Le ministre Weyts refuse d’autoriser des masters uniquement en anglais : “Le liant dans notre société, c’est le néerlandais”
La demande de trois grandes universités flamandes revenait à supprimer en Flandre toutes les formations d’ingénieurs civils en néerlandais.
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Publié le 12-03-2023 à 08h10
Il n’y a pas qu’en Fédération Wallonie-Bruxelles que les universités se voient refuser leurs demandes d’habilitation à créer de nouveaux programmes académiques. Trois universités flamandes – la KU Leuven, l'UGent et la VUB – ont vu leur souhait d’offrir aux étudiants un master en anglais d’ingénieur civil recalé par le ministre flamand de l’Enseignement, Ben Weyts (N-VA). Elles avaient pourtant le soutien des organisations représentatives des étudiants et des fédérations patronales. Même la coupole des patrons flamands, le Voka, parfois présenté comme le “patron de la N-VA”, avait appuyé la demande. Cela n’a manifestement pas suffi à ébranler l’intransigeance de Ben Weyts.
Il n’est pas interdit, en Flandre, d’organiser un cursus universitaire dans une autre langue que le néerlandais. Mais il faut que l’université qui le propose dispense la même formation en néerlandais. Et c’est là tout le problème posé par la demande groupée de la KU Leuven, de l’UGent et de la VUB : les trois universités veulent être dispensées d’offrir encore le master en ingénieur civil en néerlandais. Si bien qu’il n’aurait plus été possible de suivre un master d’ingénieur civil en néerlandais en Flandre. Impensable pour le ministre nationaliste.
L’anglais, la planche de salut
Les universités avaient des arguments à faire valoir. Il y a l’argument pragmatique. La toute grande majorité des étudiants optent désormais pour la formation en anglais et, dès lors, devoir doubler tous les cours en néerlandais devient un luxe de plus en plus cher. Il y a l’argument de la raison. L’anglais, c’est la langue d’usage dans les grandes entreprises du génie civil et dans le monde de la technologie – autant que les étudiants y soient complètement immergés. Il y a, enfin, une question existentielle. Les universités doivent, pour leur survie, recruter des étudiants à l’étranger. Et dans cette concurrence de plus en plus féroce, le néerlandais – langue groupusculaire à l’échelle du monde – est un handicap. L’anglais, c’est une planche de salut. De leur salut.
Le ministre Weyts ne manque cependant pas d’arguments à leur opposer. Comme responsable politique, il estime devoir garantir un accès aux études le plus large possible. Et, à ses yeux, obliger les jeunes Flamands à suivre un cours dans une langue qui n’est pas la leur revient, au contraire, à le réduire. Le ministre N-VA s’inquiète, par ailleurs, d’un éventuel fossé qui pourrait se créer entre des ingénieurs formés en anglais et les ouvriers avec lesquels ils devront travailler et qui, eux, auront suivi une filière où le néerlandais est resté obligatoire.
Et puis, surtout, en bon nationaliste, il dit vouloir veiller à la cohésion de la société flamande. “Dans une société qui devient de plus en plus multiculturelle et complexe, nous devons mettre davantage l’accent sur la langue de travail unificatrice de la Flandre, la 'maïzena' de notre société : le néerlandais”, a-t-il écrit.
Par son refus, Ben Weyts pouvait se poser en héritier des pionniers du mouvement flamand qui ont lutté pour que le néerlandais supplante le français dans les universités flamandes. Il n’a pas dû hésiter longtemps.