autre part, il peut y avoir quelques différences d’un scrutin à l’autre dans les couvertures de participation des formations. N’empêche, des constats sont possibles.

D’abord, une césure entre Ecolo et le PS d’une part, le MR et le CDH d’autre part, dans le taux d’utilisation des sigles du parti, bien plus élevé chez les deux premiers. Ensuite, entre ceux-ci, un recours proportionnellement toujours plus massif à son appellation chez Ecolo. On le doit à son émergence plus récente, à une "culture maison" moins portée sur les personnalités, à un ancrage local moins affirmé. Par ailleurs, le recours au sigle commun décroît chez les humanistes alors que, de 2000 à 2006, le changement d’appellation de PSC en CDH avait à l’inverse dopé le label, passé de 63 à 91 citations, singulièrement dans les communes bruxelloises. On n’avait pas enregistré de phénomène similaire chez les libéraux, pourtant transformés au même moment de PRL en MR. C’est cette fois qu’il y a croissance des "MR"; n’écartons pas que ce soit guidé par le souci de sûrement se démarquer du FDF avec lequel la rupture a été consommée entre-temps.

Les plus petites formations, elles, se présentent beaucoup plus souvent sous leurs sigles. Logique : elles sont souvent plus rétives à s’associer (et d’ailleurs plus exposées à la fragmentation de leur courant, ainsi dans l’extrême droite); et c’est le biais le plus simple pour tenter d’asseoir leur notoriété encore faible.

(1) Chiffres pour la plupart empruntés au "Courrier hebdomadaire du Crisp" consacré à "La préparation des élections communales et provinciales du 14 octobre 2012" (nos éditions de lundi).


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