Torrent de critiques contre le patron des socialistes flamands
Conner Rousseau (Vooruit) s’attire les foudres après avoir dit ne pas se sentir chez lui à Molenbeek. Les critiques sont notamment venues du camp socialiste, le sien. Les socialistes flamands sont divisés depuis des décennies sur la question de l’immigration.
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- Publié le 26-04-2022 à 22h18
- Mis à jour le 12-05-2022 à 21h25
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Il a tenté de corriger le tir, mardi matin. Trop tard. Le mal était fait. Le président des socialistes flamands de Vooruit, Conner Rousseau, s'est attiré un tombereau de reproches après des déclarations parues le matin même dans le magazine Humo. Interrogé sur la place prise par le débat migratoire en France et le fait que trois quarts des Français disent qu'ils veulent avoir le sentiment de vivre dans leur pays, M. Rousseau a répondu : "Quand je roule dans Molenbeek, moi non plus je ne me sens pas en Belgique."
Indignation sur les réseaux sociaux. En particulier dans le camp socialiste. "Les propos de Conner Rousseau sont intolérables. Stigmatisants et xénophobes, a notamment réagi Ahmed Laaouej, chef du groupe PS à la Chambre. Bruxelles est une région cosmopolite avec des quartiers connaissant une grande diversité de population. Ils méritent mieux qu'un mépris digne d'une discussion de bistrot. Lamentable et insupportable."
Pour Catherine Moureaux, la bourgmestre PS de Molenbeek, "ces propos sont inacceptables. Ils témoignent d'un certain mépris et d'un racisme ordinaire, latent, qui prend notre commune comme point d'appui régulièrement. Ce n'est pas digne d'un président de parti", a-t-elle déclaré à La Libre .
"Les stéréotypes de certains Flamands sur Bruxelles"
Jef Van Damme, échevin Vooruit à Molenbeek, a lui aussi dénoncé les propos de son président de parti : "Remarque très déplacée de Conner Rousseau. Molenbeek, c'est tout autant la Belgique que Saint-Nicolas (ville natale de l'intéressé, NdlR). Qu'il s'arrête [à Molenbeek] la prochaine fois qu'il y passe, je serais heureux de lui faire visiter les lieux en 2022." Plusieurs personnalités politiques sont allées dans le même sens, estimant que M. Rousseau ne connaît pas Molenbeek.
Dans la longue série de réactions, encore celle des Jongsocialisten (les Jeunes socialistes flamands). "Renforcer […] les stéréotypes que certains Flamands ont sur Bruxelles n'aide personne […]. Nous devons oser […] regarder au-delà de ces préjugés", ont-ils estimé, saluant au passage le travail de terrain effectué par les ténors de Vooruit en Région bruxelloise.
Dans Humo, Conner Rousseau est allé plus loin qu'une saillie sur Molenbeek. "La plupart de ces gens sont nés ici, a-t-il développé. Le plus important, c'est qu'ils parlent et travaillent dans notre langue. À Bruxelles, à cause de la pénurie d'enseignants, des gens donnent cours en arabe en classe, parce qu'ils ne parlent pas français. Inacceptable. Et que fait le gouvernement flamand ? Il augmente le coût des cours de langue pour réduire les listes d'attente", à l'en croire. Sur Radio 1, mardi matin, il est revenu sur ses propos. Son intention, a-t-il dit, était de plaider pour une mixité sociale réussie. Mais le problème, selon lui, c'est que dans certains quartiers, on parle quasi uniquement arabe, de sorte que les enfants ne sont pas encouragés à apprendre le néerlandais ou le français, ce qui hypothéquerait leurs chances à l'école et sur le marché de l'emploi.
"L’engouement idéologique de l’élite intellectuelle"
"Ce que Conner Rousseau déclare […] n'est pas seulement indigne, c'est aussi totalement faux, a répliqué Benjamin Dalle (CD&V), ministre du gouvernement flamand en charge de Bruxelles. Les cours de langue et le parcours de citoyenneté sont gratuits à Bruxelles. Quant à prétendre que des cours seraient donnés en arabe ? Qu'il me montre seulement une telle école de la Communauté flamande !" "Jamais autant d'adultes n'ont appris le néerlandais à Bruxelles qu'aujourd'hui, a renchéri Sven Gatz (Open VLD), ministre du gouvernement bruxellois, chargé du Multilinguisme et de l'Image de Bruxelles, jamais autant d'enfants n'ont été inscrits dans un enseignement néerlandophone. Un fait. Plus important que vos histoires."
Ironie de l'histoire, c'est auprès de son homologue de la N-VA que le président de Vooruit a trouvé du soutien. "Il y a bien une ségrégation factuelle dans des endroits comme Molenbeek, qui ne peut tout simplement pas être ignorée, a lancé Bart De Wever. L'indignation postmoderne qui suit toujours cette analyse pourtant évidente est en contradiction avec la réalité. Typique de l'engouement idéologique de l'élite intellectuelle", a-t-il conclu dans un style bien à lui.