Le FDF est-il de retour ?
Le nouveau programme institutionnel du parti porte la marque d’Olivier Maingain.
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Publié le 27-05-2022 à 10h31
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Depuis son congrès du 15 mai, où a été arrêtée la nouvelle ligne institutionnelle, Défi s'est fendu de plusieurs pavés communautaires dans la mare fédérale. Dans La Libre du 20 mai, François De Smet a plaidé pour "un cordon sanitaire contre le PTB, le Belang et la N-VA". "Le FDF est de retour", a réagi Theo Francken, député N-VA sur Twitter.
Quelques jours plus tard, dans La DH, le président des amarantes a proposé d'élargir Bruxelles aux communes de la périphérie. Cette fois, c'est Écolo qui s'est fendu de la même remarque. "Le FDF est de retour", a tweeté Gilles Vanden Burre, chef de groupe Écolo/Groen à la Chambre. "Ramener la frontière linguistique et le communautaire au galop plutôt que d'encourager des collaborations structurelles en matière d'emploi, d'environnement ou de mobilité. C'est tellement décalé des urgences de nos concitoyens…"
Rivalités politiques mises à part, le président de Défi, en poste depuis décembre 2019, a surpris par le ton très pro-francophone de son propos. Il n’en était guère coutumier jusqu’alors.
"Marquer son territoire en cas d’élections anticipées"
"Nous sommes dans une séquence d'évocation d'élections anticipées, autour d'un narratif. La Vivaldi était soudée par la crise Covid. Or, ce qui la réunissait a un peu disparu. Nous voyons donc des acteurs politiques reprendre des positions politiques plus acérées. Dans l'hypothèse d'élections anticipées et d'une 7e réforme de l'État, sortir pour marquer son territoire peut avoir du sens", analyse Pascal Delwit, politologue à l'ULB.
Ces sorties assertives peuvent aussi permettre à François De Smet, à 7 mois des élections internes, de donner certains gages aux militants historiques.
François De Smet se défend d'avoir recours à cette stratégie. "Je m'étonne de l'étonnement. Tout était dans les discours prononcé à Wavre le 15 mai".
Le parti, selon le philosophe de formation, suit simplement son calendrier de refonte programmatique, qui a en effet abouti voici 10 jours sur le volet institutionnel. "Notre projet est resté cohérent, on a simplement précisé certaines choses", reprend François De Smet. "Parler communautaire en pleine pandémie n'avait pas de sens. Mais nous n'avons jamais laissé tomber nos lignes institutionnelles."
"Garder l’ADN, mais pas s’y limiter"
Défi a ainsi fait le choix de renouer avec son ADN, de réaffirmer la défense des francophones. Et de ne pas suivre l’exemple des Engagés qui ont renoncé dans leur nouveau manifeste à un marqueur important, le personnalisme chrétien.
Il a d’ailleurs été question début 2021 d’un rapprochement avec le CDH. Mais l’ancien président des amarantes, Olivier Maingain, est monté au créneau pour s’y opposer.
"Si vous n'empruntez pas la voie du rapprochement, il faut rappeler sa propre identité. Défi est né en 1964 contre les lois linguistiques", rappelle Pascal Delwit.
"On garde l'ADN mais on ne s'y limite pas. Si on s'était renfrognés sur le communautaire, on n'existerait plus", précise François De Smet.
Le ton du message exhale pourtant bien un souffle FDF tandis que la patte d'Olivier Maingain y est perceptible. Cela ne doit rien au hasard : l'ancien président a lui-même rédigé le premier jet du volet institutionnel de ce programme. "Un élargissement de Bruxelles permet un meilleur équilibre de l'État fédéral. Les Flamands se plaignent d'être moins nombreux à Bruxelles, et cela s'atténuera justement si on intègre les communes de la périphérie", précise Olivier Maingain.
Il est lui-même intervenu en interne pour défendre sa vision du lien entre francophones.
Des tensions internes
Christophe Magdalijns, député bruxellois et ancien challenger de De Smet aux élections internes, a en effet déposé une proposition visant à approfondir l’idée d’une Belgique à quatre régions. Bernard Clerfayt était également sur une ligne régionaliste.
"Mon opinion divergente a été minorisée dans les instances et caricaturée par Olivier Maingain, qui l'a comparée à du confédéralisme à quatre" , souligne Christophe Magdalijns. "J'étais favorable à une FWB light et une charte pour lier le destin des francophones. Je proposais d'activer l'article 35 de la Constitution, en inversant le rapport. Les compétences fédérales auraient été limitées, le reste serait tombé dans l'escarcelle des régions."
Des divergences se sont également manifestées lorsque le président De Smet a proposé une refédéralisation de certaines compétences, notamment sur la Mobilité. Dans son programme, Défi se limite finalement à proposer la refédéralisation de la Santé. "On a senti que, même quand il a une opinion divergente, De Smet cherche toujours l'équilibre avec Maingain. Ma vision est qu'il faut aborder l'institutionnel sous un angle socio-économique. Quand on parle d'élargir Bruxelles, il faut dire qu'on offre à la Belgique un poumon économique et culturel hyperperformant", conclut Christophe Magdalijns. "Je me demande si certains nouveaux électeurs ne trouvent pas ringards certains combats historiques du parti."