L’humour de Magnette le Wallon, qui ne fait pas rire la Flandre qui bosse dur

Mardi, le président du PS s’est attiré les foudres de nombre de politiques avec ses propos sur les Flamands “travailleurs” et les Wallons “qui préfèrent profiter de la vie”. Des déclarations prononcées sur le ton de l’humour, reprises erronément par le quotidien Het Laatste Nieuws puis rapidement relayées par d’autres médias. Explications.

Antoine CleversJournaliste service Belgique

Publié le 07-02-2023 à 14h36 - Mis à jour le 07-02-2023 à 20h20

Paul Magnette Premier ministre? "Si on nous donne le confédéralisme, vous prenez qui vous voulez"

Paul Magnette, président du PS, indiquait ce matin dans le journal Le Soir qu'il était candidat pour le poste de Premier ministre. "Si on nous donne le confédéralisme, pourquoi pas?" a répondu le député fédéral N-VA Theo Francken a répondu au micro de Romain Mayez. "Ils peuvent faire ce qu'ils veulent avec les résidus. Donnez-nous notre autonomie, et pas de problème pour moi. Si nous avons le confédéralisme en Flandre, tout le monde peut devenir Premier ministre de la Belgique, ça ne m'intéresse plus."

NdlR : La version initiale de cet article a été modifiée.

Paul Magnette devrait arrêter de faire l’humour. Quand le président du PS avait déclaré au magazine flamand Humo, il y a quelques mois, qu’il faudrait faire de la Belgique “un pays sans e-commerce, avec de vrais magasins”, il s’était pris une volée de bois vert, surtout de Flandre. C’était un trait d’humour, paraît-il.

Rebelote dans le dernier numéro d’un autre magazine flamand, Dag Allemaal. Il y explique que, jusque dans les années 60, c’est la Flandre qui profitait de la richesse de la Wallonie, et non l’inverse comme aujourd’hui. “J’ai l’impression que les Flamands en veulent parfois trop, développe-t-il. Je le comprends […] : pendant des siècles, il y a eu de la pauvreté, et il est apparemment dans les gènes [des Flamands] de travailler aussi dur que possible. Parfois peut-être au détriment de leur propre bonheur.”

Puis il ajoute : “Il y a une blague connue à ce sujet. Un Flamand dépasse un pêcheur le long d’une rivière wallonne. ‘Pourquoi n’achètes-tu pas un grand bateau avec beaucoup de lignes, pour gagner plus comme moi et arrêter de travailler plus tôt ?’, demande le Flamand. ‘Mais que feras-tu ensuite ?’, répond le Wallon. ‘Je pourrai pêcher comme toi.’ Pourquoi repousser si longtemps le bonheur ?, se demandent de nombreux Wallons. Les Wallons aiment profiter de la vie. Est-ce si mal ?”, conclut Paul Magnette.

La machine médiatique s’est emballée en Flandre lorsque le journal Het Laatste Nieuws a repris, mardi, l’extrait de l’interview en titrant : “Les Flamands doivent toujours travailler dur, les Wallons préfèrent profiter de la vie. Est-ce si mal ?” Une version réductrice de ses propos, qui a suscité une pluie de réactions.

“Il est temps pour nous, en tant que Flamands, de dire un 'non' clair à cela”, a lancé le président de la N-VA, Bart De Wever. Pour le ministre flamand Bart Somers (Open VLD), Paul Magnette “prouve qu’il ne convient pas comme Premier ministre”, parlant de “déclarations idiotes” “alors que le taux d’emploi en Wallonie est dramatiquement à la traîne”. “Avec les clichés, personne n’est gagnant”, s’est désolé un autre ministre flamand, Benjamin Dalle (CD&V). Tandis que pour le co-président de Groen, Jeremie Vaneeckhout, la déclaration de M. Magnette “n’a vraiment aucun sens. C’est une insulte aux Belges”.

“Prendre la chute d’une blague pour une déclaration politique, où est-on ? !, a finalement réagi le socialiste, mardi, en fin d’après-midi, visiblement agacé. Confirmation qu’il n’y a pas de place pour le second degré en politique. Et encore moins quand on fait exprès de ne pas comprendre.”