Tensions fédérales sur la suppression de la notion de récidive du Code pénal
La modernisation du Code pénal par la Vivaldi connaît un revirement spectaculaire.
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Publié le 13-05-2022 à 20h37 - Mis à jour le 13-05-2022 à 20h38
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La Vivaldi touche au cœur de ses fonctions régaliennes : le Code pénal. Il s'agit de le moderniser, de le simplifier. Parmi les sujets discutés, la notion de récidive fait l'objet d'une confrontation entre les partenaires fédéraux. Ce n'est pas étonnant dans la mesure où l'accord de gouvernement lui-même est flou : "Les récidivistes seront traités plus sévèrement, mais aussi accompagnés vers un autre parcours de vie", stipule le texte.
En se contredisant, les récentes réunions intercabinets sur la réforme du Code pénal reflètent cette ambiguïté. Selon le procès-verbal d'une réunion du 28 avril, les sept partis de la Vivaldi envisageaient le retrait de la notion : "La récidive est supprimée du Code pénal", acte ce document que nous avons pu obtenir.
Toutefois, la dernière rencontre entre les experts des ministres a débouché sur un autre compromis : le durcissement des peines en cas de récidive serait maintenu et, dans certains cas, renforcé. Les discussions doivent se poursuivre. Contacté par La Libre, le cabinet du ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne (Open VLD), l'assure : la notion restera dans le Code.
La gauche face à la droite
Comment expliquer ces revirements ? Le CD&V et le MR auraient montré les dents face à l’idée initialement retenue. Pour ces deux formations, il ne peut être question d’une suppression des dispositions concernant la récidive.
Inversement, l’aile gauche du gouvernement reste attachée à l’idée de retirer du Code pénal cette possibilité d’aggravation des peines. S’il y a récidive, c’est que la première punition n’a pas permis de corriger le comportement du coupable. Il faut donc réfléchir à d’autres méthodes, entend-on.
Le sujet est sensible. En 2018, les experts membres de la commission de réforme du Code pénal avaient démissionné après avoir constaté que le ministre de la Justice (Koen Geens, à l’époque) n’avait pas tenu compte de plusieurs de leurs recommandations dans un avant-projet approuvé par le gouvernement Michel. Entre autres, ces spécialistes du droit pénal proposaient de limiter l’application de la notion de récidive à des situations spécifiques.
Un débat symbolique
La suppression de la référence à la récidive n'aurait toutefois pas un grand impact, estime Marie-Aude Beernaert, qui enseigne le droit pénal à l'UCLouvain. "Même sans la notion de récidive dans le Code pénal, le juge ne serait pas désarmé pour qualifier la peine au plus juste en puisant dans la fourchette des peines disponibles", explique-t-elle.
Pour l'universitaire, la discussion politique actuelle a une connotation symbolique : "Je n'ai pas le sentiment qu'aujourd'hui les juges utilisent pleinement les possibilités d'aggravation des peines que permet la récidive. Par ailleurs, en cas de suppression, les antécédents judiciaires pourraient toujours être pris en compte par le juge."