Deux abstentions parlementaires du PTB choquent les autres partis
La semaine dernière, en commission des Relations extérieures de la Chambre, les députés votaient sur une proposition de résolution visant à augmenter l’apport financier de la Belgique pour gérer la situation humanitaire dans la région d’Idlib en Syrie. Un texte porté par des députés Écolo-Groen et PS.
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Publié le 18-06-2020 à 07h49 - Mis à jour le 18-06-2020 à 10h38
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Le PTB n’est pas pro-Russe ou pro-Assad, il est surtout anti-américain.
La semaine dernière, en commission des Relations extérieures de la Chambre, les députés votaient sur une proposition de résolution visant à augmenter l’apport financier de la Belgique pour gérer la situation humanitaire dans la région d’Idlib en Syrie. Un texte porté par des députés Écolo-Groen et PS.
Le texte a passé l’étape de la commission, le vote est revenu positif. Mais, et c’est ce qui a étonné des élus et un certain nombre d’observateurs, le PTB s’est abstenu. Pourquoi ? Parce que le PTB soutient le régime de Bachar al-Assad ? "Non, je n’ai aucune sympathie pour lui" , se justifie le député PTB Nabil Boukili. "Cette proposition que nous partageons sur le fond induit un biais politique qui n’a rien à faire dans ce texte et qui pourrait même le déforcer." Le député PTB vise la phrase de la proposition qui demande au gouvernement belge "d’appeler les forces armées russes et syriennes à cesser toute attaque directe à l’encontre des civils, ainsi que les attaques qui visent indifféremment les civils et les combattants et de mettre fin aux autres violations graves du droit international humanitaire" .
Pourquoi ne pas viser d’autres pays ?
Nabil Boukili se demande "pourquoi ne viser que la Russie et la Syrie de Bachar al-Assad ? Il fallait viser l’ensemble des belligérants. Pourquoi ne pas citer l’Arabie saoudite, le Qatar, Israël ou la Turquie ? La Turquie, ils l’ont ajoutée par la suite, pourquoi pas les autres ? Ce conflit ne date pas d’hier. Il est le résultat de l’invasion de l’Irak en 2003 sans mandat de l’Onu. Il ne faut pas faire comme si cela n’existait pas. Cet aspect du texte est partial."
Pour Samuel Cogolati (Écolo-Groen), l’un des coauteurs du texte, le PTB va trop loin. "Nous basons cette demande sur le rapport d’Amnesty qui identifie, dans la province d’Idlib, les Russes et l’armée syrienne d’Assad comme responsables de crimes de guerre. De toute façon, nous avons aussi ajouté au texte un amendement qui demande des sanctions ciblées contre tous les auteurs de crimes de guerre. Le droit international n’est pas à géométrie variable."
Une autre abstention du PTB a fait bondir. Cette fois, il s’agit d’une proposition de résolution du MR débattue au Sénat, évoquée dans La Libre du 12 juin et qui vise à "condamner la pratique continue du prélèvement forcé d’organes en République populaire de Chine sur des prisonniers d’opinion, en particulier sur des pratiquants du Falun Gong et des Ouïghours" .
Antoine Hermant, sénateur PTB, explique : "Bien entendu, nous sommes contre de telles pratiques, que ce soit en Chine ou ailleurs. Nous nous sommes abstenus notamment parce qu’il y a plusieurs publications très sérieuses qui permettent de penser que depuis 2015, ce genre de chose n’est peut-être plus en vigueur. D’autres questions se posaient sur le texte et nous n’en étions pas satisfaits."
Pour le politologue de l’ULB Pascal Delwit, directeur du Cevipol et auteur, en 2014, d’un ouvrage intitulé PTB, nouvelle gauche, vieille recette , le positionnement du PTB sur ces résolutions doit être analysé à la lumière de deux éléments. "Il y a tout d’abord, dans l’histoire de ce parti, la définition d’un ennemi principal. Aux origines du parti, c’était l’URSS (NdlR : le parti était maoïste). Mais, ces trente dernières années, l’ennemi a changé et ce sont les USA qui occupent cette place. Je grossis un peu le trait, mais lorsqu’on détermine un ennemi, on détermine aussi qui sont les amis. Et donc les ennemis de mon ennemi sont mes amis. Ils peuvent donc difficilement soutenir une résolution qui soutient le bloc occidental. Mais on ne trouvera pas de déclarations pro-russe ou pro-Assad. Autre exemple : l’attitude face au Vénézuela. On ne trouvera pas de soutien clair à Maduro mais plutôt une demande de faire cesser l’ingérence étrangère."
La place spécifique de la Chine
La deuxième raison évoquée par Pascal Delwit concerne le rapport que le PTB entretient avec le Parti communiste chinois. "À l’origine, le parti était maoïste et pro-chinois. Depuis lors, le régime économique chinois a évolué mais la Chine conserve une place spéciale au PTB. Lors de certaines réunions internationales, le PTB rencontre le Parti communiste chinois, ils ne vont donc pas s’associer facilement à une résolution contre la Chine. Lorsqu’ils évoquent la présence massive de la Chine en Afrique, ils ne parlent pas d’impérialisme mais de relation mutuellement avantageuse. Mais encore une fois, on ne trouvera pas de déclaration pro-chinoise" , conclut Pascal Delwit.