Pacte sur les migrations de l'Onu : la N-VA est isolée mais Charles Michel temporise encore
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- Publié le 22-11-2018 à 14h12
- Mis à jour le 23-11-2018 à 09h52
Moment de solitude, jeudi, pour Peter De Roover. Lorsqu’il a conclu son intervention, lors de la séance plénière hebdomadaire de la Chambre, seuls quelques députés l’ont applaudi. Ceux de son groupe, la N-VA. Forcément. Et ceux du Vlaams Belang (extrême droite)… Ses partenaires du gouvernement - MR, CD&V et Open VLD - sont, eux, restés de marbre, alors que, à l’inverse, ils ont énergiquement applaudi les interventions de leurs autres collègues de la majorité.
La séance de jeudi a confirmé que la N-VA est totalement isolée sur la question de l’approbation du Pacte sur les migrations de l’Onu, un texte qui définit des bonnes pratiques en matière de gestion des flux migratoires au niveau mondial. En septembre dernier, le Premier ministre Charles Michel (MR) avait assuré à la tribune des Nations unies que la Belgique l’approuverait. Sauf que, deux mois plus tard, la N-VA a exprimé tout son scepticisme et laissé entendre qu’il n’en voulait plus. Au sein de l’hémicycle, l’ensemble des familles socialiste, libérale, centriste et écologiste ont confirmé, jeudi, que, pour leur part, elles soutiennent le Pacte.
Démocrates contre populistes
"Dans quel camp êtes-vous : celui des démocrates ou celui des populistes et de l’extrême droite ?", a demandé Catherine Fonck (CDH) au Premier ministre, résumant les propos de l’opposition. Dans l’entourage de Charles Michel, on assure en off que celui-ci compte bien signer le texte lors du sommet de Marrakech, les 10 et 11 décembre prochains, et qu’il est prêt à aller au clash avec la N-VA. Ce n’est cependant pas ce qu’il a dit en on à la tribune.
"Mon avis (sur le Pacte des migrations) est connu. Courant septembre, j’ai exprimé une position très claire devant les Nations unies", a-t-il déclaré. Mais de poursuivre : "Depuis, c’est vrai, dans plusieurs pays européens, il y a des questions, des débats, des objections, des hésitations. La responsabilité politique d’un Premier ministre est de mener un débat sur le fond." Selon lui, "nous ne pouvons pas faire semblant de ne pas voir ce qui se passe en Europe. Nous allons travailler avec les collègues européens et nous prendrons position le moment venu." Bref, ceux qui s’attendaient à une prise de position ferme en sont pour leurs frais.
"On n’a pas demandé votre position, mais celle du gouvernement", a répliqué Kristof Calvo (Groen). "Vous prétendez être clair, mais après cette intervention, rien n’est plus obscur, a enchaîné Ahmed Laaouej (PS). On ne sait toujours pas si vous irez signer le Pacte à Marrakech."
Sur le fond, la N-VA dit craindre que la Belgique perde une partie de sa souveraineté dans la gestion des flux migratoires. "Notre maison de la démocratie se situe à Bruxelles, pas à Marrakech" où sera signé le Pacte, a exprimé Peter De Roover. Le texte est pourtant non contraignant pour les États signataires, comme l’ont rappelé plusieurs intervenants. "Si ce texte est non contraignant, alors je décide de ne pas y adhérer", a réagi l’élu nationaliste. Lequel dit aussi vouloir éviter une césure en Europe entre les pays de l’Est (plutôt défavorables au texte) et les pays de l’Ouest (plutôt favorables).
"S’il faut une déclaration interprétative, on le fera"
La majorité est apparue très divisée, jeudi, entre la N-VA et les trois autres formations. "Avec l’aval du gouvernement, vous (Charles Michel) avez annoncé que notre pays allait approuver le Pacte. À raison !", a lancé Servais Verherstraeten (CD&V), dénonçant implicitement l’attitude de la N-VA qui aurait renié son engagement. Pour Patrick Dewael (Open VLD), "c’est une illusion de croire qu’on peut résoudre ces défis (de la migration) tout seul. […] Ceux qui disent cela sont soit naïfs, soit de mauvaise foi". Enfin, David Clarinval (MR) a indiqué que "le Pacte est respectueux de la souveraineté des États puisque chacun d’eux aura toute la latitude pour l’implémenter". "S’il faut une déclaration interprétative, on le fera", a ponctué M. Verherstraeten.
C’est effectivement sur cette base que travaille la majorité. Une déclaration interprétative permettrait au gouvernement de préciser la manière dont il entend appliquer le Pacte des migrations. "Vous êtes le chef du gouvernement, a conclu le N-VA Peter De Roover à l’attention de Charles Michel. Vous ne pouvez donc agir qu’au nom des quatre partis de gouvernement." Comprenez : au libéral de trouver une solution acceptable pour tout le monde. Il espère en outre, nous dit-on, qu’une déclaration comparable puisse être obtenue au niveau européen. Il reste deux semaines pour y parvenir.