Taxes, soins de santé, voitures de société, etc. : voici ce qui va changer après l'accord sur le budget
Comme prévu, l'effort budgétaire s'élèvera à 3 milliards d'euros et représentera 1,2% du PIB pour les années 2016 et 2017. Malgré la crise de cette semaine, Charles Michel reste confiant en l'avenir de sa coalition. Détails des mesures prises.
Publié le 15-10-2016 à 09h20 - Mis à jour le 15-10-2016 à 21h52
:focal(465x240:475x230)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/X4OKOZ2GGNAL7PMMZQ4VTABITE.jpg)
Le Premier ministre et les vice-Premiers ministres du gouvernement fédéral ont approuvé vendredi soir le budget ainsi qu'une série de réformes structurelles. Le travail se poursuivra toutefois sur la réforme de l'impôt des sociétés, la taxation des plus-values et la façon d'encourager l'investissement dans les PME et les jeunes entreprises.
Comme prévu, l'effort budgétaire s'élèvera à 3,006 milliards d'euros et représentera 1,2% du PIB pour les années 2016 et 2017. L'objectif de retour à l'équilibre (structurel) dès 2018 est confirmé. Une provision conjoncturelle sera constituée pour un montant de 679 millions d'euros.
Après la tempête... une prochaine tempête?
Le Premier ministre reconnaît que ces derniers jours ont été "particulièrement difficiles" pour sa coalition gouvernementale. Cependant, il dit rester "optimiste et confiant en l'avenir de ce gouvernement, car ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous divise!".
Tous les vice-premiers remercient et soulignent "le calme et l'énergie de Charles Michel pour permettre de décrocher cet accord budgétaire" malgré la tempête politique de ces derniers jours. Les discussions autour des plusieurs réformes structurelles feront l'objet d'une prochaine vague de négociations. Le Premier dément que ce décalage serve à éviter ou retarder une crise majeure de sa coalition.
ACCORDS CONCLUS SUR :
- Le précompte mobilier passe de 27 à 30% (exception pour les comptes d'épargne qui ont des taux préférentiels) au 1er janvier 2017.
- La taxe sur la spéculation sera supprimée dès le 1er janvier 2017, car ses effets sont négatifs sur les recettes de l'Etat
- Le tax-shift est consolidé
- Les plafonds de la taxe sur les opérations boursières (TOB) seront doublés (actuellement entre 650 et 2000€ en fonction du produit) dès le 1er janvier 2017. Extension aux plates-formes étrangères.
- Les travailleurs pourront renoncer à leur voiture de société pour augmenter leur salaire poche, sans impact financier, "Liberté de choix" précise le Premier ministre. Une mesure qui coûtera 100 millions aux employeurs, mais qui serait compensé par d'autres mesures favorisant la mobilité.
- Economie de 900 millions d'euros sur les soins de santé, le prix de certains antibiotiques va augmenter et les médicaments les moins chers davantage prescrits par médecins (60%)
- Nouvelle augmentation du boni de liquidation (27% actuellement), soit la taxation de l'excédent de capital lors de la vente d'une entreprise à un nouvel actionnaire.
- La flexibilité du marché du travail (mesures à préciser)
- La loi de 1996 sur la compétitivité des entreprises
- L'évolution des salaires bruts
- L'e-commerce (40 mio)
- 85 millions d'euros supplémentaires pour la Justice (terrorisme)
- La réforme des hôpitaux sera accélérée
- Renforcement de la lutte fiscale
CE QUI NE BOUGERA PAS :
- Le pouvoir d'achat des travailleurs et des allocataires sociaux
- Pas de modification de l'index
- Pas d'adaptation des allocations de chômage
- L'indexation des salaires
- Pas de hausse des accises
- Les taux de la TVA
- Le revenu réel des chômeurs de longue durée ne sera pas contrôlé
CE QUI DEVRA ATTENDRE :
- La réforme de l'impôt des sociétés préparée depuis plusieurs mois par le ministre des Finances était censée accompagner le budget. Le gouvernement veut "conjuguer l'efficacité économique et l'équité fiscale".
- S'il s'engage à poursuivre l'examen de cette refonte chère à la N-VA et considérée en juillet comme l'un des chantiers prioritaires de 2017, il devra également examiner les propositions sur la taxation des plus-values, réclamée par le CD&V, et la mise en place de mesures pour encourager l'investissement dans les PME, l'agenda numérique et les jeunes entreprises, sorte de loi "Cooreman-De Clercq" voulue par l'Open Vld.
