David Clarinval, le ministre qui joue le tampon entre De Croo et Bouchez
Le vice-Premier ministre MR, au tempérament diplomate et placide, atténue les tensions qui opposent le président du MR au Premier ministre et aux autres partenaires du gouvernement fédéral.
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Publié le 31-01-2023 à 07h19
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Leurs personnalités divergent fortement. Si Georges-Louis Bouchez aime électriser les débats et joue la provocation en interview ou sur les réseaux sociaux, David Clarinval affiche un style politique plus paisible, presque flegmatique. Les deux libéraux “bleu foncé” s’entendent pourtant très bien et se complètent. À chaque fois qu’il en a eu l’occasion, le jeune président du MR a confié le délicat poste de vice-Premier ministre (VP) à David Clarinval.
Lors des élections à la présidence du parti en 2019, le bourgmestre empêché de Bièvre avait été le premier à soutenir Bouchez publiquement. Il aime sa ligne idéologique, un peu plus à droite que celle professée par son prédécesseur Charles Michel. Georges-Louis Bouchez a confiance en la loyauté de David Clarinval, une qualité à ne pas sous-estimer dans cet univers politique impitoyable. En particulier au MR où l’individualisme des mandataires l’emporte parfois sur la solidarité du groupe.
Comme chef de file du MR au sein du gouvernement fédéral, David Clarinval se situe toutefois entre le marteau et l’enclume. La “particip-opposition” à laquelle se livre le président du Mouvement réformateur place sa formation en porte-à-faux depuis plus de deux ans. Ce contexte explique en partie la détestation à peine voilée qui oppose Alexander De Croo à Georges-Louis Bouchez. Mais, diplomate, le VP libéral prend les coups à la place de son président. En kern, le comité ministériel resserré autour des poids lourds fédéraux, le ton peut vite monter…
Bouchez provoque une tempête en kern…
Un exemple. Nous sommes le vendredi 18 novembre 2022. Comme souvent en fin de semaine, le kern se réunit et tranche les grands dossiers politiques avant la réunion plus formelle du Conseil des ministres. Durant les discussions, la chaîne d’information LN24 révèle les contours d’un dossier explosif. Quelques jours auparavant, le gouvernement a recalé un point proposé par la ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib (MR) : l’exportation de matériel à utilisation nucléaire, fabriqué en Flandre et destiné à l’armée britannique. Dans cette affaire, les partenaires écologistes sont pointés du doigt.
Sur Twitter, Georges-Louis Bouchez dénonce alors ce qu’il désigne comme “la plus grande des bêtises dogmatiques” de la part des verts. Georges Gilkinet, le vice-Premier Écolo, constatant la charge lancée par le président du MR, fait pleuvoir les reproches sur David Clarinval, assis en face de lui. Le VP libéral est suspecté d’avoir fait “fuiter” dans la presse des informations classées secret-défense. Il niera être à la source de cette indiscrétion, mais il subira les foudres de ses collègues du comité ministériel restreint échauffés par les tweets de Bouchez.
Encore plus récemment, les négociations entre le Premier ministre Alexander De Croo, la ministre de l’Énergie, Tinne Van der Straeten (Groen), et Engie ont à nouveau placé David Clarinval dans l’œil du cyclone. Son président de parti avait fait du maintien en activité de deux réacteurs une question centrale et trépignait devant la lenteur des discussions. Plus d’une fois, son représentant au sein de la Vivaldi a dû l’apaiser afin d’éviter une expression dans les médias qui aurait pu compromettre des négociations engagées dans leur phase finale.
Pourtant, David Clarinval aurait pu montrer les dents. Il plaide la cause du nucléaire de longue date. Même au sein du MR, avant que le vent ne tourne suite à l’invasion de l’Ukraine, il avait été tourné en dérision. On a tendance à l’oublier mais, durant la campagne électorale 2019, les réformateurs défendaient la création de 9 centrales au gaz afin de préparer la sortie du nucléaire en 2025…
Un coup de pouce à De Croo
Si David Clarinval traduit en langage plus diplomatique la volonté de son chef de parti, il peut également amortir les coups venant de l'extérieur. En décembre, alors que la tension au sein de la famille libérale était encore très élevée, le vice-Premier ministre a fait un petit pas en direction de l’Open VLD.
Alexander De Croo venait de reprendre en main la réforme des pensions et avait mis sur la table gouvernementale son propre projet, aux accents plus libéraux. Les socialistes francophones, qui détiennent la compétence Pensions au fédéral, étaient très irrités par cette méthode de travail. Se cherchant des appuis, le Premier ministre a envoyé un petit message à David Clarinval : “Soutiens-moi en kern”. Le vice-Premier a mis son ego de côté et a suivi le Premier ministre. “David a soutenu De Croo, évidemment : le contenu de sa note nous convenait. Mais, le même jour, les représentants du MR et de l’Open VLD s’étaient engueulés pendant une heure, se souvient une source MR. David aurait pu lui dire d’aller se faire voir sur les pensions… Après tout, Egbert Lachaert (président de l’Open VLD) nous avait comparés au Vlaams Belang quelques jours avant !”