La réforme de l'Isoc et la taxation des plus-values seront couplées, précisait une autre source. "Dans le cadre d'une fiscalité équitable, la cohérence de ces deux dossiers est essentielle. On ne peut pas aborder l'un sans l'autre. Nous nous dirigeons ainsi vers une politique juste, où chacun contribue", ont déclaré les chrétiens-démocrates dans un communiqué.
Le vice-premier ministre N-VA, Jan Jambon a reconnu que le travail sur l'Isoc serait poursuivi, tout en précisant que son collègue Johan Van Overtveldt avait déjà accompli un travail considérable et que la réforme se déroulerait de toute manière en trois phases.
La déclaration de politique générale devant la Chambre aura lieu - exceptionnellement - ce dimanche.
Le budget sera déposé à la Commission européenne dans les délais impartis
La ministre fédérale du Budget Sophie Wilmès se félicite de l'approbation du budget intervenue vendredi soir. "L'accord conclu ce soir nous permettra de déposer le draft budgetary plan 2017 à la Commission européenne dans les délais impartis", annonce la ministre vendredi soir dans un communiqué de presse adressé à l'agence Belga. "Je me réjouis de l'accord trouvé au sein du gouvernement tant au niveau budgétaire qu'au niveau des réformes structurelles", stipule Mme Wilmès.
"Afin de rencontrer les prescrits européens d'amélioration du solde structurel d'ici 2017, le gouvernement a travaillé sur la base d'un effort de 3 milliards d'euros. Une grande partie de cet effort concerne des mesures déjà décidées et pas encore implémentées", précise-t-elle.
Le Premier ministre et les vice-Premiers se sont accordés vendredi soir sur le budget fédéral ainsi que sur une réforme du marché de l'emploi. Ils ont également validé des textes de loi relatifs à la loi de 1996 sur la compétitivité des entreprises et l'évolution des salaires bruts, ainsi qu'à l'e-commerce.
Plusieurs responsables du gouvernement ont annoncé l'accord sur Twitter.
Traduction : Budget OK, recettes tampon OK, plus de taxe sur la spéculation, un marché du travail plus flexible, une compétitivité renforcée. A l'impôt sur les sociétés maintenant !
Traduction : Tourné vers l’avenir budgétaire : budget, plus de liberté sur le marché du travail, des impulsions pour une nouvelle économie et des soins de santé décents.
Le gouvernement vise une amélioration du solde structurel d'1,1% en 2017
Le gouvernement doit améliorer le solde structurel de 0,6% par an pour répondre aux impératifs européens. L'accord budgétaire conclu vendredi prévoit une amélioration du solde structurel de 1,2 % en 2016 et 2017. Concrètement, il s'agit de 0,1% en 2016, soit 307 millions d'euros (on est presque à la fin de l'année), et 1,1% en 2017, soit 2,3 milliards d'euros. L'an prochain, le gouvernement prévoit une réserve de 739 millions d'euros liée à l'évaluation des rentrées fiscales. Des corrections techniques ont été retenues à hauteur de 200 millions d'euros. L'effort porte sur 1,1 milliard d'euros de mesures qui avaient déjà été décidées mais pas encore exécutées (dont 700 millions d'euros en dépenses de santé). Les nouvelles mesures atteignent 1,8 milliard d'euros, dont 666 millions d'euros en dépenses sociales, 307 millions d'euros dans les dépenses primaires et 592 millions d'euros dans les recettes fiscales (notamment 100 millions d'euros visant les employeurs sur les cartes essence). Les départements d'autorité sont préservés.
Le solde nominal 2016 reste sous la barre fatidique des 3% alors que le taux d'endettement reste au-dessus des 100% du PIB.
Le gouvernement maintient l'objectif de retour à l'équilibre en 2018, que défend ardemment l'Open Vld.
Déclaration gouvernementale dimanche à 12 heures à la Chambre
La Premier ministre Charles Michel viendra présenter dimanche à midi la déclaration de politique générale du gouvernement à la suite de l'accord budgétaire intervenu vendredi soir. Le site de la Chambre indique que le même jour, à 11h30, se tient une conférence des présidents pour la planification du débat et du vote de confiance. Traditionnellement, le débat sur la déclaration intervient le lendemain, le vote de confiance au gouvernement ne pouvant lui intervenir moins de 48 heures après la déclaration. En principe, le débat devrait donc se tenir lundi et le vote de confiance intervenir mardi vers 13 heures.
Il est peu courant que la Chambre se réunisse le dimanche, encore moins pour entendre la déclaration gouvernementale. Le Premier ministre Charles Michel qui a fait cette proposition y voit une forme de "flexibilité" chère aux réformes qu'il met en place. Dans l'opposition, le chef de groupe Ecolo Jean-Marc Nollet a fustigé la démarche. "Vraiment n'importe quoi. Ce n'est plus un gouvernement, c'est une ligue d'impro...", a-t-il réagi sur Twitter.
Fin progressive des régimes spéciaux de pension à la SNCB et chez les militaires
A partir de l'année budgétaire 2018 entrera en application la fin programmée des régimes spéciaux de pension dont bénéficiaient le personnel roulant de la SNCB et les militaires. Cela signifie que le personnel roulant de la SNCB, aujourd'hui admissible à la pension à l'âge de 55 ans, verra progressivement ses droits reportés à 63 ans à l'horizon 2030. De la même façon, les conditions de carrière passent de trente années actuellement à 42 ans en 2030. En 2018, la limite sera fixée à 57 ans d'âge et 38 ans de carrière.
Même opération pour les militaires. La mise en pension d'office à 56 ans sera supprimée à partir du 1er janvier prochain. Les militaires qui souhaiteront poursuivre leur activité pourront le faire moyennant l'accord de leur employeur. En 2018, l'âge minimum de pension sera porté à 57 ans, puis progressivement à 63 ans en 2030. Les conditions de carrière passeront à 38 ans en 2018 puis progressivement à 42 ans en 2030.
Tant pour le personnel roulant de la SNCB que pour les militaires, il sera toujours possible de partir en 2030 avant l'âge de 63 ans en cas de carrière longue ou de reconnaissance de pénibilité.
Les syndicats ont d'ores et déjà réagi. Du côté de la Défense, le SLFP indique qu'il "n'acceptera jamais que l'âge de la pension soit rallongé d'un trait de plume". Selon le syndicat libéral, "l'engagement au risque de sa propre vie, la loyauté, l'intégrité... ne sont pas des clichés mais des valeurs-clés et une réalité". Il invite le gouvernement à tenir compte de cette réalité et à se montrer "ouvert à une transition juste pour les militaires qui s'engagent depuis des décennies pour la sécurité et la protection de notre démocratie".
Du côté de la SNCB, les syndicats ne sont pas surpris par le fond de mesures qui étaient dans l'air mais par la célérité de leur mise en oeuvre. Ils s'attendent à une réaction de la base.
Les pensions complémentaires généralisées à tous les travailleurs dès 2018
Dès 2018, tous les travailleurs pourront se constituer une pension complémentaire même si leur employeur ne le leur offre pas cette possibilité. Cette mesure, un des chevaux de bataille du ministre compétent Daniel Bacquelaine (MR), était attendue depuis longtemps mais le gouvernement fédéral ne l'a toutefois rendue concrète que lors des dernières négociations budgétaires. Actuellement, un salarié ne peut se constituer une pension complémentaire du deuxième pilier que dans le cas où son employeur lui offre une telle opportunité. A partir du 1er janvier 2018, tout travailleur pourra, de sa propre initiative, faire entrer une partie de son salaire en ligne de compte pour une telle pension complémentaire. Il déterminera librement le montant de cette retenue, dans certaines limites. Les avantages fiscaux seront les mêmes que ceux applicables aux régimes de pension complémentaire instaurés par les employeurs.
Les salariés se trouvant déjà dans ce système pourront, quant à eux, économiser davantage.
Le ministre des Pensions pense que les employeurs seront tout de même encore motivés à proposer à leurs salariés de constituer une pension complémentaire. "C'étaient surtout les rendements élevés garantis qui les décourageaient. Cette barrière a été supprimée depuis que nous avons fait un ajustement de sorte que la garantie de rendement est adaptée aux taux d'intérêt", explique son porte-parole. La faiblesse de ces taux ces derniers temps avait rendu le système difficile à soutenir. Les partenaires sociaux avaient finalement adapté ce mécanisme l'an dernier.